Responsabilité sociale des entreprises | Page 3

actualités canadiennes Gouvernance Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises Valeur actionnariale vs. sociétale

Des actionnaires trop gourmands ?

Intéressant article de Pierre-Olivier Zappa : « Les épiceries, des profits, elles en mangent » (Le journal de Montréal, 28 mai 2022). En parcourant cet article, nous pouvons nous interroger sur la responsabilité sociale des actionnaires de ces grandes enseignes avec une question simple en tête : agissent-ils de manière socialement responsable ? Pas sûr… Toutefois, devrait-il le faire, voilà une autre belle interrogation sachant que le droit canadien permet aux actionnaires de se conduire de manière égoïste !

Extrait

Ce qui me dépasse encore plus, ce sont les profits des épiciers. On nous répète que les aliments coûtent plus cher parce que l’engrais coûte plus cher, parce que l’essence coûte plus cher, parce que la main-d’œuvre coûte plus cher, et qui sait quelles autres justifications. Pourtant, les profits des grandes bannières ne cessent de gonfler. Alors la question se pose : qui s’en met plein les poches ?

Au début du mois de mai, Loblaw Companies a déclaré des profits en hausse de 40 % par rapport à la même période l’an dernier. La maison mère de Provigo a vu ses ventes d’aliments augmenter de 2,4 % pour atteindre 8,7 milliards $ au dernier trimestre.

Metro passe elle aussi à la caisse. Malgré les pressions inflationnistes et les augmentations de salaire, la chaîne a enregistré un bénéfice net à son deuxième trimestre de 198,1 millions $, en hausse de 5,3 %. Chez Empire, qui possède la bannière IGA, les profits ont aussi grimpé de 5 %.

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actualités canadiennes Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises

Le français ne passe pas au CN !

Intéressante information que relaie Julien Arsenault concernant l’entreprise CN qui fait tant parler d’elle pour le français : « La CDPQ tape encore sur les doigts du CN » (La presse, 24 mai 2022). La Caisse de dépôt et de placement vient de se fâcher relativement à l’élection des membres du CA.

Extrait

Après avoir qualifié la situation d’« inacceptable » le mois dernier, la Caisse en a rajouté une couche en s’opposant à la réélection de deux des onze administrateurs de l’entreprise. Il s’agit de Kevin Lynch et Robert Phillips, membres du comité de gouvernance et de candidatures – chargé du recrutement des membres du C.A. Âgés de 71 ans, les deux hommes sont les doyens du conseil d’administration.

Officiellement, le bas de laine des Québécois s’est abstenu d’appuyer la réélection des deux hommes, vendredi dernier, à l’occasion de l’assemblée annuelle de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada. Il est toutefois allé plus loin, mardi, en précisant le fond de sa pensée, et ce, même si le CN a promis de corriger le tir.

« La CDPQ déplore l’absence d’administrateurs francophones au conseil d’administration, dit-elle. La charte du comité de la gouvernance […] prévoit que ses membres sont chargés d’établir la composition du conseil. »

Cette sortie de la Caisse est toutefois symbolique. MM. Lynch et Phillips ont été réélus et seront de retour. Ils ont cependant récolté les plus hauts taux d’abstention (5,4 % et 4,77 %). 

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Divulgation divulgation extra-financière Normes d'encadrement normes de droit Responsabilité sociale des entreprises

IFRS : deux nouvelles normes en discussion sur le climat et la durabilité

La Fondation IFRS a créé un nouveau conseil d’établissement de normes – l’International Sustainability Standards Board (ISSB) – qui va émettre des normes sur la communication de l’information ESG. Or, l’ISSB vient de publier deux nouvelles normes qu’elle soumet à consultation :
• IFRS S1 – General Requirements for Disclosure of Sustainability-related Financial Information (the General Requirements Standard)
• IFRS S2 – Climate-related Disclosures (the Climate Standard)

Pour en savoir plus : cliquez ici

The International Sustainability Standards Board expects on 31 March 2022 to publish:

  • Exposure Draft Proposed IFRS S1 General Requirements for Disclosure of Sustainability-related Financial Information; and
  • Exposure Draft Proposed IFRS S2 Climate-related Disclosures.

