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Nouveau billet sur Contact : la fonderie Horne en question

Bonjour à toutes et à tous, je viens de publier mon dernier billet de Contact intitulé : « Fonderie Horne et arsenic : une insoutenable légèreté » (partie 1 et partie 2). J’y aborde la question de la RSE.

Extrait :

L’actualité en matière de responsabilité sociale (RSE) vient de s’enrichir d’une nouvelle diffusée récemment par Radio-Canada : le niveau de pollution par contaminants d’une entreprise de Rouyn-Noranda et toléré par le ministre de l’Environnement. « Québec permet à la Fonderie Horne d’émettre 67 fois plus d’arsenic dans l’air que la norme provinciale » (Radio-Canada, 13 mai 2019), voilà une information qui n’est passée inaperçue ! Amené à me prononcer dans le cadre de l’émission de télévision RDI Économie animée par M. Gérald Fillion (ici), je partage avec vous quelques réflexions sur cette actualité (en plus de faire le point avec du recul), réflexions qui sont celles d’un professeur de droit travaillant dans le domaine de la RSE… et, surtout, celle d’un citoyen et d’un père qui se veut critique sur une situation qui lui apparaît insoutenable.

Plusieurs solutions sont envisageables pour répondre au niveau de pollution occasionné par les activités de la fonderie Horne. Le coût social de la pollution (qui, à terme, va reposer sur la province et ses contribuables) et les inquiétudes multiples de la situation appellent une réponse et un signal fort envoyé à la communauté et aux entreprises. J’ai entendu que fermer l’usine serait une option. Elle ne me semble pas crédible. Elle vient opposer frontalement la logique environnementale à la logique économique, alors qu’il convient de les faire travailler ensemble. La fermeture aurait des conséquences dévastatrices sur le plan économique, il ne faut pas s’en cacher. De même, des mesures punitives ne me semblent guère crédibles, le ministère étant le principal responsable du niveau de pollution atteint (et non l’entreprise qui ne fait qu’utiliser une tolérance – en étant d’ailleurs en-dessous du seuil maximum –). Comme évoqué par certains dans les journaux, la mise en place d’une zone tampon serait une avenue (et le respect de mesures sanitaires de base), même si cette option est contraignante pour les citoyens concernés, demeure à court terme et ne règle pas le problème de fond : le niveau de rejet des contaminants dans l’air. Aussi, il apparaît impératif de rehausser la norme demandée à l’entrepise Horne, tout en mettant en place des incitatifs pour la soutenir dans la recherche d’une solution environnementale.

Ne pas oublier la responsabilité de l’État

Que penser d’un éventuel recours judiciaire exercé non contre l’entreprise (qui reste dans la tolérance octroyée et ne franchit pas la ligne de l’illégalité) mais contre l’État ? Si la fonderie Horne suit bien le protocole (qui serait même en avance sur l’échéancier fixé avec le ministère de l’Environnement) suivant ce qu’avance le ministre Benoît Charette, la question est entière de savoir si les chiffres négociées et visés dans le protocle étaient adéquats. Que penser de la décision prise en 2011 par le ministère de l’Environnement ? Ne caractérise-t-elle pas une faute, une irrationnalité, une déraisonnabilité ou une insouciance grave commise par l’État ? Ces mots ne sont pas pris au hasard, ils ont des conséquences juridiques.

Contrairement à une croyance répandue, l’État québécois ne bénéficie pas d’une irresponsabilité. La maxime « the King can do no wrong » a vécu. La Cour suprême a clairement rappelé cette idée en 2011 : « Il importe que les organismes publics soient responsables en général de leur négligence compte tenu du grand rôle qu’ils jouent dans tous les aspects de la vie en société. Soustraire les gouvernements à toute responsabilité pour leurs actes entraînerait des conséquences inacceptables ». L’État québécois a tout d’abord une responsabilité extracontractuelle directe. Avec l’adoption en 1994 du Code civil du Québec (et l’article 1376), a été ajouté une nouvelle dimension à l’assujettissement de l’État au droit commun de la responsabilité civile. Le droit québécois assimile purement et simplement le gouvernement à une personne physique majeure et capable pour tout recours dirigé contre lui. Mais, l’État québécois peut également répondre de la faute de son préposé en vertu des articles 1463 et s. du Code civil du Québec. Avec cet article, le législateur cherche à écarter la possibilité pour l’État de se défendre en arguant que son préposé aurait agi en dehors de l’exercice de ses fonctions et que, pour ce motif, l’État n’aurait pas à répondre de sa faute.

