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Démocratie actionnariale : bilan de l’AMF France

Bonjour à toutes et à tous, article intéressant de Les Échos.fr « Les assemblées générales à huis clos ont porté atteinte aux droits des actionnaires » (24 novembre 2020).

Extrait :

Les assemblées générales (AG) 2021 se passeront-elles dans les mêmes conditions que les précédentes ? Les actionnaires qui n’ont cessé de déplorer depuis septembre d’avoir été privés de leurs droits fondamentaux (comme de révoquer ou de nommer un administrateur en séance) aux dernières AG attendent avec impatience l’ordonnance que doit publier le gouvernement . Ce qui ne devrait plus tarder car l’effet du précédent texte prend fin le 30 novembre. Or, une AG est prévue dès le 3 décembre – celle de Bonduelle.

Dans ce contexte, les actionnaires guettaient donc la publication du rapport de l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) sur le gouvernement d’entreprise. Car ce rapport revient en détail sur la tenue des AG 2020. Le régulateur en tire « un bilan contrasté. »

À la prochaine…

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Le législateur au secours de la démocratie actionnariale

Mme Boisseau de Les Échos publie une information bien intéressante pour la démocratie actionnariale : « Assemblées générales à huis clos : l’exécutif veut préserver les droits des actionnaires » (13 novembre 2020). À quand cette réaction au Québec et au Canada ?

Extrait :

Les actionnaires ne veulent surtout pas que les assemblées générales (AG) 2021 se tiennent dans les mêmes conditions que celles de 2020 . Pris de court en mars dernier par la pandémie du coronavirus, les pouvoirs publics ont autorisé leur tenue à huis clos, pour valider les comptes annuels, nommer des administrateurs et autoriser (parfois) le versement de dividendes. Une solution qui a privé les actionnaires de certains de leurs droits fondamentaux, comme de révoquer ou de nommer un administrateur en séance.

Depuis septembre, Better Finance, la fédération européenne des épargnants, la F2IC (Fédération des investisseurs individuels et des clubs), ou encore la SFAF (Société Française des Analystes Financiers) demandent au législateur et au régulateur des marchés financiers de réfléchir à une meilleure organisation des AG. L’Autorité des Marchés Financiers (AMF), qui doit rendre public très prochainement son rapport sur le gouvernement d’entreprise, va faire des propositions. Et surtout, Bercy a rédigé un projet d’ordonnance (la précédente ordonnance prise en mars prend fin le 30 novembre) qui tient compte de certaines de ces revendications.

À la prochaine…

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Assemblée annuelle virtuelle : les ACVM prennent position

Les ACVM viennent de prendre position pour faciliter le vie des sociétés par actions canadiennes sur un sujet sensible : celui des assemblée annuelle. Pour accéder à cette prise de position : ici.

Extrait :

Compte tenu des préoccupations croissantes entourant la COVID‑19 au Canada et de la période de sollicitation de procurations actuellement en cours, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) sont conscientes que bon nombre d’émetteurs assujettis envisagent des changements ou des solutions de rechange à leurs assemblées générales annuelles (AGA) qui se tiendront en personne prochainement. En réponse aux questions ou aux préoccupations entourant de telles mesures, les ACVM donnent les indications qui suivent pour aider les émetteurs assujettis tout en veillant à ce qu’ils respectent les obligations qui leur incombent en vertu de la législation en valeurs mobilières.

Les indications s’appliquent à tous les sujets abordés lors des AGA (notamment l’élection des administrateurs et les modifications apportées aux plans incitatifs fondés sur des titres de capitaux propres).

Changement de date, d’heure ou de lieu d’une AGA tenue en personne

Selon nous, l’émetteur assujetti qui a décidé de modifier la date, l’heure ou le lieu de son AGA en personne en raison de difficultés attribuables à la COVID-19, mais qui a déjà envoyé et déposé ses documents reliés aux procurations peut en aviser les porteurs de titres sans devoir envoyer d’autres documents de sollicitation ou des documents reliés aux procurations mis à jour s’il remplit les conditions suivantes :

  • il publie un communiqué annonçant le changement de date, d’heure ou de lieu;
  • il dépose ce communiqué au moyen de SEDAR;
  • il prend toutes les mesures raisonnablement nécessaires pour informer tous les participants à l’infrastructure du vote par procuration (par exemple, les intermédiaires, les agents des transferts et les fournisseurs de services en matière de vote par procuration) du changement.

Nous nous attendons à ce que les émetteurs assujettis prennent les mesures précitées rapidement après avoir décidé de modifier la date, l’heure ou le lieu de leur AGA, et suffisamment tôt avant sa tenue pour que le marché en soit avisé en temps utile. L’émetteur assujetti n’ayant pas encore envoyé ni déposé ses documents reliés aux procurations devrait envisager d’y inclure une mention indiquant la possibilité de ce changement en raison de la COVID-19.

