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Avis 51-354 du personnel des ACVM « Rapport relatif au projet concernant l’information fournie sur le changement climatique »

Au Canada, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ci-après « ACVM ») ont lancé un projet d’examen de l’information fournie sur les risques et les répercussions financières associés au changement climatique pour les émetteurs le 21 mars 2017. Ce projet a porté sur les occasions et les risques liés au changement climatique ayant une incidence sur l’émetteur et sur ses activités, et non sur l’effet qu’un émetteur a, ou peut avoir, sur le changement climatique. Les objectifs du projet d’examen étaient les suivants :

  • évaluer si la législation en valeurs mobilières au Canada et les indications actuelles sont suffisantes pour permettre aux émetteurs de déterminer l’information à fournir sur le changement climatique.
  • mieux comprendre l’information sur le changement climatique dont les investisseurs ont besoin pour prendre des décisions d’investissement et de vote éclairées.
  • vérifier si l’information fournie par les émetteurs est appropriée ou non à cet égard.

Or, près d’une année plus tard, les ACVM publient le résultat du projet au travers de l’Avis 51-354 du personnel des ACVM « Rapport relatif au projet concernant l’information fournie sur le changement climatique » (ACVM, Avis 51-354 du personnel – Rapport relatif au projet concernant l’information fournie sur le changement climatique, 5 avril 2018).

L’Avis 51-354 des ACVM reprend les enseignements de 2010 en soulignant que la législation en valeurs mobilières actuelle au Canada oblige les émetteurs déposant des documents en vertu de la réglementation à y fournir certains éléments d’information sur le changement climatique si ceux-ci répondent au critère de l’importance relative[1]. Des obligations d’information relatives aux questions environnementales sont donc prévues par les principaux règlements régissant l’information continue, notamment le Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue[2], le Règlement 58-101 sur l’information concernant les pratiques en matière de gouvernance, le Règlement 52-110 sur le comité d’audit et le Règlement 52-109 sur l’attestation de l’information présentée dans les documents annuels et intermédiaires des émetteurs. En outre, l’Instruction générale 58-201 relative à la gouvernance énonce des indications sur les pratiques en matière de gouvernance[3]. Au Canada, « […] securities commissions require publicly traded companies to disclose environmental information as part of their continuous disclosure requirements »[4].

Pour l’essentiel, les obligations d’information des entreprises portent sur les risques en matière de changement climatique et sur la manière dont les entreprises gèrent les risques importants (publication des politiques environnementales essentielles aux activités des entreprises et texte du mandat de son conseil d’administration ou description de la façon dont le conseil définit son rôle et ses responsabilités, description des fonctions et des comités permanents du conseil et du texte des règles du comité d’audit). Afin de soutenir le processus d’examen, d’approbation et d’attestation, l’entreprise doit appliquer des contrôles et procédures adéquats pour présenter l’information importante, y compris celle se rapportant au changement climatique. Pour autant, la réglementation en place (qui relève de la législation en valeurs mobilières) s’avère peu visible, car intégré sous le parapluie de la divulgation environnementale[5]. L’Avis du personnel 51-354 envisage en conséquence la mise en place de nouvelles obligations d’information (en plus de l’élaboration d’indications et de mesures de sensibilisation concernant les risques d’entreprise et les occasions d’affaires ainsi que les répercussions financières possibles du changement climatique) dans les domaines suivants : l’information sur les processus de gouvernance des entreprises en ce qui concerne les risques et occasions importants, notamment la responsabilité du conseil d’administration en matière de surveillance et le rôle de la direction; et l’information sur la façon dont l’émetteur surveille la détermination, l’appréciation et la gestion des risques importants.

 

À la prochaine…


[1] Shawn H.T. Denstedt and Scott R. Miller, « Due Diligence in Disclosing Environmental Information for Securities Transactions », (1995), 33 Alta. L. Rev. 231 à la p. 240 (« Notwithstanding the lack of specificity in Canada, it is clear, in the authors’ view, that environmental issues fall under those items often referred to in securities legislation as ‘Other Material Facts’ »).