Toutefois, la chose est subtile. En effet, le niveau de responsabilité de l’État québécois dépend de la nature de la décision prise. Il convient de distinguer entre les décisions relevant du « politique » et celles relevant de « l’opérationnel ». La nature de la faute exigée de l’État change. Si l’acte politique échappe la plupart du temps à la sanction des tribunaux et conduit à une immunité (sauf mauvaise foi, irrationalité ou insouciance grave), l’acte de gestion peut donner lieu à une action en responsabilité si l’acte en question a été accompli fautivement (une faute simple) et que cette faute a causé un dommage. Pour savoir à quelle catégorie appartient l’acte, il est « (…) illusoire de vouloir établir un critère absolu qui donnerait rapidement et infailliblement une réponse à l’égard de toute décision parmi la gamme infinie de celles que peuvent prendre les acteurs gouvernementaux ». L’appréciation se fait de manière contextuelle en tenant compte des caractéristiques des pouvoirs que la loi confère, ainsi que des devoirs qu’elle impose à l’officier public chargé de l’appliquer.

Quelle que soit la nature de l’acte en cause (qui m’apparaît toutefois relever davantage de l’opérationnel quoique…), on constate que l’on est proche d’une mise en cause possible de la responsabilité de l’État québécois dans ce dossier. Au regard des conséquences graves de l’arsenic sur la santé et du niveau de contaminants admis (et aussi de la légèreté à aborder ce problème de pollution), même les hypothèses exceptionnelles de faute mettant au rancart l’immunité – dans le cas des décisions politiques – semblent vérifiées. Que l’État se méfie, l’actualité démontre que la société civile dans toute sa diversité de courants, d’organisations et de mouvement d’opinion n’hésite plus à mettre les États et les villes devant les tribunaux en matière de changement climatique. La justice climatique prend corps !

La Loi sur la qualité de l’environnement et son chapitre III sur le droit à la qualité de l’environnement et à la sauvegarde des espèces vivantes méritent également d’être évoqués. Les mots utilisés dans la loi sont forts de sens : « Toute personne a droit à la qualité de l’environnement, à sa protection et à la sauvegarde des espèces vivantes qui y habitent ». Les articles 19.1 et s. permettent l’exercice d’un recours en injonction devant la Cour supérieur pour empêcher l’acte. Cependant, il a été observé que ces articles sont difficiles à invoquer en pratique. De plus, le ministère de l’Environnement a autorisé la fonderie Horne à déroger à la loi.

À la prochaine…

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Rappel : « L’activisme actionnarial sous surveillance » (notre entrevue)

Bonjour, je vous laisse découvrir cet article « L’activisme actionnarial sous surveillance » (Finance et investissement, 1er septembre 2018) dans lequel l’ouvrage publié avec Naomi et commenté et mis en perspective. Une belle photographie des recherches menées à la Faculté de droit de l’Université Laval !

Extrait (en espérant que vous lirez le reste) :

En 2013, la direction de Tim Hortons s’endette massivement afin de racheter des actions en circulation dans la perspective d’en faire monter le prix. En 2012, le Canadien Pacifique (CP) se donne subitement un nouveau chef de la direction, tout en renouvelant son conseil d’administration et surtout, sa stratégie d’affaires.

L’activisme actionnarial de fonds de couverture (hedge funds) américains était à la source de ces initiatives. Estimant que les cours boursiers du CP et de Tim Hortons ne reflétaient pas leur valeur intrinsèque, ces hedge funds avaient mené campagne auprès des actionnaires en vue de forcer la réorientation radicale de la destinée de ces deux entreprises emblématiques.

À l’instar de Tim Hortons, un certain nombre d’entreprises nord-américaines se sont endettées sous la pression de fonds de couverture au point d’ébranler leurs perspectives d’expansion et parfois même de survie. Le cas de Tim Hortons avait d’ailleurs mené Yvan Allaire, chercheur et président exécutif du conseil de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques, à soutenir que «dans beaucoup de cas, les fonds activistes ne créent pas de richesse, mais réussissent plutôt à transférer aux actionnaires la plus-value des travailleurs et des créanciers» (source : Les Affaires, 30 août 2014).

