Normes d’encadrement

Gouvernance Normes d'encadrement Nouvelles diverses

Distribution de dividendes et intérêt social face à la pandémie Covid-19

En France, le Club des juristes vient de faire connaître sa position sur le versement de dividendes en temps de crise sanitaire mondiale (ici). Réponse : tout est une question d’intérêt social !

Extrait :

Malgré l’absence de caractère contraignant des positions prises par le gouvernement français, ou des recommandations, demandes, communiqués de presse – peu importe leur qualification – des autorités de régulation, la question se pose de savoir si les conseils d’administration ne sont néanmoins pas tenus de réexaminer les projets de résolution en matière de dividendes précédemment publiés ou annoncés.

L’ensemble des déclarations des autorités publiques, qu’elle qu’en soit leur forme, ne sont que le reflet de la situation économique évolutive à laquelle les sociétés sont actuellement confrontées. Dès lors, même en l’absence de texte contraignant, les administrateurs doivent s’en remettre à la boussole traditionnelle guidant leurs décisions et actions : l’intérêt social. Les administrateurs doivent donc s’assurer que les projets de résolutions relatifs au montant du dividende qu’ils soumettront aux actionnaires, ou qu’ils leur ont déjà soumis, sont conformes à l’intérêt social des sociétés qu’ils dirigent. Cette boussole traditionnelle prend encore plus d’importance lorsque les temps sont troubles et que l’avenir est incertain. Conserver aujourd’hui de la trésorerie pour faire face, notamment, à une baisse du carnet de commande et à des charges à payer peut justifier une appréciation différente du montant du dividende à verser que celle qui aurait été décidé auparavant, à une époque où la connaissance de l’étendue de la pandémie et de ses conséquences était nettement moindre.

L’intérêt social à prendre en compte est, au premier chef, celui de la personne morale concernée. La loi dite « Pacte » du 22 mai 2019 l’a consacré dans l’article 1833 du Code civil et l’article L. 225-35 du Code de commerce va dans le même sens. Lors de l’examen d’une décision, afin de déterminer si celle-ci est dans l’intérêt social, le conseil d’administration devra prendre « en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité », ce qui prend un relief particulier avec la situation de pandémie à laquelle les sociétés doivent faire face.

Le conseil d’administration doit évaluer la conformité de ses décisions en fonction des données avérées et prévisionnelles lorsqu’elles sont prises. Il est toutefois aussi nécessaire pour le conseil d’administration de réévaluer périodiquement ses décisions, afin, le cas échéant, de les adapter par rapport à l’évolution de la situation. L’évolution actuelle de la pandémie Covid-19 et des mesures de confinement prises devrait, en toute vraisemblance, inciter les administrateurs à prendre en compte les impacts économiques de celle-ci au fur et à mesure où elles sont connues, que ce soit la récession annoncée ou la privation d’éventuelles aides de l’État notamment, dans le cadre de la détermination du montant du dividende soumis aux actionnaires, de la modification du montant ou de la suppression du dividende précédemment proposé. Le rôle des administrateurs est d’autant plus crucial actuellement, et ils doivent s’assurer que les décisions antérieurement prises par leur conseil continuent de respecter l’intérêt social de leurs sociétés et sinon les adapter !

À la prochaine…

actualités internationales engagement et activisme actionnarial Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement normes de droit Nouvelles diverses

Rapport du Club des juristes sur l’activisme actionnarial

En France, le Club des juriste a publié le 7 novembre 2019 son rapport intitulé « Activisme actionnarial ».

Synthèse :

La Commission est parvenue à la conclusion que l’activisme actionnarial n’appelait pas de réforme législative ou réglementaire de grande ampleur, en raison des effets collatéraux sur l’image de la Place.

La composition multidisciplinaire de la Commission lui a également permis d’adopter une démarche consensuelle et équilibrée. Ainsi, la Commission recommande principalement des ajustements de la régulation boursière et des pratiques de marché de nature à encadrer le déroulement des campagnes des activistes et à améliorer le dialogue entre émetteurs et investisseurs. Les campagnes publiques sont, en effet, fréquemment la conséquence de l’absence ou de l’échec de ce dialogue et c’est à leur occasion que se posent les problèmes les plus délicats au regard de la transparence des positions, de la loyauté des échanges et du bon fonctionnement du marché.

Les réflexions de la Commission se sont concentrées sur les conditions de déroulement des campagnes publiques initiées par les activistes et non sur les activistes eux-mêmes dont la caractérisation juridique peut s’avérer difficile tant l’activisme est protéiforme. Les premières recommandations de la Commission sont ainsi relatives à l’encadrement juridique des campagnes activistes par la promotion d’une meilleure transparence de leur exposition économique et de leurs positions de fond. Les propositions s’inspirent de règlementations existantes, notamment celles relatives aux recommandations d’investissement et à la sollicitation active de mandats. Sont également abordées les difficultés soulevées par les quiet periods, les positions courtes et l’empty voting.

Outre la création d’une plateforme de dialogue actionnarial, il est recommandé qu’une démarche de dialogue préalable au lancement d’une campagne activiste publique soit systématique. Avant la diffusion éventuelle d’un white paper par les activistes, les émetteurs devraient notamment disposer d’un délai suffisant pour répondre. Enfin, un guide du dialogue actionnarial pourrait être élaboré conjointement par les émetteurs, les investisseurs, les régulateurs et les autres acteurs de marché. Les investisseurs pourraient se réunir en un comité unique afin de parler d’une seule voix avec les émetteurs.

La Commission considère que le recours au droit souple doit être privilégié pour que les bonnes pratiques se répandent chez les investisseurs comme chez les émetteurs. À cet égard, les régulateurs de marché, AMF et ESMA, ont un rôle essentiel à jouer dans la régulation de l’activisme actionnarial, au moyen de leur « magistrature d’influence ». Il est également de la responsabilité des investisseurs institutionnels et des gérants d’actifs « indiciels » de contribuer, par leurs prises de position, à encourager l’observation de ces recommandations par les émetteurs et les investisseurs activistes.

Enfin, un renforcement des moyens et des pouvoirs – notamment d’injonction – de l’AMF semble indispensable pour éviter ou mettre fin à des situations de crise.

À la prochaine…

finance sociale et investissement responsable normes de droit

Rôle sociétal de l’entreprise : le Club des juristes donne son avis

La Commission « contrat de société », présidée par Antoine Frérot et Daniel Hurstel, vient de publier son rapport intitulé : « Le rôle sociétal de l’entreprise – Eléments de réflexion pour une réforme ».

La défiance accrue comme les attentes nouvelles de la société civile et des pouvoirs publics à l’égard de l’entreprise ont replacé au centre des débats les réflexions sur le rôle de l’entreprise et l’objet social de la société.

Face à ce constat, la Commission « contrat de société » s’est interrogée sur la pertinence et l’opportunité d’une évolution de la définition de la société et de sa gouvernance pour permettre une meilleure prise en considération du rôle et des intérêts des parties prenantes dans l’entreprise.

Elle a en conséquence réuni des acteurs du monde de l’entreprise et des spécialistes de différents domaines (droit bien sûr, mais aussi économie, sociologie, etc.). Fruit d’une année de travaux, durant laquelle la commission a tenu de nombreuses réunions et entendu de multiples experts, le présent rapport vise davantage à nourrir la réflexion sur le rôle sociétal de l’entreprise et les moyens de mieux répondre aux attentes exprimées qu’à imposer une voie unique de réforme.

 

A ce titre, le présent rapport s’articule autour de trois grands axes : l’appréciation du cadre normatif des sociétés au regard de l’essor de l’entreprise, la description de la place accordée au projet d’entreprise et aux attentes sociales dans les pays voisins et enfin, la proposition de pistes d’évolution possibles du cadre normatif.

Les évolutions proposées, qui tiennent compte des différentes sensibilités qui se sont exprimées au sein de la commission, tendent à favoriser la prise en compte des considérations sociales et environnementales (au moyen d’une modification du Code civil et/ou du Code de commerce, ou par le recours au droit souple), à la création d’un statut d’ « entreprise à mission » ou encore à l’amélioration de l’information fournie par les entreprises.

 

Alors que le sujet est désormais au cœur de l’actualité à l’aube de la présentation de la loi PACTE (Plan d’action pour la croissance et la transformation de l’entreprise) qui devrait s’en saisir, la Commission entend par ces réflexions apporter sa contribution au débat public.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Normes d'encadrement

Réponse du Club des juristes sur la consultation du Code de gouvernement d’entreprise

Depuis juillet 1995, date de la publication à l’initiative des entreprises du premier rapport sur le gouvernement d’entreprise des sociétés cotées, l’Afep et le Medef ont élaboré un ensemble de recommandations qui a permis à ces sociétés d’améliorer leur fonctionnement et leur gestion dans une grande transparence et de répondre ainsi aux attentes des investisseurs et du public.  Cet ensemble de recommandations, qui constitue le code Afep-Medef, peut être désigné par les sociétés cotées comme étant leur code de référence en application des articles L. 225-37 et L. 225-68 du code de commerce.

Depuis 2013, les parties prenantes (pouvoirs publics, associations d’actionnaires, investisseurs, agences de conseil en votes…) sont consultées à l’occasion des révisions successives du code.  L’AFEP et le MEDEF viennent de lancer un appel à consultation visant à recueillir les avis de la place sur les modifications envisagées du Code de gouvernement d’entreprise des sociétés cotées.

 

Le Club des juristes a sollicité Olivier Diaz, afin qu’il constitue un groupe de travail qui réponde à l’appel à consultation de l’Afep-Medef et puisse ainsi contribuer à l’amélioration des règles de gouvernance qui régissent la grande majorité des sociétés cotées françaises.

 

Accédez à la proposition du Club des juristes : ici.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

autres publications normes de droit Nouvelles diverses responsabilisation à l'échelle internationale

« Renforcer l’efficacité du droit international de l’environnement – Devoirs des Etats, droits des individus »

Bonjour à toutes et à tous, le Club des juristes a publié un intéressant rapport il y a peu. La Commission Environnement du Club des juristes, présidée par Yann Aguila, vient de publier son rapport intitulé  « Renforcer l’efficacité du droit international de l’environnement – Devoirs des Etats, droits des individus ». Le rapport de la Commission environnement du Club des juristes démontre que pour protéger l’environnement, les normes doivent donc être adoptées à l’échelle internationale : la crise écologique ne s’arrête pas aux frontières des États. Les territoires écologiques ont des périmètres différents des territoires du droit national.

Le droit international de l’environnement est, selon les experts en environnement du Club des juristes, marqué par un double échec : inefficacité du processus d’élaboration des normes, en raison de la lenteur, voire de la paralysie des négociations ; difficultés au stade de l’application, en l’absence de mécanismes de contrôle et de sanction efficaces.

Pour rendre plus effectif le droit international de l’environnement, le rapport du Club des juristes propose que la société civile s’en empare. Le respect des traités par les États doit devenir l’affaire de tous les citoyens, afin que le droit à un environnement sain, aujourd’hui consacré par de nombreuses constitutions nationales, soit respecté.

Les experts de la Commission environnement du Club des juristes ont donc, avec cet objectif, formulé trois types de garanties :

  • L’élaboration des normes internationales : les garanties procédurales

L’exigence de démocratie participative doit être transposée à l’échelle internationale. La Commission environnement estime qu’une institutionnalisation du rôle de la société civile permettrait de faire perdurer et renforcer ce type d’initiatives, en leur donnant plus de légitimité. Elle propose donc de :

  • Mettre en œuvre une initiative citoyenne et un droit de pétition universel auprès des institutions internationales
  • Adopter une convention internationale relative à la participation du public dans l’élaboration du droit international de l’environnement s’inspirant des lignes directrices d’Almaty. Celle-ci pourrait regrouper et préciser les principes fondamentaux dans ce domaine : participation du public, droit d’accès aux informations détenues par les organisations internationales, ou encore règles d’accréditation des ONG.
  • L’application des normes internationales : les garanties juridictionnelles

Selon la Commission environnement, l’existence de mécanismes de contrôle et de sanction efficaces est une condition indispensable de l’effectivité de la règle. Il n’est pas de droit sans contrainte. Plusieurs organes sont à même de connaître du respect par un État de ses engagements environnementaux au niveau international, mais de nombreux problèmes subsistent.

  • Il existe parfois au sein des conventions environnementales des comités de contrôle, à caractère non juridictionnel, qui disposent de pouvoirs limités. Des améliorations sont possibles :

– La saisine de ces instances, quasi-exclusivement réservée aux États, devrait être généralisée aux ONG, sur le modèle de la Convention d’Aarhus.

– La Conférence de Paris offre une excellente occasion de construire une nouvelle procédure de non-respect plus transparente et plus ouverte.

  • La justice internationale reste facultative et devant les juridictions internationales, les acteurs non-étatiques ne sont pas recevables à agir. La France est d’ailleurs au nombre des États qui n’acceptent pas la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice, ce qui est particulièrement regrettable dans le cas du pays organisateur de la COP21.

– La compétence obligatoire de la Cour internationale de justice devrait être reconnue par les grands États.

– Un droit d’intervention, voire un véritable droit de saisine pourrait être consacré pour certaines catégories d’acteurs non gouvernementaux, afin de contrôler l’effectivité d’une convention environnementale.

– Les réflexions en cours sur la création d’une juridiction spécialisée en matière environnementale et d’une organisation mondiale de l’environnement doivent être poursuivies.

– Le juge national devrait s’ériger en juge international de droit commun pour devenir le premier garant du respect par l’État de ses engagements internationaux. Cette mission vient d’être illustrée de façon éclatante par le Tribunal de la Haye qui a condamné l’État néerlandais, dans une décision rendue le 24 juin 2015, à réduire ses émissions de gaz à effet de serre sur le fondement de son devoir de protéger l’environnement.

– Un chapitre traitant spécifiquement de la question du droit au recours, et plus particulièrement de l’invocabilité de la convention devant les juridictions internes, devrait être intégré dans les conventions environnementales.

  • Le contenu des normes internationales : les garanties textuelles

Surtout, un texte universel à valeur obligatoire regroupant l’ensemble des principes fondateurs du droit international de l’environnement donnerait à ce dernier la pierre angulaire dont il a besoin. La commission propose donc l’adoption d’une Charte universelle de l’environnement, qui se distinguerait des déclarations existantes par sa valeur juridique obligatoire. Cette Charte viendrait compléter, unifier et fonder le droit international de l’environnement.

Ce texte contiendrait des droits matériels et procéduraux, et le contrôle du respect de ces droits serait assuré par la création d’un comité de suivi et l’insertion d’un chapitre consacré au droit de recours qui garantirait l’invocabilité de la Charte devant les juridictions internes.

Le droit international de l’environnement de demain reposerait alors sur le triptyque : Charte universelle, Cour internationale et Organisation mondiale de l’environnement. La Commission voit dans ce schéma la solution optimale pour renforcer l’efficacité du droit international de l’environnement et ainsi garantir aux individus le droit à un environnement sain.

Pour en savoir plus, cliquez ici.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian