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La Benefit corporation adoptée en Colombie-Britannique

En voilà une nouvelle ! La province de Colombie-Britannique vient de faire place à une Benefit Corporation. Certaines modifications apportées à la Business Corporations Act de la Colombie-Britannique (la « BCBCA ») qui vont entrer en vigueur le 30 juin 2020 permettent la création d’un nouveau sous-type de société, la « société d’intérêt social » (la benefit company). La Colombie-Britannique est le premier territoire canadien à adopter ce concept qui n’est pourtant pas nouveau aux États-Unis. Pas sûr que ce choix soit heureux dans la mesure où la 3C existait déjà et qu’elle se révèle sans doute plus porteuse pour la RSE…

Pour en savoir plus : « Une première au Canada : les sociétés d’« intérêt social » arrivent en Colombie-Britannique » (Stikeman Elliott, 5 juin 2020)

Extrait :

The major distinctions between a B.C. benefit company and other B.C. companies are as follows:

  • Notice of articles: The benefit company’s notice of articles will contain the following statement (the benefit statement”):

This company is a benefit company and, as such, is committed to conducting its business in a responsible and sustainable manner and promoting one or more public benefits.

  • Articles: The benefit company’s articles must include a provision that specifies the public benefits to be promoted (benefit provision). “Public benefit” refers to something that has a positive effect that benefits (i) a class of persons other than shareholders of the company in their capacity as shareholders, or a class of communities or organizations, or (ii) the environment. The positive effect can be:
    • Artistic
    • Charitable
    • Cultural
    • Economic
    • Educational
    • Environmental
    • Literary
    • Medical
    • Religious
    • Scientific
    • Technological
  • Alterations: Any decision to adopt or eliminate the benefit statement (i.e. to alter the company’s status as a benefit company) must be approved by a special resolution of the voting shareholders. Both voting and non-voting shareholders of the benefit company are entitled to dissent rights with respect to such a change or to a change in the benefit provision.
  • Benefit report: Each year, the benefit company must prepare, provide to its shareholders and post on its website (if it has one) a report (benefit report) that assesses the company’s performance in carrying out the commitments set out in the company’s benefit provision compared to a third-party standard. The report needs to include information about the process and rationale for selecting or changing the relevant third-party standard. Regulations may be enacted that provide more details about the third-party standard and the contents of the benefit report.
  • Penalties relating to the benefit report: It will be an offence if the directors of the benefit company do not prepare and post the benefit report as required by the BCBCA and the regulations. There is a potential fine of up to $2,000 for individuals or $5,000 for persons other than individuals.
  • Augmented fiduciary duty: The directors and officers of a benefit company will be required to act honestly and in good faith with a view to conducting the business in a responsible and sustainable manner and promoting the public benefits that the company has identified in its benefit provision. They must balance that public benefits duty against their duties to the company. (There is currently no guidance with respect to achieving this balance.) However, the amendments state that the public benefits duty does not create a duty on the part of directors or officers to persons who are affected by the company’s conduct or who would be personally benefitted by it.
  • Enforcement and remedies where duty breached: Several significant provisions in the amendments relate to enforcement and remedies:
    • Shareholders are the only persons who are able to bring an action against a BCBCA benefit company’s directors and officers over an alleged violation of their duty relating to public benefits;
    • Only shareholders that, in the aggregate, hold at least 2% of the company’s issued shares may bring such an action (in the case of a public company, a $2 million shareholding, in the aggregate, will also suffice); and
    • The court may not order monetary damages in relation to a breach of that duty. Other remedies, such as removal or a direction to comply, would still be available.

À la prochaine…

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Comparons Benefit Corporation et B Corp

« Benefit Corporation : une normativité de concurrence au service de la RSE », c’est sous ce titre que Margaux Morteo et moi-même avons publié un article dans la revue en ligne Éthique publique : Ivan Tchotourian et Margaux Morteo, « Benefit Corporation : une normativité de concurrence au service de la RSE »Éthique publique [En ligne], vol. 21, n° 1 | 2019, mis en ligne le 24 septembre 2019, consulté le 13 novembre 2019 .