[2] Articles 1.2, 1.4 g), 1.6 de l’Annexe 51-102A1 « Rapport de gestion » et articles 5.1 paragraphe 4, 5.1 paragraphe 1 k), 5.1 paragraphe 4 et 5.2 de l’Annexe 51-102A2 « Notice annuelle ».

[3] Article 3.4 de l’Instruction générale 58-201.

[4] Mohamed Chelli, Sylvain Durocher et Anne Fortin, « Normativity in Environmental Reporting: A comparaison of Three Regimes », Journal of Business Ethics, 2018, Vol. 149, p. 285, à la p 291.

[5] TCFD Recommendations : Country Reviews, Canada, 13 juin 2017, en ligne : https://www.unpri.org/policy-and-regulation/tcfd-recommendations-country-reviews–canada/280.article

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Le projet de loi C-25 devient une loi : modifications de la LCSA

Le 24 avril 2018, le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions, la Loi canadienne sur les coopératives, la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif et la Loi sur la concurrence a reçu la sanction royale. Les choses bougent donc du côté de la Loi canadienne sur les sociétés par actions…

Certaines modifications proposées dans le projet de loi touchent en règle générale les sociétés et coopératives ayant fait appel au public :

  • l’élection d’administrateurs, le vote distinct et le vote en faveur ou contre.
  • l’utilisation du mécanisme de notification et d’accès relatifs aux documents, notamment les états financiers, requis pour les assemblées des actionnaires sans avoir besoin de demander une dispense.
  • la divulgation d’une diversité parmi les administrateurs et les membres de la haute direction.

 

Pour avoir une vision plus globale de la réforme adoptée, vous pourrez lire le résumé suivant : « Note explicative sur des modifications réglementaires proposées ».

 

Pour rappel, j’ai publié sur La Référence (éditions Yvon Blais) un article d’une vingtaine de pages commentant cette réforme :

  • Commentaire d’un projet ambitieux mais inachevé – Projet de loi C-25 visant à réformer la Loi canadienne sur les sociétés par actions (Partie 1), Repères, février 2017, EYB2017REP2136
  • Commentaire d’un projet ambitieux mais inachevé – Projet de loi C-25 visant à réformer la Loi canadienne sur les sociétés par actions (Partie 2), Repères, février 2017, EYB2017REP2137

 

Quelle était ma conclusion ?

 

Le projet de loi C-25 demeure à notre sens une initiative à saluer : il réforme le droit canadien de la gouvernance d’entreprise pour le faire entrer dans la modernité, fait écho à de nombreuses préoccupations contemporaines, tout en assurant une compatibilité des législations des valeurs mobilières et des sociétés par actions. Avec le projet de loi C-25, la corporate governance canadienne est-elle pour autant révolutionnée ? L’enthousiasme que suscite cette initiative du gouvernement canadien doit être mesuré. D’une part, les entreprises régies par les lois provinciales ou des territoires ne seront pas impactées par cette réforme, pas plus que les institutions financières incorporées en vertu de la Loi sur les banques. Pourtant, elles font face toutes les deux à des défis en termes de gouvernance. D’autre part, l’initiative fédérale s’appuie sur une prémisse qui n’est pas sans critique tant reste entière la question de savoir si l’accroissement des pouvoirs des actionnaires entraîne des changements majeurs dans la gouvernance des entreprises. Enfin, en dépit de l’avancée que représente le projet de loi C-25, le gouvernement aurait peut-être pu oser davantage sur les sujets abordés quitte à prendre un risque : consacrer une élection des administrateurs au scrutin secret, intensifier la réflexion sur une limitation de l’âge des administrateurs, améliorer les pratiques de recrutement, ou encore appuyer la promotion de la diversité sur des dispositions impératives. Certains pays l’ont fait… pourquoi pas le Canada ?

 

Il faudra suivre les règlements afférents qui seront rédigés sous peu.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Agences de conseil en vote : retour sur l’Instruction 25-201

Bonjour à toutes et à tous, je viens de publier mon dernier billet de blogue sur Contact : « Ces agences qui aident les actionnaires à voter » (22 décembre 2017). Ce billet a pour but d’expliquer ce que sont les agences en conseil de vote, de présenter les controverses dont elles sont l’objet et de décrire quelques démarches qui visent leur réglementation.

 

Quelle est ma conclusion ?

 

Au final, que penser de la position canadienne en termes d’encadrement des agences de conseil en vote? Le choix canadien de joindre les élans des États-Unis et de l’Europe en ce sens est d’abord à saluer. Le Canada ne pouvait faire cavalier seul et ne pas se pencher sur la réglementation des agences de conseil en vote, ce sujet ayant déjà fait réagir les régulateurs des plus grandes économies de la planète. En outre, cette industrie comporte d’autres enjeux. Notamment du fait que, par leurs interventions, les agences ont des effets bénéfiques7. Elles apportent un service aux investisseurs institutionnels, notamment en éclairant l’exercice de leur droit de vote, ce qui les incite à faire entendre leur voix lors des assemblées. Également, elles facilitent l’exercice du droit de vote des investisseurs, notamment par procuration, lorsque ceux-ci manquent de connaissances sur les méthodes de création de plateformes de votes ou sur la langue dans laquelle sont rédigées les résolutions de sociétés.

Bref, les agences de conseil en vote revivifient la démocratie actionnariale. Leur portée ne devait donc pas être contrecarrée à tout prix, mais bien encadrée. C’est ce qu’a fait le Canada et c’est une bonne chose. Toutefois, la position canadienne connaît de faiblesses qui mériteraient de rouvrir la discussion:

1. Le rôle restreint des acteurs des agences de conseil en vote au sein de leur industrie: En Europe, par exemple, il existe un code de bonnes pratiques qui a le mérite de conduire les agences de conseil en vote à réfléchir sur leurs modèles d’affaires pour revoir leurs pratiques.

2. L’absence d’intensité du message réglementaire s’adressant à tous les intervenants de la chaîne de détention de titres: À s’en tenir à la seule notion d’engagement, le régulateur canadien évoque peu celle des devoirs fiduciaires comparativement à la France.

3. L’absence de référence au principe «se conformer ou s’expliquer» applicable à la gouvernance d’entreprise: Cette exigence offre de la souplesse, tout en permettant aux acteurs du marché de conserver un droit de regard sur l’activité des agences de conseil en vote et de pouvoir les sanctionner.

En conclusion, en matière d’encadrement des agences de conseil en vote, le Canada a clairement avancé dans la bonne direction, mais il n’est sans doute pas arrivé au bout du chemin.

 

Je signale à mes lectrices et à mes lecteurs que ce billet est une synthèse d’un article à paraître à la Revue générale de droit d’Ottawa (volume 48 numéro 1, juin 2018) écrit avec Mme Anne Shirley LeBel et M. Francis Paradis.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Indépendance des administrateurs : le Canada consulte

Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié le 25 octobre pour commentaires le Document de consultation 52‑404 des ACVM, Approche en matière d’indépendance des administrateurs et membres du comité d’audit, qui vise à lancer un large débat sur la pertinence de l’approche des ACVM en matière d’indépendance des administrateurs et membres du comité d’audit.

 

Le document de consultation présente l’historique des principaux jalons du régime de gouvernance institué par les ACVM, expose leur approche en matière d’indépendance des administrateurs et membres du comité d’audit, décrit les approches en matière d’indépendance d’autres pays, et examine les avantages et limites de l’approche des ACVM.

« L’indépendance de jugement des conseils d’administration et de leurs comités constitue un élément fondamental de la gouvernance », a déclaré Louis Morisset, président des ACVM et président-directeur général de l’Autorité des marchés financiers. « Cette consultation a pour but de recueillir des avis sur la pertinence de notre approche en matière d’indépendance pour tous les émetteurs du marché canadien ».

 

Cliquez ici pour accéder au Document de consultation 52-404 des ACVM : Approche en matière d’indépendance des administrateurs et membres du comité d’audit

Attention, vous avez jusqu’au 25 janvier 2018 pour répondre !

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Affichage de marques de commerce en langue autre que le français : bientôt le règlement !

Bonjour à toutes et à tous, deux projets de règlements ont été déposés en mai 2016 modifiant le Règlement sur la langue du commerce et des affaires et le Règlement précisant la portée de l’expression « de façon de nettement prédominante » pour l’application de la Charte de la langue française.

Les titulaires de marques de commerce qui ont déposé une marque n’auront pas l’obligation de traduire celle-ci, ni nécessairement d’insérer un générique en français devant leurs marques. Le nouvel article 25.1 du Règlement modifiant le Règlement sur la langue du commerce et des affaires énonce que les commerçants devront simplement assurer « une présence suffisante » du français sur les lieux. Celle-ci pourra consister en un slogan, un générique, un descriptif de leurs produits et services ou tout autre terme ou mention.

Sans que l’affichage supplémentaire ait à se retrouver au même emplacement que la marque de commerce, le Règlement modifiant le Règlement précisant la portée de l’expression « de façon de nettement prédominante » pour l’application de la Charte de la langue française précise que l’affichage devra conférer au français une visibilité permanente, similaire à celle de la marque et être lisible « dans le même champ visuel » que celui visé par la marque de commerce.

Les règlements ne se placent pas en rupture avec les positions judiciaires (notamment la décision de la Cour d’appel Québec (Procureure générale) c. Magasins Best Buy ltée, 2015 QCCA 747), tout en constituant tout de même une évolution.

Selon une information du blogue des éditions Yvon Blais, les règlements devraient être adoptés tout prochainement (24 novembre ?) : « Affichage de marques de commerce en langue autre que le français : le règlement en vigueur fin novembre ».

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Ivan Tchotourian

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La LCSA en mode réforme

Le cabinet Davies propose une excellente synthèse du projet de loi visant à réformer le droit fédéral des sociétés par actions ici.

Le 28 septembre 2016, le gouvernement fédéral a déposé au Parlement le projet de loi C-25 qui vise à apporter des modifications importantes à la Loi canadienne sur les sociétés par actions (la « LCSA ») (les « modifications proposées »). Si les modifications proposées sont adoptées, les émetteurs assujettis (ainsi que les autres sociétés ayant fait appel au public et les sociétés visées par règlement, au sens de la LCSA) devront se soumettre à de nouvelles obligations inspirées des meilleures pratiques actuelles en matière de gouvernance, notamment les suivantes :

  • élection à la véritable majorité des voix exprimées : obligation pour les actionnaires de voter « pour » ou « contre » l’élection de chaque candidat à un poste d’administrateur (élimination de la possibilité de voter en bloc pour une liste de candidats proposés) et interdiction pour les candidats qui n’ont pas été élus à la majorité des voix exprimées d’occuper un poste d’administrateur, sauf dans les
    « circonstances prévues par règlement » ;
  • élections annuelles des administrateurs : obligation pour les sociétés de tenir chaque année une élection pour combler tous les postes au sein de leur conseil d’administration, éliminant ainsi la possibilité de procéder au renouvellement du conseil d’administration par tranches ; et
  • présentation de renseignements relatifs à la diversité : obligation pour les sociétés de présenter aux actionnaires des renseignements relatifs à la diversité au sein des administrateurs et au sein des membres de la haute direction à chaque assemblée générale annuelle.

 

Je vous invite à lire la synthèse de Davies pour en savoir plus !

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Ontario : de nouvelles mesures pour protéger les dénonciateurs

À la suite de la mise en œuvre du nouveau Programme de dénonciation de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) en juillet 2016, qui comprend un incitatif financier pour les dénonciateurs en Ontario, le gouvernement de l’Ontario a approuvé des modifications à la Loi sur les valeurs mobilières (Ontario) afin d’assurer une protection supplémentaire aux personnes qui signalent une violation possible des dispositions législatives ou des règlements administratifs en matière de valeurs mobilières, ou encore d’un autre instrument d’un organisme d’autoréglementation de l’Ontario. Ces modifications sont entrées en vigueur le 28 juin 2016.

Les protections supplémentaires offertes par ces modifications sont  : 1) l’interdiction d’exercer des représailles contre des dénonciateurs (la « disposition anti-représailles »); 2) l’interdiction d’établir des restrictions contractuelles contre le signalement de violations potentielles (la « disposition anti-confidentialité »).

Pour en savoir plus, vous pourrez lire ce billet (« Examen des nouvelles mesures de protection pour les dénonciateurs en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario ») sur le site Internet du cabinet Osler.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian