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Projet de loi S-285 : vers une réforme de la Loi canadienne sur les sociétés par actions

La sénatrice indépendante Julie Miville-Dechêne a déposé le 23 mai la Loi sur les entreprises du 21e siècle (projet de loi S-285), qui vise à consacrer l’importance des enjeux sociaux et environnementaux dans l’économie moderne. S’appuyant sur des initiatives législatives apparentées au Royaume-Uni, en France, aux États-Unis et au Canada, ainsi que sur des publications influentes, la Loi sur les entreprises du 21e siècle (LE21) modifierait la Loi canadienne sur les sociétés par actions afin d’aligner le pouvoir et la créativité des entreprises sur les exigences d’un monde durable. Le projet de loi est appuyé par plusieurs dirigeants d’entreprise, des groupes de la société civile et des experts en gouvernance de partout au Canada.

La LE21 est un projet de loi court et ciblé, comportant trois éléments essentiels :

  • Raison d’être de l’entreprise : Les obligations fiduciaires des administrateurs et des dirigeants d’entreprise sont liées à la raison d’être de l’entreprise, définie comme la poursuite de ses meilleurs intérêts, tout en veillant à bénéficier à la société et à l’environnement d’une manière proportionnelle à la taille et à la nature de l’entreprise;
  • Transparence : Les entreprises doivent publier des rapports annuels documentant leurs impacts sociaux et environnementaux, en utilisant un cadre de divulgation d’impacts reconnu; et
  • Imputabilité : Des recours sont possibles contre les entreprises qui manquent à leurs obligations.

 

La LE21 repose sur la conviction que les entreprises ne peuvent plus se concentrer exclusivement sur les risques que les enjeux sociaux et environnementaux posent pour leurs propres activités, mais qu’elles doivent également considérer et être responsables de leurs impacts externes sur la société et l’environnement (ce qu’on appelle parfois la double matérialité). Ce principe est enchâssé dans la directive de l’Union européenne CSRD, dans le projet de Better Business Act au Royaume-Uni, dans la Loi PACTE en France, et dans les législations sur les benefit companies aux États-Unis, au Canada et ailleurs.

 

Pour en savoir plus : www.le21ba.ca

 

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Écoblanchiment : vers une modification de la loi canadienne de la concurrence

Mes Chloé Fauchon et William Bolduc offre un billet intéressant sur le projet de loi C-59 du Parlement du Canada. Ce projet vient modifier la Loi sur la concurrence pour améliorer les outils de lutte contre l’écoblanchiment.

 

Extrait :

La modification législative envisagée permettrait au commissaire du Bureau de la concurrence (le « Bureau ») d’examiner le comportement de toute personne effectuant la promotion d’un produit par une déclaration ou d’une garantie environnementale.

Dans la mesure où cette entreprise ou cette personne ne sera pas en mesure de démontrer les avantages pour la protection de l’environnement ou l’atténuation des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques attribuables au produit, le commissaire de la concurrence pourra demander à un tribunal d’ordonner à l’entreprise ou la personne en cause de cesser de promouvoir le produit sur le fondement d’une déclaration ou d’une garantie environnementale non conforme, de publier un avis correctif et de payer une sanction administrative pécuniaire pouvant atteindre, pour une personne morale, entre 10 millions de dollars et trois fois la valeur du bénéfice tiré du comportement trompeur, selon le plus élevé de ces montants ou, si ce montant ne peut pas être déterminé raisonnablement, 3% des recettes globales brutes annuelles de la personne morale. Pour chaque infraction subséquente, la sanction pourra plutôt atteindre les 15 millions de dollars.

(…) De cette nouvelle disposition découle une obligation désormais expresse pour toute personne ou entreprise de fonder ses indications de nature environnementale sur une « épreuve suffisante et appropriée ». Une « épreuve » au sens de cette Loi est une analyse, une vérification, un test visant à démontrer le résultat ou l’effet allégué du produit. Il n’est pas nécessaire que la méthode soit scientifique ou que les résultats soient établis avec certitude, les tribunaux ayant généralement interprété le mot « approprié » comme un mot signifiant qui a la capacité, qui est apte, qui convient ou qui est dicté par les circonstances. En matière d’indication trompeuse, les tribunaux ont précisé la nature des critères qui doivent être considérés pour juger de la « suffisance » et du caractère « approprié » des épreuves effectuées. Ainsi, le caractère « suffisant et approprié » de l’épreuve dépend de l’indication donnée, telle qu’elle est comprise par une personne ordinaire. L’épreuve doit en outre :