AGA virtuelle ou hybride

L’émetteur assujetti qui compte tenir une AGA virtuelle (soit sur Internet ou par tout autre moyen électronique plutôt qu’en personne) ou hybride (soit une assemblée en personne qui permet également une participation par des moyens électroniques) devrait en aviser rapidement ses porteurs de titres, les participants à l’infrastructure du vote par procuration et les autres participants au marché, et communiquer des indications claires au sujet des détails logistiques de cette AGA, notamment la façon dont les porteurs de titres pourront y accéder à distance, y participer et y exercer leurs droits de vote. Dans le cas de l’émetteur assujetti n’ayant pas encore envoyé ni déposé ses documents reliés aux procurations, cette information devrait y figurer. Dans le cas contraire, et s’il a suivi les mesures susmentionnées concernant l’annonce d’un changement de date, d’heure ou de lieu, il n’est pas tenu d’envoyer d’autres documents de sollicitation ni de mettre à jour ses documents reliés aux procurations uniquement pour annoncer la tenue d’une AGA virtuelle ou hybride.

Par ailleurs, les ACVM souhaitent particulièrement répondre aux questions concernant l’application de l’article 2.15 du Règlement 54-101 sur la communication avec les propriétaires véritables des titres d’un émetteur assujetti. Cet article prévoit que l’émetteur assujetti qui donne aux porteurs inscrits de ses titres avis de l’ajournement ou de modification d’une AGA doit expédier simultanément cet avis à ses propriétaires véritables.À notre avis, tout émetteur assujetti envisageant des changements ou des solutions de rechange à son AGA n’a pas à demander à être dispensé de l’application de cet article, tant que les porteurs inscrits et les propriétaires véritables sont traités sur un pied d’égalité et reçoivent la même information.

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La démocratie actionnariale: le pouvoir contesté des actionnaires

Le rôle des actionnaires semble de plus en plus contesté. Alors que certains mentionnent que les actionnaires et les administrateurs devraient être les seuls décideurs de l’entreprise , d’autres se demandent si les actionnaires représentent vraiment bien toutes les parties prenantes et si les actionnaires ont vraiment tous les outils pour prendre de « bonnes décisions » pour les employés, les consommateurs, les membres de la communauté, etc.

Dans tous les cas, pour le moment, les actionnaires tiennent dans leurs mains des pouvoirs importants principalement par le biais de leurs votes. À l’exception de quelques structures actionnariales qui émettent des actions sans droit de vote, les actionnaires détiennent habituellement des droits de vote avec chaque action qu’ils détiennent. Cette démocratie actionnariale permet, ou est censée permettre, une certaine forme de checks and balance et de reddition de compte.

Cependant, la démocratie actionnariale n’est pas au sommet de sa forme. Elle est quasi-inconnue par la plupart des particuliers et parfois utilisée par les investisseurs institutionnels comme forme d’engagement actionnarial. Peu semblent comprendre tout le pouvoir que représentent leurs votes. Dans ce balado Capitalisn’t: Shareholder vote suppression, plusieurs questions en lien avec la démocratie actionnariale est abordée avec les animateurs, mais aussi avec Rob Jackson, le commissionnaire des valeurs mobilières (Securities and Exchange Commission). Bien que le contexte de ce balado soit basé exclusivement dans un contexte américain, il y a plusieurs similarités dans le marché canadien.

L’épisode: https://review.chicagobooth.edu/public-policy/2019/article/capitalisn-t-shareholder-vote-suppression

Le site internet du balado ici : https://www.capitalisnt.com

N’hésitez pas à me faire parvenir vos questions ou certains sujets nécessitent plus d’approfondissement. C’est avec plaisir que je vous répondrais via un billet de blogue.

Bonne écoute!

Julie

Références: CEDROM-SNI (2019),  » La rémunération des dirigeants d’une entreprise ne concerne que ses actionnaires et administrateurs », dans Le Soleil [en ligne], section Opinions, 20 mars, consultée le 19 mars 2020

Le Figaro avec APP (2019), « Rémunérations des dirigeants: les actionnaires non-représentés aux CA sont plus critiques », dans Le Figaro [en ligne], section Économie, 12 avril, consultée le 19 mars 2020

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Actions multivotantes : la même question sans réponse

Sur l’un des blogues de Les affaires.com, Mme Dominique Beauchamp partage son analyse (« Le faux-débat des multivotantes et de la gouvernance ») des actions multivotantes en prenant appui sur la dernière actualité entourant Couche-Tard voulant que son dirigeant a demandé aux actionnaires de prolonger le statut des actions des fondateurs à 10 votes chacune. Elle se montre favorable à l’existence de telles actions.

Nombre de gestionnaires de portefeuilles m’ont confié au fil des ans que la meilleure façon pour eux de jauger les entreprises et leurs dirigeants est de suivre leurs paroles et leurs gestes de près, pendant une longue période, pour s’assurer qu’ils concordent. (…) Espérons aussi que les nouvelles venues en Bourse, qui ont aussi adopté la structure des actions multivotantes, tels que Entreprises Cara, Stingray, Shopify et GDI (l’ex-Groupe Distinction), s’inspireront du chemin tracé par Alimentation Couche-Tard.

Que faut-il en penser ? Voilà donc le débat du principe « une action = une voix » relancé… avait-il besoin de l’être, lui qui donne lieu à tant de littérature et de riches débats (voir pour le Québec et le Canada les très intéressantes proposition de Yvan Allaire : Actions multivotantes : quelques modestes propositions, octobre 2006) ? L’entreprise Toyota a fait la manchette tout récemment avec la création d’une catégorie d’actions destiné à faciliter l’investissement à long terme. Fin juin 2015, les actionnaires de Toyota ont adopté à une large majorité la proposition visant à émettre des actions First Series Model AA Class Shares. Ces actions ne seront vendues qu’au Japon et ne seront inscrites à la cote d’aucune bourse mais seront assorties de droits de vote. Leur prix correspondra à 120 % de celui des actions ordinaires et leurs dividendes seront versés à un taux inférieur à celui des actions ordinaires (ce taux augmentera chaque année). La société s’engage à racheter les actions au prix initial après cinq ans. Toutefois, à ce moment, les porteurs de ces actions auront le choix de convertir leurs actions en actions ordinaires à un taux de conversion qui reste à déterminer.

Historiquement, l’OCDE a rappelé en 2007 que le débat a débuté dès 1925, aux Etats-Unis, lorsque l’émission d’actions ordinaires sans droit de vote par certaines grandes sociétés a provoqué une importante vague de protestations. L’année suivante, le New York Stock-Exchanges (NYSE) prit position contre les dérogations à la règle de proportionnalité, s’appuyant sur une citation du NYSE Listed Company Manual évoquant « un engagement de longue date envers des normes exigeantes en matière de démocratie actionnariale ». Le NASDAQ et l’AMEX ont cependant opté pour des politiques différentes, concurrençant ainsi le NYSE en attirant des sociétés émettant des actions à deux catégories. Dans les années 1980, une vague de rachats contraint un nombre croissant de sociétés américaines à étudier leurs possibilités de défense et à revoir leurs structures de contrôle. La question de la proportionnalité revint alors au premier plan et le NYSE autorisa finalement ses sociétés cotées à utiliser des structures duales (OCDE – Groupe de direction sur le gouvernement d’entreprise, « Absence de proportionnalité entre propriété et contrôle : vue d’ensemble et questions à débattre », décembre 2007, p. 8-12).

Répondre à la question de la pertinence des actions multivotantes est d’autant plus délicate que la grande majorité des États n’a pas mis en place une politique d’encadrement des actions à vote multiple. Pour le Québec, le MEDAC et l’IGOPP avaient fait des recommandations lors du projet de réforme de la loi sur les compagnies en 2009. Ces deux organisations préconisaient :

  • La limitation à 4 du droit de vote associé à chaque action
  • La transition immédiate vers une structure de capital à une seule classe lorsqu’aucun membre de la famille du fondateur n’a les compétences requises pour assurer la relève
  • Qu’au moins un tiers des administrateurs soient élus par les actionnaires minoritaires

Ces recommandations n’ont toutefois pas été prises en compte lors de l’adoption de la LSAQ !


Terminant en apportant quelques statistiques récentes et comparatives en ce domaine :

1. Au Canada : En 2005, 96 entreprises (soit 6,57 %) des 1 459 sociétés inscrites au TSX affichaient un capital-actions à classe multiple

  • Action à droit de vote multiple : 37 % des sociétés avec un actionnariat concentré sont contrôlées par un actionnaire dont le pourcentage de droits de vote dépasse celui de son droit aux bénéfices. L’utilisation des actions à droit de vote double est le mécanisme le plus utilisé au Canada !
  • Action à droit de vote restreint : Entre un cinquième et un quart des entreprises canadiennes émettent des actions de ce type

2. En comparaison avec l’Union européenne : une étude menée sur 19 pays et 464 sociétés européennes cotées en bourse nous apprend que…

  • … Les dérogations au principe « une action = un vote » sont très diverses
  • … 44 % des sociétés de l’échantillon disposait de tels mécanismes

Pour en savoir plus sur l’Europe, vous pourrez lire ce papier de la professeure Viviane De Beaufort (« One Share-One Vote, the New Holy Graal? ») avec des tableaux comparatifs entre les pays européens.


À la prochaine…

Ivan Tchotourian