Nous y développons la thèse d’une normativité de concurrence.

Plan :

1. Introduction

2. Certification B Corp.

2.1. Intérêts de la certification

2.2. Procédure de certification : les trois étapes

3. Réglementation étatsunienne : présentation de la Public Benefit Corporation

3.1. Définition de bénéfices publics dans les statuts

3.2. Assouplissement des devoirs fiduciaires

3.3. Instauration d’une super-majorité

3.4. Obligation de reporting renforcée

4. Nouvelle forme d’interaction normative

4.1. Normativité de concurrence

4.2. Avantages et inconvénients des normes concurrentes

5. Conclusion

Résumé :

Les entreprises à mission sociétale (dont la fameuse Benefit Corporation américaine) constituent une innovation majeure du droit des sociétés et de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Poussée par la finance d’impact, la Benefit Corporation a la particularité de permettre à des sociétés par actions de poursuivre des fins lucratives et sociales. Cette étude s’intéresse à l’instrument normatif à la base de l’émergence de ces entreprises. Elle analyse l’interaction entre les normes pour démontrer qu’il y a hybridation autour d’une normativité originale de « concurrence ». La certification B Corp. constitue la première base normative de ces entreprises. Toutefois, le législateur américain de l’État du Delaware (mais également d’autres États américains) est venu contribuer à cette normativité en adoptant une législation consacrée à la Benefit Corporation. Cette étude met en lumière qu’en matière de Benefit Corporation, autorégulation et réglementation se concurrencent, en rupture avec l’opposition, la substitution, la supériorité ou la complémentarité entre normes traditionnellement soulignées dans la littérature.

À la prochaine…

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Publication du guide « Entreprises à mission : de la théorie à la pratique »

Le 7 novembre 2019, Citizen Capital et Deloitte ont publié le guide « Entreprises à mission : de la théorie à la pratique ».

Résumé :

Reconnue par la loi Pacte sous le nom de « société à mission », la notion d’entreprise à mission naît dans le prolongement de travaux de recherche démarrés il y a 10 ans en France, interrogeant la nature de la crise de 2008 : simple crise économique et financière ou mutation plus profonde des systèmes de gouvernance de l’entreprise ? A quoi sert l’entreprise ? A qui appartient l’entreprise ? Quel est le rôle de l’actionnaire ? Des formes d’entreprises affirmant une finalité sociale ou environnementale au cœur de leur business model émergent dans plusieurs pays contribuant à renouveler progressivement ces représentations.

À la prochaine…

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Publication sur Contact : « Où va l’entreprise ? »

Bonjour à toutes et à tous, mon nouveau billet de blogue sur Contact est arrivé : « Où s’en va l’entreprise ? » me suis-je posé comme question… Inspiré d’une conférence donnée à l’Université Toulouse Capitole 1 à la mi-novembre, je synthétise dans ce billet plusieurs évolutions récentes déjà abouties ou en marche.

 

Morceaux choisis :

 

Si l’on part de cette idée qu’une entreprise plus juste est nécessaire, comment le droit est-il en train de la construire ? Mais commençons par le commencement et posons-nous la question suivante : le droit s’intéresse-t-il à cette entreprise nouvelle ? Incontestablement oui ! Alors que jusqu’à présent, le droit des affaires consacrait des réformes essentiellement techniques (apportant des précisions sur certains aspects de leur constitution, leur fonctionnement ou leur financement), les choses changent. Leur ADN et la perception fondamentale de leur fonction primaire sont placés sous le microscope du législateur qu’il soit nord-américain ou européen. Quelles sont les caractéristiques de cette nouvelle entreprise ? Selon moi, elle est organisée autour de 4 points :

  • De nouveaux objectifs.
  • De nouvelles structures.
  • De nouvelles normes de gouvernance.
  • De nouvelles façons de rendre compte.

Bien que ces innovations ne soient pas implantées au même rythme suivant les pays, elles sont néanmoins présentes dans les discours juridiques.