  • traduire le risque ou le préjudice que le produit vise à empêcher ou à atténuer;
  • être effectuée dans des circonstances contrôlées ou dans des conditions qui excluent des variables externes ou qui tiennent compte de ces variables d’une façon mesurable;
  • être effectuée sur plusieurs échantillons indépendants dans la mesure du possible (les essais destructifs pouvant constituer une exception);
  • donner lieu à des résultats qui, sans avoir à satisfaire un critère de certitude, doivent être raisonnables, compte tenu de la nature du préjudice en cause, et établir que c’est le produit lui-même qui provoque de manière importante l’effet voulu;
  • être effectuée indépendamment de la taille de l’organisation du vendeur ou du volume de ventes prévu.

(…) Il faut souligner qu’avant la modification législative envisagée, la portée de la Loi sur la concurrence en matière de publicité fausse ou trompeuse permettait déjà son application en matière de publicité écologique. En effet, les dispositions actuelles avaient déjà pour effet d’interdire les indications fausses ou trompeuses sur un aspect important. Au cours des dernières années, plusieurs plaintes d’écoblanchiment ont d’ailleurs été déposées sur ce fondement au Bureau et ce dernier a effectivement ouvert plusieurs enquêtes.

(…) Dans toutes ces affaires, il faut préciser que le lourd fardeau de démontrer le caractère faux ou trompeur de la déclaration écologique de l’entreprise reposait sur les épaules du Bureau. La modification à la Loi envisagée changerait la donne en ce qu’elle aurait pour effet d’opérer un transfert du fardeau de la preuve sur les épaules de l’entreprise, c’est-à-dire qu’il lui incomberait désormais de faire la preuve des avantages de son produit dans une perspective de protection de l’environnement ou d’atténuation des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques.

(…) Que la modification législative dont nous avons fait état dans la présente entre éventuellement en vigueur ou non, il est crucial pour les entreprises d’adopter et de communiquer une image de son impact environnemental qui reflète la réalité et qui s’appuie sur des données et des faits crédibles.

Au-delà de la conformité légale de ses déclarations, le fait de négliger de faire ce qui précède est susceptible de nuire sérieusement à la réputation de l’entreprise mais également à ses relations avec ses parties prenantes.

Avant de communiquer une image « verte », une introspection est donc nécessaire.

 

Merci au cabinet Lavery de cette information !

 

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Greenwashing climatique au Québec et au Canada : état des lieux et recommandations

L’écoblanchiment ou greenwashing est l’une des menaces la plus sérieuses à la responsabilité sociale et à la confiance que les parties accordent aux initiatives en ce domaine. L’écoblanchiment donne lieu à une certaine actualité en raison de recours devant les tribunaux ou les autorités en ce moment.

Le Centre québécois du droit de l’environnement a publié à l’automne 2022 une synthèse sur ce phénomène en matière climatique, synthèses assortie de recommandations.

 

Extrait :

Sur la base de ces quatre principes, le CQDE formule trois recommandations pour l’élaboration de politiques encadrant les déclarations climatiques des entreprises.

Recommandation 1
Les décideurs chargés de l’élaboration de politiques devraient publier ou entériner une norme de divulgation pour les déclarations climatiques émises par les entreprises au public. Ce cadre devrait inclure des règles de comptabilité carbone, de compensation et de déclaration. Il ne devrait pas être exclusif au
secteur financier et devrait couvrir autant les déclarations climatiques liées aux activités que celles liées aux produits et services.

Recommandation 2
Les décideurs devraient faire de l’écoblanchiment climatique une haute priorité pour les autorités chargées de la protection du consommateur, lesquelles devraient mettre en place des équipes d’enquête qui surveillent activement le marché, et devraient publier des lignes directrices dédiées aux déclarations climatiques.

 

Recommandation 3
Les décideurs politiques devraient adopter une approche cohérente et complète qui tient compte des diverses initiatives privées et des réformes législatives à venir relatives à la comptabilité carbone, aux cibles de réduction et aux déclarations obligatoires aux autorités publiques. Toute initiative politique additionnelle devrait englober à la fois les règles de protection du consommateur et de divulgation financière, et devrait s’assurer que les entreprises sont assujetties à des normes de divulgation et de déclaration cohérentes d’un régime à l’autre.