En revanche, bon nombre d’entreprises ont bénéficié de l’activisme actionnarial de fonds de couverture. Ainsi, l’action du CP avait pris son envol en 2014, atteignant plus de 220 $, alors qu’elle stagnait à 49 $ deux ans plus tôt en 2012.

À la prochaine…

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Inflation normative : un article

Bonjour à nos lectrices et lecteurs du blogue, je vous renvoie dans ce billet vers un article publié récemment par la revue Lex-Electronica sous la plume d’Ejan MacKaay consacré à « l’inflation normative » (Lex-Electronica.org, n°23 hors-série 2018).

Voici le résumé :

Le terme « inflation normative » semble viser une généralisation, vers
l’ensemble du droit, de la notion d’inflation législative, définie comme
l’accroissement disproportionné du nombre et de la longueur des lois.
Comme pour l’inflation monétaire, la surabondance des signes risque
d’entraîner leur dévaluation (Carbonnier). S’agit-il d’une maladie bénigne
ou du symptôme d’une pathologie systémique de l’État ? Est-elle est
spécifique à notre époque ou était-elle déjà connue auparavant ? Ses
effets se déclareraient–ils uniformément à travers le droit ou dans
certains secteurs plus que dans d’autres ? Si tant est que l’inflation
normative provoque des effets pernicieux qui doivent retenir l’attention, il
faut en déterminer l’origine ou les causes et s’interroger sur des correctifs
qui ont été essayés ou qui pourraient l’être.

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Vien de paraître : « L’entreprise à mission sociétale : analyse critique et comparative du modèle » (éditions Yvon Blais)

Belle nouvelle aujourd’hui : l’ouvrage L’entreprise à mission sociétale : analyse critique et comparative du modèle vient de paraître aux éditions Yvon Blais !

 

Dans un contexte où les défis sociétaux et environnementaux appellent une réponse criante, l’innovation est devenue le maître-mot tant dans le monde économique que juridique.

Suscitant un intérêt manifeste dans la communauté juridique de nombreux pays, il convient de se questionner sur les apports des entreprises hybrides qui ont vu le jour ces dernières années (Benefit Corporation, Flexible Purpose Corporation, Community Contribution Company, société à finalité sociale, Community Interest Company, société coopérative d’intérêt collectif). Quel est l’impact de ces nouvelles entreprises et de l’intervention du droit sur la logique de la RSE ? Favorisent-elles une innovation du capitalisme et une meilleure prise en compte et protection des parties prenantes ? Ces structures sociétaires viennent-elles renforcer l’émergence d’une gouvernance d’entreprise différente de type « responsable et sociétale » mise en avant par certains spécialistes ?

Telles sont les questions abordées dans cet ouvrage qui discute finalement de la conscience sociale des entreprises.

L’ouvrage est composé de deux parties suivies par des remarques conclusives qui visent à remettre en question la prédominance de la seule « mécanique de l’utilité » où le juridique est soumis à la logique de marché épurant de son domaine de tout ce qui n’est pas traduisible en termes économiques et présumant que toute action est mue par un intérêt égoïste constituant le moyen de réaliser le bien commun. Dans une première partie, il importe de présenter le cadre réglementaire qui caractérise les nouvelles formes de sociétés par actions pour comprendre la philosophie qui les anime, et les différences qui existent. La situation canadienne est également exposée pour dresser un état des lieux des initiatives existantes, des évolutions en cours et des débats qui l’agitent présentement. Dans une seconde partie, un regard critique sera posé sur l’encadrement réglementaire des pays qui ont fait le choix d’introduire une entreprise à mission sociétale pour évaluer la pertinence pour le législateur canadien de légiférer en ce domaine.

 

À la prochaine…

Ivan

 

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Publication sur Contact : « Où va l’entreprise ? »

Bonjour à toutes et à tous, mon nouveau billet de blogue sur Contact est arrivé : « Où s’en va l’entreprise ? » me suis-je posé comme question… Inspiré d’une conférence donnée à l’Université Toulouse Capitole 1 à la mi-novembre, je synthétise dans ce billet plusieurs évolutions récentes déjà abouties ou en marche.

 

Morceaux choisis :

 

Si l’on part de cette idée qu’une entreprise plus juste est nécessaire, comment le droit est-il en train de la construire ? Mais commençons par le commencement et posons-nous la question suivante : le droit s’intéresse-t-il à cette entreprise nouvelle ? Incontestablement oui ! Alors que jusqu’à présent, le droit des affaires consacrait des réformes essentiellement techniques (apportant des précisions sur certains aspects de leur constitution, leur fonctionnement ou leur financement), les choses changent. Leur ADN et la perception fondamentale de leur fonction primaire sont placés sous le microscope du législateur qu’il soit nord-américain ou européen. Quelles sont les caractéristiques de cette nouvelle entreprise ? Selon moi, elle est organisée autour de 4 points :

  • De nouveaux objectifs.
  • De nouvelles structures.
  • De nouvelles normes de gouvernance.
  • De nouvelles façons de rendre compte.

Bien que ces innovations ne soient pas implantées au même rythme suivant les pays, elles sont néanmoins présentes dans les discours juridiques.

Au final, le Canada peut mieux faire. Trouver la formule d’une entreprise nouvelle est sans doute complexe et ses composants difficiles à identifier, il n’en demeure pas moins qu’il faut que les juristes de droit de l’entreprise se mobilisent. L’entreprise est peut-être une chose économique, mais elle n’est plus l’inconnue du droit qu’elle a longtemps été. Son impact sur l’économie, la finance, la politique, la démocratie, la fiscalité des pays est tel qu’il ne peut en aller autrement. Le futur est devant, reste à l’écrire…

Sinon, attention qu’une autre nouvelle entreprise ne s’impose pas : une entreprise court-termiste, dominée par une logique financière, axée sur la valeur boursière, soumise un activisme d’un genre nouveau et ignorant ses parties prenantes (voire même prédatrice de ces parties prenantes).

 

À la prochaine…

Ivan

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Me lirez-vous ? Réflexion sur la traduction de « corporate »

Corpus UL vient de mettre en ligne le texte que j’avais écrit sur la traduction linguistique et métaphorique de « corporate » de l’expression corporate governance. L’article est intitulé : « L’art de la juste équivalence en droit : discussion autour du mot « corporate » de l’expression corporate governance« .

Cet article avait été publié il y a quelques temps dans la revue suivante : Revue de recherche juridique – Droit prospectif, Vol. 40 (157), 455-502 (2015-2).

 

Alors que le droit donne aux mots une force et une valeur particulières, la traduction contemporaine de l’expression corporate governance suscite la réflexion. Deux aspects de cette traduction de corporate governance doivent à notre sens être dénoncés : d’un côté, l’assimilation portée par la science économique faite entre corporate et firm sans changer expressément les termes (traduction intra-langagière inexacte) et, deuxièmement, la traduction dans le langage français et francophone de corporate par « entreprise » sans tirer les conséquences qui s’imposent (traduction inter-langagière inexacte). Longtemps corpus mysticum du juriste français, le corporate governance est un champ disciplinaire qui doit être investi par les juristes. Malgré la difficulté de la tâche, ces derniers doivent contribuer à identifier le juste équivalent au corporate governance afin de mettre en lumière ce qui constitue les fondations de toute aventure économique : une entreprise qui se trouve placée au cœur de la cité. En s’appuyant sur corporate, cette étude démontre que le juriste dispose déjà de tous les outils intellectuels – telles les théories nord-américaine et française de l’entreprise – pour appréhender parfaitement le corporate governance de demain : un corporate governance qui ne sera pas bâti sur une conception exclusivement contractualiste et réductrice de l’entreprise au service des seuls actionnaires.

As law breaths new life to words, the modern translation of the term “corporate governance” arouses some considerations. Two issues arise from this particular translation of the term “corporate governance” and must be here exposed: first, the mistaken equalization, in the field of economics, of the terms “corporate” and “firm” (same language miswording) and, second, the unconsidered translating, from English to French, of the term “corporate” into the term “entreprise” (different language miswording). Long considered the corpus mysticum of the French jurists, the corporate governance is a field of study that must be vested by these legal experts. Notwithstanding the difficulty of this task, they must contribute to the identification of the right counterpart of corporate governance to bring light to the foundations of every economic venture, a business within the very heart of society. By referring to the term “corporate”, this study proposes that the legal experts have already every intellectual tool (e.g. the North-American theories and French theories) to properly tackle the corporate governance of tomorrow, which is a corporate governance that won’t be leaning on exclusively on the theory of contracts and shareholders supremacy.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Billet d’humeur sur Contact : les actionnaires sont-ils à blâmer ?

