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Quel rôle joue la finance dans la lutte aux changements climatiques?

« La responsabilité sociale, l’acceptation de sacrifier son confort pendant un certain temps au bénéfice de tous, et ultimement la compréhension que la société est vulnérable et que l’on peut changer le cours des choses s’appliquent aussi à la lutte contre les changements climatiques. » -Joeri Rogelj, Collège impérial de Londres

Dans la même suite d’idées que mon précédent billet, je vous propose un sujet que vous pourrez par la suite approfondir à l’aide d’un balado. Dans le cadre de ce billet, je vous propose un seul sujet—le rôle que la finance peut et pourrait jouer dans la lutte aux changements climatiques— et deux différents balados, dont un québécois et un américain, pour l’approfondir. Les liens vers les balados sont dispo à la fin de ce texte.

Alors que plusieurs demandent l’intervention du gouvernement afin de mettre en place des mesures plus sévères en ce qui concerne les changements climatiques, plusieurs oublient le rôle important que peuvent jouer non seulement les entreprises et les investisseurs institutionnels, mais aussi leurs actionnaires. Les mesures du gouvernement peuvent toucher deux actions principales : 1) une réglementation qui encadre directement les pratiques des entreprises pollueuses; 2) une règlementation qui encourage la bonne gouvernance des entreprises et la surveillance des entreprises par les investisseurs. Malgré de multiples manifestations en désaccord de la part de citoyens, le Canada a récemment investi dans l’oléoduc TransMountain par le biais d’achats d’actifs de Kinder Morgan Canada. Il serait intéressant de voir comment ce même gouvernement pourrait imposer des restrictions environnementales sévères—afin d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris— à ces entreprises pollueuses.  

Le gouvernement canadien a cependant apporté quelques modifications à ses lois et à ses réglementations afin de permettre de soutenir le rôle des investisseurs institutionnels qui désire intégrer des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance dans leurs prises de décision d’investissement et dans leurs engagements actionnariaux. On peut penser à une des récentes modifications de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) qui a modifié le changent le calendrier à l’intérieur duquel un actionnaire peut présenter des propositions et a introduit le principe « se conformer ou s’expliquer »[1]. De plus, la LCSA a récemment remis en question la primauté de l’actionnaire— voir les arrêts Magasins à rayons Peoples inc. (Syndic de) c Wise (2004) (Wise) et BCE Inc. c Détenteurs de débentures de 1976 (2009) (BCE)—afin d’y inclure les parties prenantes. En effet, cette récente ramification prévoit que les administrateurs peuvent tenir compte, entre autres, des intérêts des actionnaires, des employés, des créanciers, des consommateurs, des gouvernements et de l’environnement[2]. Un pas de plus afin d’outiller les investisseurs dans la lutte aux changements climatiques. 

Les investisseurs institutionnels jouent un rôle essentiel et peuvent avoir un impact significatif dans la lutte aux changements climatiques. Les investisseurs institutionnels sont maintenant plus importants en capitaux que plusieurs banques et PIB. Certains évènements comme la crise financière et le durcissement de la réglementation ont entraîné la contraction de nombreuses grandes banques mondiales, tandis que les actifs contrôlés par les sociétés de gestion des investissements se sont accrus. Selon Andrew Haldane[3], l’économiste en chef de la Banque d’Angleterre, en 2012 les 87 000 milliards de dollars des gestionnaires d’investissement étaient à peu près égaux aux trois quarts du total des actifs figurant dans les bilans des banques mondiales[4]. En 2014, le total des investissements de BlackRock, un important gestionnaire d’actifs américain, était supérieur aux actifs de toutes les banques du monde. Le portefeuille sous gestion de BlackRock, qui approche aujourd’hui les 6,84 billions de dollars américains,[5] dépasse largement le PIB de l’Allemagne. Cette comparaison a été faite pour la première fois par des chercheurs en 2010, alors que BlackRock avait moins des trois quarts de sa taille actuelle[6].

Face à cette constatation du poids important des investisseurs institutionnels, il est important de se demander comment ses capitaux sont utilisés pour le bien collectif. Au début du mois de janvier 2020, BlakcRock annonçait qu’il joignait les rangs de Climate Action 100+ afin de concrétiser sa lutte contre les changements climatiques. Bien que certaines ONG[7]et certains médias[8] aient décrié ces annonces comme du greenwashing, le rôle de ces investisseurs institutionnels est clef dans la lutte aux changements climatiques. Avec leurs poids en capitaux, ils ont le pouvoir d’influence de manière significative les comportements d’entreprises pollueuses vers une transition plus durable. Elles peuvent exercer des pressions sur ces entreprises de multiples façons qui rentrent sous l’engagement actionnarial. 

Le rôle que ces investisseurs peuvent jouer dans la lutte aux changements climatiques est exposé dans ces deux balados. Ils ne sont pas parfaits et je ne suis pas nécessairement d’accord avec tous les arguments avancés, mais ils mettent très bien la table sur un enjeu important : le rôle des investisseurs dans l’influence des comportements des entreprises.

Je vous souhaite une bonne écoute! 

Lien vers l’épisode « Can Corporations Stop Climate Change? » du balado The Daily : https://www.nytimes.com/2020/02/24/podcasts/the-daily/climate-change.html

Lien vers l’épisode « La finance peut-elle sauver la planète?  » du balado Question d’intérêt : https://ici.radio-canada.ca/premiere/balados/6942/gerald-fillion-finance-economie-analyse/episodes/453751/finance-durable-environnement-rosalie-vendette


[1] Vous pouvez consulter les autres modifications dans ce rapport de Norton Rose (https://www.nortonrosefulbright.com/fr-ca/centre-du-savoir/publications/bfcf809c/la-iloi-canadienne-sur-les-societes-par-actionsi-a-ete-modifiee)

[2] Vous pouvez consulter les modifications dans ce rapport de Norton Rose : https://www.nortonrosefulbright.com/fr-ca/centre-du-savoir/publications/a979357b/primaute-des-parties-prenantes-changement-de-paradigme-confirme

[3] Fait référence à un document de 2014. Il est aussi important d’apporter certaines précisions concernant le fait que certaines firmes de gestion d’investissements et de placements sont détenues par des banques et que les banques sont aussi fréquemment impliquées dans des activités de gestion d’investissements et de placements.

[4] Extrait tiré de Arjaliès, D.-L., Grant, P., Hardie, I., MacKenzie, D., & Svetlova, E. (2017). Investment Management and the Investment Chain. In Chains of Finance: How Investment Management is Shaped: Oxford Scholarship.

[5] En date du 30 juin 2019, selon le site web de BlackRock (https://www.blackrock.com/sg/en/introduction-to-blackrock)

[6] Extrait tiré de Arjaliès, D.-L., Grant, P., Hardie, I., MacKenzie, D., & Svetlova, E. (2017). Investment Management and the Investment Chain. In Chains of Finance: How Investment Management is Shaped: Oxford Scholarship.

[7] Voir ici une critique de Energy Post(https://energypost.eu/7tn-investor-blackrock-announces-coal-divestment-but-not-across-all-funds/) et de EcoWatch (https://www.ecowatch.com/blackrock-amazon-deforestation-climate-2645370467.html)

[8] Voir ici une critique du The Gardian (https://www.theguardian.com/commentisfree/2020/jan/16/blackrock-coal-divestment-regulation-fund-manager),  du Financial Times (https://www.ft.com/content/16125442-32b4-11ea-a329-0bcf87a328f2) et de CNBC (https://www.cnbc.com/2019/10/13/blackrock-vanguard-found-religion-on-climate-doubts-are-growing.html )

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Gouvernance : quelles priorités pour les investisseurs en 2017 ?

Sous la plume de Mme Laurence Boisseau, Les Échos.fr publie un intéressant article signalant les priorités des investisseurs gérants d’actifs pour 2017 : « Gouvernance : les priorités des investisseurs ».

Quelles sont ces priorités ?

  1. Les critères ESG
  2. La rémunération des patrons
  3. La composition des conseils d’administration

Sur la première priorité, relevons ce passage :

Les investisseurs intègrent dans leurs décisions de placement des critères extra-financiers en plus des performances économiques. 76 % des gérants d’actifs interrogés par le cabinet de conseil en gouvernement d’entreprise Morrow Sodali, dans son sondage annuel, considèrent que les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) sont très importants avant d’investir. Une préoccupation qui n’anime plus seulement ceux qui investissent en actions, mais aussi ceux qui achètent de la dette (à hauteur de 57 %), autrefois centrés sur le paiement des intérêts et le remboursement du principal. Parmi les critères ESG, les gérants sont très vigilants sur la gestion du risque climatique (50 %), les rémunérations à la performance (35 %), la cybersécurité (30 %), la diversité et le renouvellement des conseils.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Quel signal pour le dividende ?

Beau billet de blogue proposé par MM. Thénière et Moral sous le titre : « Titres boursiers: trop d’emphase sur le dividende » (Les affaires.com, 28 février 2016). Si le dividende est souvent vu comme l’objectif ultime de toute entreprise – et que son versement est vu comme un signal positif par les investisseurs -, les auteurs questionnent sérieusement cette logique.

Les auteurs soulignent les 7 mythes concernant les titres à dividendes :

  • Les actions versant des dividendes résistent bien dans un marché difficile.
  • Elles performent mieux que le marché en général.
  • Elles procurent une diversification adéquate.
  • Elles constituent une source fiable de revenu.
  • Elles sont avantageuses sur le plan fiscal.
  • Elles s’avèrent une façon prudente d’investir dans les titres considérés «valeur».
  • Elles remplacent les obligations.

Toutefois, c’est un autre aspect de l’article qui m’intéresse : celui du signal parfois tronqué qu’envoi le versement d’un dividende.

Extrait :

Un titre versant des dividendes depuis longtemps ne vous indique que deux choses : la société a été rentable dans le passé et elle existe depuis un certain temps. Cependant, vous ne disposez pas d’information concernant l’évaluation du titre, ni par rapport à l’évolution de la santé financière de la société. Comme vous avez pu le constater avec l’exemple de Wells Fargo, le dividende sera plus souvent qu’autrement coupé lorsque la direction n’a plus le choix. En d’autres termes, il sera trop tard pour l’actionnaire qui comptait surtout sur le revenu.

En conclusion, un investisseur recherchant les dividendes ne devraient pas négliger les sociétés comme Berkshire Hathaway pour son portefeuille. Trop d’importance est accordée à cette fameuse distribution en argent!

À la prochaine…

Ivan Tchotourian