Au final, le Canada peut mieux faire. Trouver la formule d’une entreprise nouvelle est sans doute complexe et ses composants difficiles à identifier, il n’en demeure pas moins qu’il faut que les juristes de droit de l’entreprise se mobilisent. L’entreprise est peut-être une chose économique, mais elle n’est plus l’inconnue du droit qu’elle a longtemps été. Son impact sur l’économie, la finance, la politique, la démocratie, la fiscalité des pays est tel qu’il ne peut en aller autrement. Le futur est devant, reste à l’écrire…

Sinon, attention qu’une autre nouvelle entreprise ne s’impose pas : une entreprise court-termiste, dominée par une logique financière, axée sur la valeur boursière, soumise un activisme d’un genre nouveau et ignorant ses parties prenantes (voire même prédatrice de ces parties prenantes).

 

À la prochaine…

Ivan

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Un projet de loi américain ambitieux : S.3348 – Accountable Capitalism Act

Bonjour à toutes et à tous, la sénatrice Élisabeth Warren vient d’introduire un projet de loi très ambitieux (!) : le S.3348 – Accountable Capitalism Act.

 

Plusieurs points saillants ressortent de ce projet :

  • La création d’un Office of United States Corporations.
  • La possibilité de s’enregistrer auprès de cet organisme fédéral (alors que jusqu’à maintenant, rappelons-le, l’enregistrement se faisait auprès des États et notamment celui du Delaware).
  • Les salariés représenteraient 40 % du CA.
  • L’entreprise devrait poursuivre une mission sociétale.
  • La redéfintion des devoirs des administrateurs et hauts-dirigeants.

 


Extrait du projet de loi

 

SEC. 5. Responsibilities of United States corporations.

(a) Definitions.—In this section:

(1) GENERAL PUBLIC BENEFIT.—The term “general public benefit” means a material positive impact on society resulting from the business and operations of a United States corporation, when taken as a whole. (…)

(1) IN GENERAL.—The charter of a large entity that is filed with the Office shall state that the entity is a United States corporation.

 

(2) CORPORATE PURPOSES.—A United States corporation shall have the purpose of creating a general public benefit, which shall be—

(A) identified in the charter of the United States corporation; and

(B) in addition to the purpose of the United States corporation under the articles of incorporation in the State in which the United States corporation is incorporated, if applicable.

(c) Standard of conduct for directors and officers.—

 

(c) Standard of conduct for directors and officers.—

(1) CONSIDERATION OF INTERESTS.—In discharging the duties of their respective positions, and in considering the best interests of a United States corporation, the board of directors, committees of the board of directors, and individual directors of a United States corporation—

 

(A) shall manage or direct the business and affairs of the United States corporation in a manner that—

(i) seeks to create a general public benefit; and

(ii) balances the pecuniary interests of the shareholders of the United States corporation with the best interests of persons that are materially affected by the conduct of the United States corporation; and

 

(B) in carrying out subparagraph (A)—

(i) shall consider the effects of any action or inaction on—

(I) the shareholders of the United States corporation;

(II) the employees and workforce of—

(aa) the United States corporation;

(bb) the subsidiaries of the United States corporation; and

(cc) the suppliers of the United States corporation;

(III) the interests of customers and subsidiaries of the United States corporation as beneficiaries of the general public benefit purpose of the United States corporation;

(IV) community and societal factors, including those of each community in which offices or facilities of the United States corporation, subsidiaries of the United States corporation, or suppliers of the United States corporation are located;

(V) the local and global environment;

(VI) the short-term and long-term interests of the United States corporation, including—

(aa) benefits that may accrue to the United States corporation from the long-term plans of the United States corporation; and

(bb) the possibility that those interests may be best served by the continued independence of the United States corporation; and

(VII) the ability of the United States corporation to accomplish the general public benefit purpose of the United States corporation;

(ii) may consider—

(I) other pertinent factors; or

(II) the interests of any other group that are identified in the articles of incorporation in the State in which the United States corporation is incorporated, if applicable; and

(iii) shall not be required to give priority to a particular interest or factor described in clause (i) or (ii) over any other interest or factor.

(2) STANDARD OF CONDUCT FOR OFFICERS.—Each officer of a United States corporation shall balance and consider the interests and factors described in paragraph (1)(B)(i) in the manner described in paragraph (1)(B)(iii) if—

(A) the officer has discretion to act with respect to a matter; and

(B) it reasonably appears to the officer that the matter may have a material effect on the creation by the United States corporation of a general public benefit identified in the charter of the United States corporation.

 

(3) EXONERATION FROM PERSONAL LIABILITY.—Except as provided in the charter of a United States corporation, neither a director nor an officer of a United States corporation may be held personally liable for monetary damages for—

(A) any action or inaction in the course of performing the duties of a director under paragraph (1) or an officer under paragraph (2), as applicable, if the director or officer was not interested with respect to the action or inaction; or

(B) the failure of the United States corporation to pursue or create a general public benefit. (…)

 

(d) Right of action.—

(1) LIMITATION ON LIABILITY OF CORPORATION.—A United States corporation shall not be liable for monetary damages under this section for any failure of the United States corporation to pursue or create a general public benefit.


 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Vient de paraître : La légitimité du pouvoir dans l’entreprise par Charles Tremblay-Potvin

Un des membres de l’équipe du blogue (M. Charles Tremblay-Potvin) vient de publier un ouvrage auprès des éditions Yvon Blais sous le titre suivant : « La légitimité du pouvoir dans l’entreprise : analyse critique de l’affaire Walmart de Jonquière ». Un ouvrage à mettre dans une bonne bibliothèque à celles et ceux s’intéressant un temps soit peu à l’entreprise et à la place du rapport salarial dans l’économie capitaliste.

 

De tous les contrats qu’un sujet de droit est habilité à conclure dans une société dite de « libre marché », seul le contrat de travail postule que l’une des parties est subordonnée à l’autre. C’est ainsi que le 27 novembre 2009, le plus puissant employeur privé de la planète se voyait reconnaître par la Cour suprême du Canada la légitimité de son pouvoir de fermer l’un de ses établissements, sans égard à la protection offerte par le Code en faveur des salariés exerçant leur liberté syndicale.

Dix ans plus tard, quel bilan peut-on dresser de cette lutte syndicale ? La culture de gouvernance de l’entreprise Walmart, pourrait-on dire, n’est au fond qu’une illustration de la profonde transformation qu’a subie l’économie mondiale au cours des dernières décennies. Les principes qui sont au coeur du mode de régulation de notre système politique et économique méritent plus que jamais d’être analysés, remis en question et critiqués. Tel est l’objectif de cet ouvrage.

La première partie du volume définit l’entreprise et isole sa dimension politique en étudiant la spécificité du rapport salarial. La deuxième partie étudie la longue guérilla judiciaire entre les salariés et les dirigeants de Walmart qui a atteint un point culminant avec la fermeture de l’établissement de Jonquière le 29 avril 2005.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Acquisition de Jean Coutu par Métro : prenons de la distance

Bonjour à toutes et à tous, éditorial intéressant : « Metro-Jean Coutu: un mariage d’adultes » (Le Devoir, 4 octobre 2017). M. Sansfaçon apporte un éclairage sur les aspects positifs de l’acquisition du Groupe Jean Coutu par Metro au coût de 4,5 milliards arrive au bon moment, mais aussi sur les aspects négatifs.

 

Cela dit, si cette transaction est la bienvenue dans le contexte actuel de la concurrence, elle n’est pas, en elle-même, un gage de succès pour l’avenir. Le marché du détail est frappé de plein fouet par la révolution Internet.

L’entente intervenue récemment entre le gouvernement Trudeau et Netflix laisse craindre le pire pour les commerçants, qui doivent affronter des multinationales étrangères comme Amazon. De plus en plus de produits vendus traditionnellement dans les pharmacies et les supermarchés sont aujourd’hui disponibles en ligne à prix inférieurs, sans frais de livraison et parfois même sans taxes.

Metro et GJC risquent de perdre rapidement des plumes si elles ne prennent pas à leur tour un virage Web approprié à leur secteur. Espérons que les gouvernements, celui d’Ottawa en particulier, sauront les appuyer en évitant à tout le moins d’accorder des privilèges fiscaux et réglementaires à tous les Netflix et Amazon de ce monde qui leur font les yeux doux.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian