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Do Employees Benefit from Worker Representation on Corporate Boards?

En voilà une question bien intéressante qui fait l’objet de discussions moins intense de ce côté-ci de l’Atlantique par rapport à l’Europe ! Je vous invite à lire ce travail du National Bureau of Economic Research : « Do Employees Benefit from Worker Representation on Corporate Boards? », WORKING PAPER 28269, août 2021 (de Christine Blandhol, Magne Mogstad, Peter Nilsson et Ola L. Vestad).

Résumé :

Do employees benefit from worker representation on corporate boards? Economists and policymakers are keenly interested in this question – especially lately, as worker representation is widely promoted as an important way to ensure the interests and views of the workers. To investigate this question, we apply a variety of research designs to administrative data from Norway. We find that a worker is paid more and faces less earnings risk if she gets a job in a firm with worker representation on the corporate board. However, these gains in wages and declines in earnings risk are not caused by worker representation per se. Instead, the wage premium and reduced earnings risk reflect that firms with worker representation are likely to be larger and unionized, and that larger and unionized firms tend to both pay a premium and provide better insurance to workers against fluctuations in firm performance. Conditional on the firm’s size and unionization rate, worker representation has little if any effect. Taken together, these findings suggest that while workers may indeed benefit from being employed in firms with worker representation, they would not benefit from legislation mandating worker representation on corporate boards.

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actualités internationales Gouvernance normes de droit parties prenantes place des salariés Responsabilité sociale des entreprises

Bulletin Joly Travail : deux articles à lire

Dans le dossier Droit du travail et droit des sociétés : questions d’actualité réalisé sous la coordination scientifique de Jérôme Chacornac et Grégoire Duchange, je signale deux articles intéressants touchant les thématiques du blogue :

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Participation des salariés : relancer l’idée ?

Dans Contrepoints, le professeur Michel Albouy soutient l’idée française exprimée récemment de relancer la participation des salariés : « Oui, il ne faut pas avoir peur de relancer la participation des salariés » (28 mai 2020).

Extrait :

Dans un monde en crise suite à la pandémie du Covid-19, le partage des richesses, via l’association capital-travail devient pour notre ministre un enjeu essentiel pour répondre « à la lutte des classes sociales que l’on voit resurgir ». Il n’a pas tort si on se réfère aux nombreuses déclarations d’intellectuels de gauche appelant à une répartition plus égalitaire des richesses dans le monde post Covid-19, avec évidemment davantage d’impôts et le rétablissement de l’ISF comme le réclament les économistes Thomas Piketty et Esther Duflo, prix Nobel d’économie.

La participation des salariés aux bénéfices des entreprises – une idée chère au Général de Gaulle – a été instaurée en 1967 par ordonnances sous le gouvernement Pompidou, malgré les résistances à l’époque du patronat qui y voyait une atteinte au droit des actionnaires et des syndicats ouvriers qui s’inquiétaient de cette collaboration de classes en devenir.

La réforme visait initialement les entreprises de plus de 100 salariés et prévoyait le blocage des sommes distribuées dans une réserve spéciale durant cinq ans. Cette règle a été étendue en 1990 aux entreprises de plus de 50 salariés. En 2015, la loi Macron a renforcé les avantages fiscaux dont la participation est assortie. En 2019, la loi Pacte en a assoupli certains dispositifs.

À l’heure actuelle, le ministre de l’Action et des Comptes publics n’a pas dévoilé les modalités concrètes pour développer davantage l’épargne salariale. Plusieurs pistes sont évoquées comme la généralisation à toutes les entreprises, ou encore une modification du plafond des primes, aujourd’hui fixé à 20 % du salaire brut. Une nouvelle réduction du forfait social pourrait être également envisagée.

Bien que les modalités concrètes de cette relance de l’actionnariat salarié ne soient pas encore connues, il est possible à partir des recherches réalisées en sciences de gestion de dresser un petit bilan des avantages et des risques d’une telle réforme.

L’actionnariat salarié est souvent présenté comme une stratégie gagnant-gagnant pour l’entreprise et ses salariés. Eh oui, il est vrai que la participation des salariés au capital des entreprises présente de nombreux avantages. C’est tout d’abord un moyen d’associer les salariés à la gestion de l’entreprise, de leur permettre de les faire participer à la création de valeur actionnariale, et de les fidéliser. C’est aussi un moyen de stabiliser le capital des entreprises et leur permettre de mieux résister à des opérations capitalistiques inamicales.

(Associer les salariés à la gestion de leur entreprise est un puissant levier de motivation si l’on en croit les nombreuses études réalisées sur cette problématique. Il apparait que les entreprises ayant une très forte culture d’actionnariat salarié enregistrent un taux moyen de départs volontaires inférieur à celui des entreprises ayant une faible culture dans ce domaine.

La participation permet également d’aligner les intérêts des salariés et ceux des managers sur les objectifs de développement de l’entreprise. Et puis, c’est un bon moyen de renforcer la cohésion et de sensibiliser les salariés aux objectifs économiques et financiers de l’entreprise.

Devenant actionnaires de leur entreprise, les salariés sont associés à sa valorisation. Ce mécanisme peut ainsi leur permettre de se créer un capital financier en bénéficiant en outre de dispositions financières et fiscales favorables. Les dispositifs utilisés permettent en effet d’acquérir des actions à des conditions préférentielles grâce aux décotes sur les cours, à l’abondement versé par l’entreprise et aux avantages fiscaux associés à ces dispositifs.

En matière de gouvernance, l’actionnariat salarié renforce la stabilité du capital par un actionnariat impliqué au devenir à long terme de l’entreprise. Comme le montre la recherche en gestion, l’actionnariat salarié constitue également un mécanisme de protection contre d’éventuelles tentatives de prise de contrôle (OPA) inamicale de la part d’une entreprise concurrente ou d’un investisseur financier. À condition naturellement que le capital aux mains des salariés soit significatif.

(…)

Si l’actionnariat salarié présente incontestablement de nombreux avantages, il ne faudrait pourtant pas passer sous silence ses risques, que ce soit pour les salariés comme pour l’entreprise, surtout si son développement devenait trop important.

1. Pour les salariés

Être associé au capital de l’entreprise c’est aussi être associé à ses gains comme à ses pertes. Ce rappel évident et bien connu des investisseurs, nous permet de relativiser les gains potentiels des salariés actionnaires. En ce sens, une participation aux bénéfices de l’entreprise n’est pas équivalente à une augmentation de salaire. Certes, si tout va bien et que l’entreprise prospère, les salariés seront gagnants mais ce scénario optimiste n’est pas garanti. Il est ainsi possible qu’à l’échéance de leurs plans de participation certains salariés soient déçus et que la promesse d’enrichissement ne soit pas tenue. En d’autres termes, il ne faudrait pas que les salariés oublient le principe de diversification cher aux investisseurs. Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier reste un conseil de bon sens. Outre que les salariés investissent déjà leur capital humain dans l’entreprise, s’ils investissent également une part significative de leurs avoirs dans son capital, ils pourraient au final être perdants sur tous les tableaux.

2. Pour les entreprises

Si la présence des salariés au capital des entreprises est une bonne chose pour fidéliser et motiver les employés, et stabiliser la gouvernance, elle peut néanmoins se traduire par une perte d’agilité pour le management. En effet, même s’ils sont actionnaires de leur entreprise, les salariés mettront toujours en premier leur statut d’employé avant celui d’actionnaire surtout en cas de décisions difficiles de restructuration. Comment en effet des salariés actionnaires représentés au Conseil d’administration pourraient valider la fermeture de sites non rentables ? Entre leurs intérêts d’actionnaires et ceux des salariés l’arbitrage est vite fait. Le cas de Renault et à cet égard très révélateur lors de la fermeture en 1997 du site de Vilvorde en Belgique. Tant que les salariés actionnaires restent minoritaires, la logique financière de l’entreprise demeure. Mais si ceux-ci deviennent majoritaires on bascule dans un autre système proche de celui des sociétés coopératives (SCOP). Or, et malgré leurs intérêts, les SCOP n’ont jamais vraiment challengé les sociétés anonymes par action (SA), surtout en termes de croissance et de développement. Et puis, une participation trop importante des salariés au capital de l’entreprise peut effrayer des investisseurs au cas où l’entreprise en difficulté aurait besoin d’une recapitalisation.