Bonjour à toutes et à tous, je viens de publier sur un de mes derniers billets publiés sur le blogue Contact de l’Université Laval : « Les actionnaires sont-ils diaboliques ». La saga de Bombardier venant de se terminer, une lecture de ce billet vous démontrera toute sa pertinence…

 

Si cette question peut surprendre et heurter, elle n’en demeure pas moins très actuelle. Beaucoup d’experts en gouvernance d’entreprise se déchirent en cherchant à confirmer ou à infirmer la thèse voulant que le court-termisme – que les entreprises sont accusées de propager – trouve sa source dans le comportement des actionnaires et la trop grande concentration des juristes sur leur situation. Vrai ou faux, le raccourci est souvent fait de considérer les actionnaires comme animés par un seul et unique objectif : s’assurer que l’entreprise dans laquelle ils ont investi génère toujours plus de bénéfices ! Le professeur de droit américain Stephen M. Bainbridge écrit dans un ouvrage consacré à la gouvernance d’entreprise que : « […] to the extent corporate governance contributed to the financial crisis, it did so because shareholders are already too strong, not because they were too weak » (S. M. Bainbridge, Corporate Governance after the Financial Crisis, New York, Oxford University Press, 2012, à la p. 253)

 

Alors, les actionnaires sont-ils si diaboliques ? Méritent-ils l’opprobre ? C’est sur interrogation que le présent billet se penche à travers 3 constatations :

  1. Les actionnaires sont (en réalité) multiples.
  2. Les actionnaires sont (qu’on le veuille ou non) indispensables.
  3. Les actionnaires sont (parfois) court-termistes.

 

Petit extrait pour les juristes :

 

 

Les juristes reconnaissent l’importance des actionnaires en sécurisant leur position et leur investissement. Les multiples scandales corporatifs survenus depuis le début des années 2000 ont rappelé la nécessité d’assurer une protection adéquate des actionnaires. Au bout du compte, c’est la confiance des investisseurs et des marchés qui est en jeu. À ce titre:

  • Le droit limite la responsabilité des actionnaires à ce qu’ils ont investi dans l’entreprise, et il importe de garder en mémoire que cette responsabilité ne joue que dans le cas où une entreprise serait dissoute et liquidée. Attention toutefois, ce n’est pas pour autant que les actionnaires sont irresponsables dès lors qu’ils commettent une fraude ou qu’ils se montrent négligents.
  • Le droit reconnaît aux actionnaires divers droits, tantôt fondamentaux (droit de voter, droit de participer au partage des dividendes et du reliquat de l’actif), tantôt moins fondamentaux mais non négligeables (droit à l’information, droit de participer à l’administration, droit dans des changements importants…). Même si le droit fixe des balises, ces droits peuvent être aménagés au gré de la volonté des fondateurs.
  • Le droit permet aux actionnaires de se comporter de manière égoïste. Dans la décision North-West Transportation Beatty, il a été reconnu que les devoirs d’une personne diffèrent selon qu’elle agit comme administrateur (elle doit alors agir de bonne foi et dans l’intérêt de la société) ou comme actionnaire (elle peut voter selon ses propres intérêts).
  • Le droit permet aux actionnaires de prendre le pouvoir dans l’entreprise. Ils s’attribuent alors le pouvoir de prendre certaines (ou toutes) décisions d’affaires. Les juristes reconnaîtront ici la convention unanime d’actionnaires que l’article 213 de la Loi sur les sociétés par actions (LSAQ) consacre et encadre.
  • Le droit octroie aux actionnaires des recours judiciaires (recours en oppression, recours en redressement en cas d’abus de pouvoir ou d’iniquité) les protégeant contre les comportements opportunistes des dirigeants, des administrateurs, voire des autres actionnaires (abus, détournement, fraude…) ou les autorisant à représenter une entreprise pour obtenir la réparation d’un préjudice subi par cette dernière. Ils assurent donc un contrôle de la gestion de l’entreprise et de ses fonds.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian