But d’une société ? Retour sur une question simple et complexe

Le blogue Canadian Business – par l’intermédiaire de Chris Mc Donald et autour du cas Target (entreprise qui ferme ses portes au Canada) – pose une question simple, mais ô combien intéressante : quel est l’objectif d’une entreprise ? (ici).

So now ask, again, what’s the purpose of a corporation? We’ve mentioned already the shareholder-wealth-building view. A more modern, critical view is to say that the purpose of a corporation is something more than the pursuit of shareholder wealth. Corporations, on this view, have a higher purpose as part of a community. The corporation has a social role, and that role goes far beyond attending to the interests of shareholders. Adherents of this view are indeed typically indignant at the very thought that anyone could think that corporations have so lowly a purpose as to merely make money.

And those critics are right, at least in part. It really is foolish to think that the purpose of a corporation is to make money. But that’s only because it’s foolish to think that corporations have purposes at all. That is, it’s foolish to think of a large, multifaceted organization as having a single, unitary “purpose” in the universe, rather than thinking of it as serving many purposes for many interested parties. Arguing over what a corporation is “really for”—building shareholder value? making products to make people happy? providing jobs?—is a fool’s errand.

There are, of course, exceptions. If an individual or small group files the paperwork to form a corporation to serve some single, stated purpose, then it’s probably fair to say that that is what the corporation’s purpose is. But that’s seldom what’s at stake, at least as far as this debate goes. When you’re talking about a widely-held, multibillion dollar corporation like Target, talk of the organization’s “real purpose” just sounds silly.

But the fact that the corporation is many things to many people doesn’t mean that everyone is bound to consider all of those purposes, all of the time.

To see what I mean, consider a different, parallel question. What is the purpose of a job? Say, your job. If we think of your job as an abstract thing—a position in the marketplace that happens to be filled by you—what is its purpose? Does that question even make sense? You’ve got the job, and it (hopefully) helps you achieve your goals. How you should behave yourself in the course of that job, in pursuit of those goals, is a question of ethics. And that question is much more enlightening than some grand question about purposes.

Que penser de cette affirmation si ce n’est qu’effectivement réduire l’objectif d’une société par actions à la poursuite de profits est sans doute réducteur. Certes, cette position (sans doute par simplicité et simplisme) est défendue par une part des doctrines économique et juridique. Cependant, en dépit de son succès, cette position ne doit pas cacher que des alternatives ont été proposées… alternatives qui sont pour le moins sérieuses ! Qu’il suffise d’évoquer ici la théorie de l’institution (plus européenne) de Maurice Hauriou ou Georges Renard, la Doctrine de l’entreprise de Claude Champaud et Jean Paillusseau, la théorie de l’entité réelle de Mickael Phillips, John Farrar et Adolph Berle (plus américaine). Deux exemples illustreront mes propos :

  1. Au Canada, un des auteurs du Projet de loi canadien présenté en 1971 par le groupe Dickerson (J. L. Howard)  releva que « [a] corporation law […] connotes a statutory institution that does not depend on contract and agency doctrine ».
  2. En France, la Cour d’appel de Paris a noté en 1966 que : « Bien que dans la conception ancienne qui reste celle du Code civil, la société soit un contrat, il ne saurait être contesté qu’elle constitue bien plus qu’un contrat, une institution dont la constitution, le fonctionnement sont réglés dans tous les systèmes juridiques par des dispositions légales impératives […] ».

Mais, les exemples pourraient être multipliés… oserais-je vous renvoyer la partie intitulée « Réactivation de théories (négligées ?) sur la nature de la société par actions » aux pages 121 et s. de mon ouvrage « Devoir de prudence et de diligence des administrateurs et RSE : approche comparative et prospective » (Cowansville, éditions Yvon Blais, 2014). Vous y trouverez de nombreuses sources et de quoi alimenter vos idées et réflexions.


Voici des suggestions de lectures récentes qui vous éclaireront sur le débat entourant la nature d’une société :

  • C. Champaud, dir., « L’entreprise dans la société du 21e siècle », Bruxelles, Larcier, 2013
  • V. Chassagnon, « Une analyse historique de la nature juridique de la firme », (2012) 12:2 Revue de la régulation
  • I. Corbisier, « La société : contrat ou institution ? Droits étatsuniens, français, belge, néerlandais, allemand et luxembourgeois », Bruxelles, Larcier, 2011
  • M.J. Phillips, « Reappraising the Real Entity Theory of the Corporation », (1994) 21:4 Fla. St. U.L. Rev. 1061
  • J. Farrar, « Frankenstein Incorporated or Fools Parliament? Revisiting the Concept of the Corporation in Corporate Governance », (1998) 10:2 Bond L. Rev. 142
  • A. Keay, « The Corporate Objective: Corporations, Globalisation and the Law », Cheltenhaum, Edward Elgar Publishing, 2013
  • M. Lizée, « Deux fictions de droit corporatif », (1983) 43:3 R. du B. 649
  • J.-G. Belley et F. Dupuis, « La société par actions : “chose”, “personne” ou “gouvernement” ? » dans P.-E. Moyse, dir., Quelle performance ? De l’efficacité sociale à l’entreprise citoyenne, Montréal, Thémis, 2013, 203

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Ce contenu a été mis à jour le 29 juillet 2015 à 11 h 40 min.

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