The documents will be available to download from the Open for comment section and from their project pages, General Sustainability-related Disclosures and Climate-related Disclosures. To comment on the Exposure Drafts you will need to have an IFRS Foundation account, which can be created here.

À la prochaine…

Gouvernance Normes d'encadrement responsabilisation à l'échelle internationale Responsabilité sociale des entreprises

Conduite responsable des entreprises à l’étranger – Stratégie du Canada pour l’avenir

La Ministre fédérale Ng (Minister of International Trade, Export Promotion) vient de faire paraître aujourd’hui « La Nouvelle Stratégie canadienne pour la RSE à l’étranger ».

Extrait

Bien que la Stratégie maintienne l’approche équilibrée du Canada en matière de CRE, qui prévoit la prévention et l’accès aux recours, étayée par une législation dans les domaines critiques tels que le travail forcé, la transparence et la corruption, plusieurs changements stratégiques ont été apportés aux stratégies précédentes :

  • Elle met l’accent sur des mesures prises pour la CRE plutôt que sur des secteurs d’activité particuliers.
  • Elle présente de nouveaux outils et améliore ceux qui existent déjà pour aider les entreprises canadiennes à adopter des pratiques commerciales responsables exemplaires.
  • Elle s’harmonise avec les priorités globales du gouvernement fédéral.
  • Elle est accompagnée d’un plan d’action.
  • Elle comprend un cadre de surveillance et d’évaluation.

Concernant la dureté en matière de RSE et de diligence, force est de constater la prudence politique :

  • On renvoie au PCN et à l’OCRE uniquement pour faciliter l’accès… mais leurs pouvoirs ne changent pas
  • Ce sont des sanctions commerciales qui sont évoquées.

Pour le reste, les choses sont vagues : « Élaborer une norme pour la déclaration de diligence raisonnable basée sur les pratiques exemplaires mondiales et canadiennes, y compris un ensemble simplifié et intuitif d’indicateurs permettant aux entreprises de suivre la façon dont elles gèrent certains risques et, en définitive, renforcent leur responsabilisation et leur transparence »; « La législation dans des domaines critiques, comme le travail forcé, la lutte contre la corruption et la transparence, renforce l’engagement du Canada à l’égard d’une conduite responsable des entreprises. La stratégie – et le plan d’action des activités et des outils clés qui produiront des résultats – complète la législation actuelle et future en matière de CRE dans de nouveaux domaines comme la diligence raisonnable dans les chaînes d’approvisionnement ».

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Gouvernance Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises

Raison d’être : interrogation autour de la guerre

Drôle de réflexion que propose le professeur Armand Hatchuel, mais ô combien intéressante ! « La « raison d’être » des entreprises à l’épreuve de la guerre en Ukraine » (Le Monde, 22 mars 2022).

Extrait

Inscrite dans le droit par la loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) de 2019, la « raison d’être » d’une entreprise stipule « les principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité » (article 1835 du code civil). Conçue en temps de paix, cette disposition permet aux entreprises de préciser leurs engagements sociaux et environnementaux, mais peut-elle aussi éclairer les décisions difficiles à prendre en situation de conflit armé ?

Les guerres posent aux entreprises des dilemmes de plusieurs types. Les plus connus sont ceux qui émergent lors des périodes d’occupation. Sous la botte nazie, fallait-il se saborder ou continuer à produire ? En poursuivant l’activité, l’intérêt des actionnaires rejoignait celui de l’occupant, mais la préservation de l’appareil de production préparait aussi le futur de la nation libérée.

