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Les entreprises canadiennes et la vigilance européenne

Le 24 avril, la directive sur le devoir de diligence CSDDD (Corporate Sustainability Due Diligence Directive) a été adoptée par le Parlement européen. Ce texte voté par les représentants des 27 États membres de l’Union européenne représente une étape majeure pour mieux encadrer les pratiques des grandes entreprises et reconnaître le  « devoir de vigilance » des entreprises. La directive continue d’avancer dans le processus législatif…

 

  • Pour mieux comprendre la directive, et réfléchir à son impact sur l’économie canadienne, nous vous invitons à lire cette synthèse du RRSE : ici

 

À la prochaine…

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Loi sur la vigilance et contentieux climatique : une étude

Voilà une belle étude de Mikko RajavuoriAnnalisa Savaresi et Harro van Asselt parue dans la revue Regulation & Governance, 2023, vol. 17, no 4, p. 944-953 : « Mandatory due diligence laws and climate change litigation: Bridging the corporate climate accountability gap? ».

Résumé :

The debate on corporate climate accountability has become increasingly prominent in recent years. Several countries, particularly in the Global North, have adopted mandatory human rights and/or environmental due diligence legislation. At the same time, judicial and quasi-judicial proceedings are helping to shape the contours of corporate climate accountability. This article considers how litigation against corporations and due diligence legislation interact, and thereby help develop and strengthen corporate climate accountability. While the practice in this area is still limited, there is scope to reflect on early developments and how they may influence both future climate litigation as well as ongoing and future law-making on due diligence. We first review recent developments in climate litigation against corporations, focusing on the extent to which they rely on climate due diligence obligations. We then survey existing and proposed due diligence legislation, examining the extent to which it addresses corporate climate accountability. Finally, we identify scenarios of how due diligence legislation and climate litigation may interact and possibly converge to strengthen corporate climate accountability. We furthermore identify knowledge gaps and areas for further research.

 

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Se verra-t-on à Ottawa pour l’ACFAS ?

Bel événement organisé par mes collègues de l’Université Sherbrooke que je remercie beaucoup !

 

 

Extrait :

 

Dans un contexte de mondialisation des activités économiques, les entreprises multinationales exercent une influence prépondérante, notamment par l’entremise de la chaîne d’approvisionnement. Les choix qu’elles font peuvent donner lieu à des conséquences importantes en matière de droits humains et de protection de l’environnement. Ainsi, le devoir de vigilance émerge comme un principe crucial visant à encadrer les activités des entreprises multinationales. Le colloque proposé s’articule autour de deux axes principaux.

D’une part, il interroge le devoir de vigilance selon une perspective internationale et comparative. Où en sont rendus les travaux du Groupe de travail de l’Organisation des Nations Unies sur l’éventuelle adoption d’un traité en la matière ? Comment les normes et principes internationaux influencent-ils la définition et la mise en œuvre du devoir de vigilance des entreprises multinationales ? Comment certains pays, comme la France, l’Allemagne, l’Indonésie, la Norvège ou le Mexique ont-ils décidé de forcer les entreprises à être vigilantes tout au long de la chaîne d’approvisionnement ?

D’autre part, il explore la perspective canadienne du devoir de vigilance. Quelle politique le Canada privilégie-t-il pour encadrer les entreprises multinationales qui font affaires dans d’autres pays ? Quelle incidence la nouvelle loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d’approvisionnement aura-t-elle ? Quel rôle jouent les réglementations et les initiatives législatives nationales dans la promotion du devoir de vigilance et de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) à l’échelle nationale ? Où en sont les entreprises minières canadiennes quant au devoir de vigilance ? Ce colloque permettra d’analyser les interactions et les distinctions entre ce qui se passe d’une part à l’échelle internationale et dans d’autres pays, et, d’autre part au Canada en matière de devoir de vigilance des entreprises multinationales.

 

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Loi sur le travail forcé : une future réforme de la vigilance au Canada ?

Merci au RRSE de l’information :

 

Les dernières nouvelles sur la campagne « Adoptons une loi sur la diligence raisonnable » du CNCA-RCRCE : ici

Le Budget 2024 du gouvernement fédéral confirme de nouveau son engagement à présenter une législation visant à éliminer le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement canadiennes. Cette mesure, prévue pour 2024, vise également à renforcer l’interdiction d’importer des biens produits avec du travail forcé.

Le RCRCE appelle à un projet de loi robuste qui impose aux entreprises une diligence raisonnable pour prévenir les violations des droits humains, permette aux victimes à l’étranger d’accéder à la justice canadienne, et couvre tous les droits humains pour une approche plus holistique.

Prochaines étapes ?
Le gouvernement a mandaté le ministre du Travail de présenter le projet de loi. Le ministre du Travail pourrait proposer une loi solide en s’inspirant de la loi type du RCRCE, c’est-à-dire la Loi concernant le respect des droits humains et de l’environnement par les entreprises à l’étranger, ou en adoptant le projet de loi C-262.

 

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Devoir de vigilance des entreprises: les députés adoptent des règles en matière de droits humains et d’environnement

Ça y est : la directive européenne sur la vigilance est adoptée !

Le contenu ressemble à l’opinion que je vous ai partagée sur le blogue…

Petit extrait tiré du communiqué de presse européen :

Une approche fondée sur les risques, un plan de transition

Les règles s’appliqueront aux entreprises et aux sociétés mères européennes employant plus de 1 000 personnes et réalisant un chiffre d’affaires mondial supérieur à 450 millions d’euros, ainsi qu’aux franchises dans l’UE réalisant un chiffre d’affaires mondial supérieur à 80 millions d’euros si au moins 22,5 millions d’euros ont été générés par des redevances. Elles s’appliqueront également aux entreprises non européennes, aux sociétés mères et aux franchises de pays tiers qui atteignent les mêmes seuils de chiffre d’affaires dans l’UE. Ces entreprises devront intégrer le devoir de vigilance dans leurs politiques, réaliser les investissements nécessaires, obtenir des garanties contractuelles de la part de leurs partenaires, améliorer leur plan de gestion ou apporter leur soutien aux petites et moyennes entreprises partenaires afin de s’assurer qu’elles se conforment aux nouvelles obligations. Les entreprises devront également adopter un plan de transition pour rendre leur modèle économique compatible avec la limite de 1,5 °C de réchauffement climatique fixée par l’Accord de Paris.

Amendes et indemnisation des victimes

Les États membres devront fournir aux entreprises des informations détaillées en ligne sur leurs obligations en matière de devoir de vigilance via des portails pratiques contenant les orientations de la Commission. Ils devront également créer ou désigner une autorité de surveillance chargée d’enquêter et d’imposer des sanctions aux entreprises qui ne respectent pas leurs obligations. Il s’agira notamment de dénoncer ces entreprises et de leur infliger des amendes pouvant aller jusqu’à 5 % de leur chiffre d’affaires net mondial. La Commission mettra en place un réseau européen des autorités de surveillance pour soutenir la coopération et permettre l’échange de bonnes pratiques. Les entreprises seront responsables des dommages causés par le non-respect de leurs obligations en matière de devoir de vigilance et devront indemniser intégralement leurs victimes.

La directive doit à présent être officiellement approuvée par le Conseil et signée avant d’être publiée au journal officiel de l’UE. Elle entrera en vigueur 20 jours plus tard. Les États membres auront deux ans pour la transposer dans leur législation nationale.

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OPINION : Directive sur la vigilance des entreprises, une durabilité à petits pas

Après de nombreux mois de négociations et une volte-face de dernière minute, la directive européenne sur le devoir de vigilance devrait être adoptée sous peu. Les États membres du Conseil européen ont en effet trouvé un accord le 15 mars 2024. Quelques jours plus tard, c’est la Commission des affaires juridiques du Parlement européen qui a approuvé l’accord sur le projet. Si la version préliminaire de la directive affichait de fortes ambitions, le texte témoigne de reculs, fruits de concessions. Néanmoins, cette directive demeure un texte historique qui détaille les obligations de vigilance des entreprises au regard des droits humains, de l’environnement et du climat et qui met en place des mécanismes de contrôles et d’accès à la justice, le tout à l’échelle européenne (!).

Le projet de directive a vu son champ d’application se réduire. En effet, elle ne concerne désormais que les entreprises de plus de 1 000 salariés réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 450 millions €. Les entités hors UE, dont les entreprises canadiennes, devront réaliser un chiffre d’affaires de plus de 450 millions € en Europe pour être concernées. Au départ, le texte s’appliquait aux entreprises rassemblant plus de 500 salariés et réalisant un chiffre d’affaires mondial supérieur ou égal à 150 millions € (ou, pour les entreprises non européennes de 300 millions € générés dans l’UE). Bien que les seuils ont donc été revus à la hausse, ils sont en réalité évolutifs, ces chiffres passant de 4 000 salariés et 900 millions € de chiffre d’affaires dans quatre ans, les autres entreprises étant visées dans cinq ans. Mais, l’application de la directive aux entreprises de certains secteurs considérés comme « à risque » (textile, agriculture, industrie minière…) a été malheureusement abandonnée. En bout de ligne, seulement 0,05 % des entreprises européennes (5 000 entreprises) vont être concernées par la directive, soit une diminution de 70 % des entreprises visées par rapport au texte validé en décembre 2023, du moins sur les trois premières années.

Les entreprises vont être tenues d’identifier, de prévenir et de supprimer les atteintes aux droits humains et à l’environnement issues de leur activité et de celle de leurs partenaires directs au sein de leur chaîne d’approvisionnement. Dans les grandes lignes, les entreprises vont ainsi devoir :

  • Identifier, évaluer et hiérarchiser les risques en matière de droits humains, de droits des travailleurs, et de l’environnement liés à leurs activités et à leurs partenaires directs;
  • Mettre en place des mesures préventives pour prévenir les violations des droits humains et des droits environnementaux;
  • Instaurer des mécanismes de suivi et d’évaluation pour vérifier l’efficacité de leurs mesures préventives et pour identifier les éventuels impacts négatifs sur les droits humains et l’environnement;
  • Inclure dans leur rapport annuel des informations détaillées sur les mesures prises pour identifier, prévenir et atténuer les risques identifiés, issues de leur activité et de celle de leurs partenaires directs ainsi que leur résultat.

Point intéressant, les entreprises devront intégrer le devoir de vigilance dans leurs politiques et systèmes de gestion des risques, ainsi qu’adopter et mettre en œuvre un plan de transition rendant leur modèle d’entreprise compatible avec l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C prévu par l’Accord de Paris. En dépit de ces avancées, il faut tout de même regretter que des pans entiers des opérations en aval de la chaîne de valeur de l’obligation de vigilance, telles que les opérations de démantèlement et recyclage, de même que l’abandon des incitants aux plans de transition climatique ont été exclus. Dans le même sens, le lien entre plan de transition climatique et rémunération variable des dirigeants a été supprimé.

La directive n’a pas abandonné les sanctions puisqu’en cas de non-respect des obligations de diligence nécessaires, des amendes sont prévues qui ne peuvent pas dépasser 5 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise. Attention toutefois, l’engagement de la responsabilité des entreprises et ses modalités seront décidés par les États lors de leur transposition.

Quand on compare le projet et le résultat, l’Union européenne démontre que les États résistent parfois et que les entreprises n’accueillent pas facilement ce genre d’initiatives, malgré leurs volontés affichées. Bien que le Canada a été critiqué au moment de l’adoption de sa Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaines d’approvisionnement, on se rend compte qu’elle le mérite d’exister. Avec la directive européenne, il n’en demeure pas moins que les droits humains et les enjeux sociétaux et climatiques s’intègrent dans la gouvernance des entreprises européennes… un message que le gouvernement du Canada devrait entendre pour travailler à un renforcement de la loi adoptée en 2023 (adoption d’un plan, ouverture au climat…) et que les entreprises devraient recevoir pour améliorer leurs pratiques et soutenir les initiatives législatives. C’est à ce prix que le Canada demeurera compétitif par rapport à ses concurrentes outre-Atlantique.