Au total, que penser de la proposition du ministre des Comptes Gérald Darmanin ? Même s’il existe quelques risques à un développement trop important de l’actionnariat salarié, il nous semble que les avantages l’emportent largement, surtout dans la situation que connaît notre pays. Associer le travail au capital reste une belle et puissante idée dans un pays trop imprégné par la lutte des classes et les rêves de nationalisation. Le Général de Gaulle avait vu juste il y a plus de cinquante ans.

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Un panel et des actions pour faire participer plus les salariés

Telles sont les propositions des professeurs Konstantinos Sergakis et Andreas Kokkinis dans leur article intitulé « Employee Advisory Panels: A New Paradigm for Shareholder-based Governance? » (25 mars 2020). À découvrir…

Extrait :

Employee participation in corporate governance refers to a range of institutions, voluntary or legally mandated, that engage employees in corporate decision-making, such as works councils with co-decision powers on labour matters, advisory panels, information and consultation committees, employee share ownership schemes and board representation. Corporate contractarian literature dismisses employee participation as inefficient on the grounds that, if it were efficient, it would be voluntarily adopted widely. In our paper, we argue that the scarcity of employee participation in the UK can be attributed to shareholder short-termism and behavioural biases and, therefore, that the question of its efficiency remains open for companies that want to explore this possibility. We thus propose a flexible approach that companies can follow to implement employee participation. Our approach takes into account the broader UK institutional framework by creating adaptable and long-term solutions for both listed and large private companies. Nevertheless, it can be adopted in any other national context where employee board representation has not been mandated by company law provisions.

We argue that the most pragmatic way to encourage efficient employee participation is through the introduction of formal and permanent employee advisory panels and, in the longer term, the proliferation of employee share ownership schemes coupled with special rights to appoint a number of directors in tandem with the size of employee share ownership. Our approach relies on an incremental participation model, whereby employees should first be given a dialogue channel through advisory panels to gain adequate experience before appointing board members. 

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Etats-Unis : pourquoi les salariés sont absents des CA ?

Passionnant article de Justin Fox sur la participation des salariés au CA des entreprises américaines. Dans son article « Why U.S. Corporate Boards Don’t Include Workers » (21 août 2018), Justin Fox met en avant deux facteurs (le juridique et le politique) pour expliquer cette non présence des salariés dans la culture américaine.

 

Extrait :

The U.S., it turns out, also used to have entities much like works councils, which went under names like “employee representation plans,” “company unions” and just plain “industrial democracy.” They came into vogue later than in Germany, but constituted a major movement from about 1915 through 1935, when Congress put a stop to them (which doesn’t sound like what Jensen and Meckling would call a “voluntary arrangement”). I cannot claim to be an expert on this history, but I do know a lot more about it than I did a few days ago, so here goes. (…)

This would seem to have gotten us pretty far from the question of why American corporate boards generally don’t include worker representatives. But I think there is a connection. Union officials have occasionally gotten seats on corporate boards in the U.S.: United Automobile Workers presidents Douglas Fraser and then Owen Bieber served on Chrysler’s board from 1980 to 1991 after Fraser’s lobbying helped Chrysler secure a government bailout in 1979-1980, and after the bailout of 2008-2009 the Chrysler and General Motors boards each included a representative of the UAW Retiree Medical Benefits Trust, which happened to have become the companies’ biggest shareholder. 5 Union and government-employee pension funds have also occasionally used their clout as shareholders to pressure managements that they see as anti-worker. And employee stock ownership plans and worker cooperatives (which got a boost from new legislation enacted this month) both give workers a say as owners.

But all of these seem quite different from the German setup, where rank-and-file workers are expected to be involved in company governance from the shop floor (or bank branch or research and development center) to the boardroom. What Warren has now proposed can be seen as a sort of very high level employee involvement program. Even if it doesn’t go anywhere (and I’m guessing it won’t, at least not any time soon), perhaps it can restart the discussion over whether we shouldn’t be encouraging other kinds of employee input too.

 

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Donner plus de pouvoirs aux salariés ?

Bonjour à toutes et à tous, Novethic propose un billet bien intéressant sur la place des salariés dans la gouvernance d’entreprise : « Donner plus de pouvoirs aux salariés pour prévenir les crises industrielles ».

 

Libérer la parole des salariés dans l’entreprise permettrait de mieux prévenir les crises environnementales et sanitaires qui mettent en danger les consommateurs, la planète et la réputation des entreprises. C’est l’avis de Philippe Martinez, numéro 1 de la CGT, qui s’exprimait le 15 janvier au micro de France Inter, à l’occasion de l’affaire Lactalis.

Donner plus de parole et de pouvoirs aux salariés au sein de l’entreprise est l’un des points abordés dans la grande réflexion en cours sur la réforme de l’entreprise dans le cadre du projet de loi Pacte . C’est ce qu’on appelle la codétermination, soit le renforcement de la présence des salariés aux conseils d’administration et de surveillance des entreprises.

De nombreux syndicats, chefs d’entreprise, universitaires et politiques se font les chantres d’une codétermination à la française, qui concernerait non plus seulement les très grandes entreprises mais aussi des grandes PME et les entreprises cotées.

 

Rappelons que la loi PACTE visant à réformer le modèle des entreprises prévoit de mieux associer les salariés aux fruits de la croissance en développant notamment des dispositifs d’épargne salariale, d’intéressement et de participation des salariés notamment dans les PME. Les salariés seront également mis en avant dans les CA. Jusque-là, dans la loi, les entreprises disposant d’un conseil d’administration, devaient nommer au moins un administrateur salarié. La loi leur en imposera désormais 2 à partir de 8 administrateurs. C’est moins ce que préconisait le rapport Notat/Senard rendu à l’hiver 2018.

 

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Projet français PACTE : effets sur le droit des sociétés

Les professeurs Alain Couret et Bruno Dondero offrent une belle tribune sur le projet de loi PACTE et ses conséquences sur le droit des sociétés : « Projet de loi PACTE : dispositions de droit des sociétés » (CMS Francis Lefebvre, juin 2018).

 

Mesure-phare : intérêt social élargi et raison d’être (article 61)

L’idée, dont on a beaucoup parlé, est de faire entrer dans le Code civil une référence aux intérêts sociaux et environnementaux (rapport Notat-Senard).

Figurera à l’article 1833 du Code civil un alinéa supplémentaire selon lequel « La société est gérée dans son intérêt social et en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ». Une référence sera aussi ajoutée aux articles L.225-35 et L.225-64 du Code de commerce, textes relatifs à la société anonyme.

Une question est celle des sanctions qui pourraient frapper une société qui ne respecterait pas cette règle. Ce ne sera pas la nullité de la société (une modification de l’article 1844-10 du Code civil est envisagée), mais ce pourrait être la nullité des actes pris par les organes sociaux dès lors que le nouvel alinéa de l’article 1833 du Code civil est une « disposition impérative ».

Il sera par ailleurs indiqué à l’article 1835 du Code civil que les statuts d’une société « peuvent préciser la raison d’être dont la société entend se doter dans la réalisation de son activité ». Cette raison d’être devra, le cas échéant, être prise en considération par le conseil d’administration ou le directoire, selon des modifications qui seront apportées au Code de commerce, là encore pour les seules sociétés anonymes. Une question qui se posera sera celle de la sanction de « l’oubli » par une société de sa raison d’être, question voisine de celle de la sanction du non-respect par une société de ses normes propres : code de bonne conduite, etc.

Retouche au régime des administrateurs représentant les salariés (article 62)

Aujourd’hui, le nombre de ces administrateurs représentant les salariés, dont la désignation est imposée aux sociétés employant plus de 1.000 salariés (en France, filiales comprises) ou plus de 5.000 salariés (en France et à l’étranger, filiales comprises) est de deux pour les conseils d’administration de plus de douze membres, et d’un administrateur représentant les salariés, lorsque le conseil comporte douze administrateurs ou moins.

Le projet de loi PACTE envisage d’imposer la désignation de deux administrateurs représentant les salariés dès lors que le conseil dépassera le seuil de huit administrateurs.

Mesures visant à favoriser le développement de l’actionnariat salarié (articles 59 et 60)

Dans les SAS, les offres d’actions adressées aux dirigeants, salariés et anciens salariés seront facilitées, tandis que dans les sociétés à capitaux publics, les dispositifs d’attribution d’actions aux salariés seront élargis.

 

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Ivan