 

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Procuration, droit de vote et gouvernance : une note explicative

Merci à Julie Bernard, professeure à l’Ivey Business School pour cette belle synthèse de septembre 2023 intitulée « L’intégration des considérations ESG par le biais du vote par procuration : une stratégie d’engagement actionnarial à surveiller ».

 

Résumé :

Ce texte, présenté en collaboration avec le Centre universitaire d’expertise en gouvernance de sociétés, vise à vulgariser le vote par procuration en tant que stratégie d’engagement actionnarial. Dans le cadre de cet exercice, il concerne principalement l’intégration de facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance, dits ESG. Le vote par procuration ne se limitant pas à l’intégration de facteurs ESG, plusieurs éléments de base explorés dans ce texte peuvent se transposer dans d’autres façons d’utiliser le vote.

 

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Ombudsman canadien de la responsabilité sociale : un projet de loi qui n’avance pas

Bonjour à tout le monde, le colloque du 26 avril entourant la problématique de la responsabilité des entreprises étant derrière moi, je souhaite rappeler l’existence d’un projet de loi renforçant les pouvoirs d’enquête de l’Ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises : le projet de loi C-263 Loi établissant le Bureau du commissaire à la conduite responsable des entreprises à l’étranger et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

Alors que l’absence de pouvoir d’enquête de l’Ombudsman est fortement critiqué, ce projet de loi comble ce vide.

Déposé le 29 mars 2022, ce projet est toujours bloqué en première lecture à la Chambre des communes du Canada.

 

Extrait :

 

Enquête

12 (1) Dans l’exécution de la mission énoncée à l’arti­cle 7, le commissaire peut mener une enquête :

  • a) soit sur réception d’une plainte présentée en vertu du paragraphe 10(1);

  • b) soit de sa propre initiative.

Restriction

(2) Le commissaire ne peut mener une enquête que s’il estime qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’une entité se livre ou s’est livrée à l’étranger à des activités commerciales qui contreviennent au droit international en matière de droits de la personne.

Pouvoirs d’enquête

(3) Il peut, dans le cadre de son enquête, de la même manière et dans la même mesure qu’une cour supérieure d’archives, assigner devant lui des témoins et leur enjoindre de déposer oralement ou par écrit, sous la foi du serment, ou de produire les documents et autres pièces qu’il croit utiles à son enquête. Il peut en outre faire prêter serment et recueillir tout renseignement, qu’il soit ou non admissible en preuve devant un tribunal.

Inadmissibilité de la preuve dans d’autres procédures

(4) Les dépositions faites au cours d’une enquête ou le fait de l’existence de l’enquête ne sont pas admissibles contre le déposant devant les tribunaux ni dans aucune autre procédure, sauf le cas où il est poursuivi pour infraction à l’article 131 du Code criminel (parjure) relativement à ces dépositions.

Avis d’enquête

(5) Avant de procéder à l’enquête, le commissaire informe l’entité concernée de son intention d’enquêter.

Droit de présenter des observations

(6) Le commissaire donne à l’entité la possibilité raisonnable de lui présenter ses observations.

Suspension de l’enquête

(7) Le commissaire suspend sans délai son enquête dans l’un ou l’autre des cas suivants :

  • a) s’il découvre qu’une accusation a été portée en vertu d’une loi fédérale ou provinciale à l’égard de l’objet de l’enquête;

  • b) si le procureur général du Canada ou le procureur général d’une province atteste que l’enquête du commissaire pourrait nuire à une enquête menée par un agent de la paix.

Poursuite de l’enquête

(8) Le commissaire ne peut poursuivre une enquête au titre du présent article avant qu’une décision finale n’ait été prise relativement à toute autre enquête ou à toute accusation portant sur le même objet.

Rapport

13 (1) Au terme de son enquête, le commissaire prépare un rapport d’enquête dans lequel il motive ses conclusions.

 

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devoir de vigilance Gouvernance judiciarisation de la RSE loi et réglementation normes de droit responsabilisation à l'échelle internationale Responsabilité sociale des entreprises

Loi sur le travail forcé : une future réforme de la vigilance au Canada ?

Merci au RRSE de l’information :

 

Les dernières nouvelles sur la campagne « Adoptons une loi sur la diligence raisonnable » du CNCA-RCRCE : ici

Le Budget 2024 du gouvernement fédéral confirme de nouveau son engagement à présenter une législation visant à éliminer le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement canadiennes. Cette mesure, prévue pour 2024, vise également à renforcer l’interdiction d’importer des biens produits avec du travail forcé.

Le RCRCE appelle à un projet de loi robuste qui impose aux entreprises une diligence raisonnable pour prévenir les violations des droits humains, permette aux victimes à l’étranger d’accéder à la justice canadienne, et couvre tous les droits humains pour une approche plus holistique.

Prochaines étapes ?
Le gouvernement a mandaté le ministre du Travail de présenter le projet de loi. Le ministre du Travail pourrait proposer une loi solide en s’inspirant de la loi type du RCRCE, c’est-à-dire la Loi concernant le respect des droits humains et de l’environnement par les entreprises à l’étranger, ou en adoptant le projet de loi C-262.

 

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Responsabilité des administrateurs et infractions environnementales

Le 7 juillet 2023, la Cour provinciale de la Colombie-Britannique (la « Cour ») a déterminé que le président et chef de la direction d’une société minière était coupable de plusieurs infractions environnementales découlant du rejet de déchets produits par les activités minières de la société à Banks Island, en Colombie-Britannique. Cette décision (R. v. Mossman and Meckert) peut servir à la fois de rappel et de leçon aux administrateurs, dirigeants et employés, étant tous susceptibles d’engager personnellement leur responsabilité à l’égard de la conformité de leur société aux lois environnementales.

En matière d’infractions environnementales, comme un déversement ou un non-respect des normes réglementaires applicables, la culpabilité est habituellement attribuée à la société concernée. Les administrateurs ou les dirigeants d’une société sont rarement tenus principalement responsables d’une violation des lois environnementales parce que les dommages à l’environnement résultent généralement de problèmes systémiques associés à la façon dont la société exerce ses activités, plutôt que de la conduite d’une personne en particulier. Les organismes de réglementation portent rarement des accusations contre les employés qui ne font qu’exécuter les tâches reliées à leur emploi. Cependant, dans certaines circonstances, des administrateurs, des dirigeants et des employés peuvent être tenus personnellement responsables d’infractions environnementales.

Enseignements :

  • Bien que, le plus souvent, c’est la société qui sera tenue principalement responsable des infractions environnementales, les administrateurs et les dirigeants peuvent également engager leur responsabilité à l’égard des manquements de la société à ses obligations environnementales. En général, la question fondamentale permettant d’établir la responsabilité d’un administrateur ou d’un dirigeant consiste à déterminer si celui-ci assurait la direction et le contrôle de l’entreprise ou de la conduite ayant donné lieu à l’infraction. Au Canada, certaines lois environnementales imposent aux administrateurs et aux dirigeants l’obligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer la conformité à la réglementation applicable ou pour prévenir la commission d’une infraction.
  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de la haute direction ont la responsabilité de s’assurer que des systèmes adéquats sont en place pour gérer et contrôler la conformité d’une société à ses obligations environnementales. Ces systèmes doivent être conçus pour éviter que des problèmes prévisibles surviennent. Dans l’affaire Mossman, la Cour a déterminé que le fait que le laboratoire refuse de transmettre les résultats des analyses parce que BIG n’avait pas réglé les factures que celui-ci lui avait soumises constituait un événement prévisible que M. Mossman aurait dû prévoir et prévenir.
  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de l’équipe de haute direction doivent s’assurer que la société dispose de politiques, de pratiques et de procédures robustes en matière environnementale assurant que les incidents environnementaux sont signalés et traités efficacement. Selon le secteur, il pourra notamment s’agir de désigner clairement un délégué responsable de la conformité aux obligations environnementales.
  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de l’équipe de haute direction doivent agir lorsque des cas de non-conformité leur sont signalés et veiller à ce que leurs instructions soient suivies. Les personnes à la tête d’une société qui ignorent les signalements ou les conseils de leurs gestionnaires des questions environnementales pourraient engager leur responsabilité en cas de non-conformité.
  • Les administrateurs, les dirigeants et les membres de l’équipe de haute direction doivent également agir lorsqu’ils apprennent que des mesures de gestion et de contrôle ont échoué. Dans l’affaire Mossman, la Cour a noté que M. Mossman aurait dû ordonner à BIG de cesser ses activités jusqu’à ce que les mesures de contrôle adéquates aient été rétablies.

Merci au cabinet Blakes de cette information !

À la prochaine…