En revanche, sauf réquisition, la raison d’être devrait exclure de servir l’appareil militaire de l’occupant, car de telles collaborations ont conduit à disqualifier de nombreuses entreprises après la Libération.

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actualités canadiennes Divulgation divulgation extra-financière Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises

Faire confiance aux entreprises, vraiment ?

Drôle de tribune qu’offre Francis Vaille dans La Presse : « Comment faire confiance aux entreprises ». Cette tribune interpelle le lecteur sur le contenu de l’information non financière et ses conséquences sur la réalité de la divulgation des entreprises en matière de GES.

Extrait

Pour l’instant, certaines entreprises en Bourse publient des renseignements sur leurs émissions de GES par million de dollars de valeur ou de revenus de façon volontaire. Elles se basent notamment sur les travaux menés par le groupe de travail sur les informations financières liées au climat (TCFD).

Les normes demeurent toutefois imprécises et incomplètes. Elles incorporent souvent les émissions de premier et de deuxième niveau – celles faites par l’entreprise elle-même –, mais pas celles de leurs fournisseurs. La norme ISSB proposera une norme commune par industrie pour les trois niveaux.

Et d’ici peu, les autorités des valeurs mobilières rendront la publication obligatoire. 

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devoir de vigilance Gouvernance Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises

Raison d’être et devoir de vigilance

Bel article de réflexion offert par Beate Sjåfjell et Jukka Mähönen (professeurs à Oslo) sur la directive vigilance : « Corporate Purpose and the EU Corporate Sustainability Due Diligence Proposal » (Oxford Business Law Blog, 25 février 2022).

Extrait

Taking sustainability seriously: sustainable value creation within planetary boundaries

The question of how to secure the contribution of our businesses to the fundamental transformation to sustainability is not one that should be responded to in the ideological and emotional way as we have seen in some of the responses when the Sustainable Corporate Governance initiative was launched. Now that the Directive proposal is out, we encourage all who wish to participate in the discussion to lay aside any ideological ‘shareholder vs stakeholders’ viewpoints. That is not what is at stake. While the IPCC report on climate change of 2021 has been referred to as ‘code red for humanity’, planetary boundaries research shows that reality is even more grim – we have a whole set of code reds for humanity and they are increasing in number (as the latest planetary boundaries research shows), and the status for the European Union is not good. Working towards sustainability also entails questions of social justice – just as we cannot silo environmental issues into various categories to be dealt with separately, we cannot separate environmental and social issues. These are all interconnected elements. All of these issues must be dealt with simultaneously. The sustainability challenges of our time are complex and interconnected and attempting to silo sustainability work into dealing piecemeal with isolated elements will not work.

While there seems generally to be an increasing consensus among governments and businesses on the need to integrate sustainability into the governance of our globalized businesses, the attempts to do this so far seem to have been based on three principles: a) as few clear and enforceable rules as possible, b) support voluntary measures although they haven’t worked  so far, and c) if we must regulate, be sure to leave company law out of the picture.

However, to get real about integrating sustainability, we need to go to company law, which is the regulatory infrastructure for decision-making in business. As all company law scholars who have analysed the sources know, company law gives a broad discretion to corporate boards and by extension senior management in their corporate governance. There is, in other words, space within the current company law and corporate governance systems to steer businesses in more sustainable directions. This has been used by some as an argument for the sanctity of company law – no need for change, move on, nothing to see here! The problem is that this discretionary space is taken up by the social norm of shareholder primacy. We therefore suggest, on the basis of over a decade of multijurisdictional comparative analyses of the drivers for and the barriers to sustainable business, that company law must take back that space and clarify why we have companies (corporate purpose) and give a principle-based instruction to boards on how to do their jobs in this era that is defined by the extreme unsustainabilities resulting from business as usual.

Sustainable value creation is already an emerging concept in corporate governance all over the world. What needs to be done is to position sustainable value creation within the ecological limits of our planet. We therefore propose both ‘sustainable value’ and ‘planetary boundaries’ as general clauses in company law, the content of which gradually can be firmed up as practice develops. This doesn’t mean we don’t think there should be any guidance in the law – quite the opposite, as we see the need to ensure that business does not take these two concepts and turn them into opportunities for greenwashing, bluewashing or ‘sustainability washing’.  Integrating these concepts into the duties of the board is therefore also paramount, outlining this in a way that provides legal certainty.

Avoiding the shareholder vs stakeholder trap does not mean that we do not in our proposal encompass a wide variety of interests affected by the company’s business. However, while involving affected communities, trade unions, and civil society is crucial, a mere canvassing of ‘stakeholder interests’ and giving priority to the ones that make themselves heard the most is insufficient, misleading and potentially destructive for the overarching purpose of sustainable value creation. The backdrop must always be the interconnected complexities and the vulnerability of the often-unrepresented groups (whether invisible workers deep in the global value chains, Indigenous communities, or future generations), and the aim of a sustainable future within planetary boundaries.

Under pressure: the proposed Corporate Sustainability Due Diligence Directive

The European Commission’s Corporate Sustainability Due Diligence Directive proposal, presented on 23 February 2022, aims to put into place mandatory and harmonised sustainability due diligence rules in the European Economic Area, in recognition of the insufficiency of voluntary action by business and the regulatory chaos that business faces in its cross-border activities.

The proposed Directive is appropriately named ‘Corporate Sustainability Due Diligence’, resonating in title with the proposed Corporate Sustainability Reporting Directive. It is positive that the Corporate Sustainability Due Diligence Directive proposal clarifies which environmental and human rights issues are intended to be included. However, a broader approach is needed, drawing on a research-based concept of sustainable value creation within planetary boundaries.

The proposal builds on a due diligence duty for the members of the board and the chief executive officer of the company. It reflects the international human rights and environmental international law obligations and concretises the steps of the due diligence process. There is, however, a danger of box ticking instead of principle-based evaluations of risks of unsustainability.

There are proposals for both public and private enforcement, including civil liability for the board members and the chief executive officer, which makes this proposal different from much of what we have otherwise seen in the corporate sustainability area. The scope of the proposal is however extremely narrow, excluding in its direct application all small and medium-sized enterprises, and covering only some 13,000 EU companies and some 4,000 third-country companies.

The proposal takes an important core company law step, which we have advocated in our work, namely to clarify that the duty of the board (strangely formulated as a duty, in Anglo-Saxon speak, for all ‘directors’) is to promote the interests of the company. Wisely, there is no attempt to harmonize this (and especially not by including some kind of stakeholder language), rather leaving the content of the interests of the company to the variety of company law regimes in Europe. What is missing, however, is further situating this duty within an overarching purpose of sustainable value creation within planetary boundaries, which would have given a clearer sustainability-oriented framing for the whole proposal. 

The proposal does employ misleading stakeholder language in the consultation duties as part of due diligence, where it would have been better to specify that the consultation should take place with affected communities, groups and people.

The proposed Directive is clearly a product of the tension resulting from, on the one hand, the social norm of shareholder primacy and the drive to keep company law untouched by sustainability issues, and on the other hand, the willingness to make necessary changes to mitigate the extreme unsustainabilities of business as usual. We see this in the way core company law issues are relegated to the end of the proposal. It would have been much more logical to set out clearly in the beginning of the proposed Directive the core duties of the boards to ensure that sustainability due diligence is used as a key tool for integrating sustainability into the entire business of the company.

The Directive proposal needs to be strengthened on a number of points, and it is now to be discussed further by the European Parliament and the Council, before it can be adopted with possible revisions. We strongly recommend that subsequent work with the Directive proposal be based on a research-based concept of sustainability and take company law and corporate governance seriously, rather than allowing the misleading shareholder vs stakeholder dichotomy to set the parameters for continued siloing of core company law as the regulatory infrastructure for corporate decision-making.

À la prochaine…