Gouvernance

Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit Responsabilité sociale des entreprises

Devoir des actionnaires : vraiment ?

Voilà une belle thèse dont je vous recommande la lecture, ce que moi j’ai fait ! M. Romain Dumont propose une analyse des plus pertinente sous le titre suivant : « Les devoirs de l’actionnaire » (L.G.D.J., 2022)

Résumé :

L’actionnaire n’est pas seulement titulaire de droits. Par petites touches ou à plus grands traits, la loi et la jurisprudence lui imposent des devoirs spécifiques. Le développement de ces devoirs recèle d’importantes implications pratiques, tant pour l’actionnaire que pour les autres parties prenantes et la société elle-même. D’un point de vue théorique, il constitue un important mouvement de fond à l’échelle de l’ensemble du droit des sociétés. Le présent ouvrage s’attache à systématiser ces nouveaux devoirs de l’actionnaire en distinguant les devoirs de nature financière (le financement de la société et la restructuration de la société en difficulté) et ceux de nature comportementale (l’accompagnement de la société et la vigilance à son égard). Tous ces devoirs convergent vers une plus grande implication de l’actionnaire en vue d’assurer la réussite de l’activité sociale. L’occasion est ainsi donnée de revisiter et de repenser les aspects saillants de la responsabilité de l’actionnaire : le standard du bon actionnaire, la faute détachable des prérogatives sociales, l’immixtion dans la gestion, l’autonomie de la personne morale et la responsabilité limitée. Devenant un outil judiciaire de plus en plus opératoire, le standard du bon actionnaire s’autonomise ; et il se contextualise pour tenir compte de l’influence de l’actionnaire et de l’activité menée par la société. Parallèlement, l’actionnaire continue à bénéficier, à raison de sa qualité, d’une réelle protection résultant des principes d’autonomie de la personne morale et de responsabilité limitée aux apports. Cette protection est aujourd’hui ajustée à ses devoirs. Elle devient exigeante, en ce sens qu’elle bénéficie seulement à l’actionnaire qui s’implique et exécute ses devoirs.
La figure de l’actionnaire en sort profondément transformée.

À la prochaine…

Divulgation divulgation extra-financière Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit

Reporting extra-financier, AMF et ESMA

En matière de reporting extra-financier, l’AMF encourage les sociétés cotées à mettre en oeuvre les recommandations de l’ESMA (ici). Le communiqué de presse du 8 novembre 2023 est clair :

Pour le reporting extra-financier, les superviseurs européens se sont accordés cette année sur trois grandes priorités de supervision communes :

  • priorité 1 : les informations à fournir en application de l’article 8 du règlement Taxonomie. L’ESMA rappelle que les sociétés doivent analyser l’alignement de leurs activités sur les différents objectifs de la taxonomie pour lesquels des critères d’examen sont définis et préciser, le cas échéant, comment le double comptage a été évité. Une analyse des plans de dépenses d’investissement (CapEx) liés au développement des activités durables est par ailleurs nécessaire pour rendre compte des efforts de transition des sociétés. L’ESMA insiste également sur l’utilisation fidèle des nouveaux modèles de tableaux de reporting et sur l’importance des informations contextuelles qui accompagnent les indicateurs clés de performance (ICP) en matière de taxonomie (transparence accrue sur la méthodologie d’analyse, sur les plans CapEx, sur les éléments de variations des indicateurs, etc.). Enfin, après un rappel des prochaines obligations de reporting taxonomie applicables à compter du 1er janvier 2024, l’ESMA encourage fortement les sociétés à se référer aux foires aux questions (FAQ) de la Commission européenne sur l’interprétation et la mise en œuvre des obligations Taxonomie.
  • priorité 2 : les enjeux liés à la publication d’objectifs relatifs au climat, et en particulier les objectifs de réduction de gaz à effet de serre (GES) et les objectifs soutenant les trajectoires de transition. Il est important pour l’ESMA que les émetteurs communiquent des objectifs climatiques assortis d’échéances, en précisant les conséquences attendues pour l’entreprise et son environnement et les liens avec d’autres objectifs publics ou fixés par l’entreprise (par exemple, le lien avec l’objectif de 1,5°C de réchauffement climatique planétaire pour les objectifs de réduction des GES). L’ESMA insiste également sur le lien avec la stratégie globale de l’entreprise, les actions plus spécifiques mises en place pour atteindre ces cibles et leur financement (par exemple, les leviers de décarbonation pour réduire les émissions de GES). L’ESMA appelle aussi à une transparence accrue sur la méthodologie et les hypothèses retenues pour fixer ces objectifs (par exemple, préciser les périmètres (scopes) d’émissions de GES couverts). Enfin, il est essentiel que les émetteurs décrivent les progrès accomplis dans la réalisation de ces objectifs et expliquent comment ces derniers sont suivis et revus.
  • priorité 3 : la publication des émissions de gaz à effet de serre indirectes de scope 3. Compte-tenu de l’importance de ce poste d’émissions chez certaines sociétés et de la prise en compte par les investisseurs de cette information dans leurs décisions en matière d’investissement durable, l’ESMA rappelle certains aspects importants en termes de transparence : l’appréciation du caractère complet du reporting des émissions de GES en cas d’absence du scope 3, le périmètre et la méthodologie de calcul des émissions de scope 3, la présentation des données brutes d’émissions de GES séparément des émissions séquestrées ou compensées le cas échéant. L’ESMA porte une attention particulière au libellé d’indicateur de scope 3 qui doit pouvoir refléter son caractère partiel en cas d’exclusions significatives par rapport à la méthodologie de reporting suivie.

A l’instar des années précédentes, l’AMF encourage les sociétés cotées établissant une déclaration de performance extra-financière et celles redevables d’un reporting taxonomie à appliquer ces recommandations.

L’ESMA a également souhaité sensibiliser les émetteurs sur la nécessité de se préparer à l’entrée en vigueur le 1er janvier 2024 de la directive sur le reporting de durabilité (Corparate sustainability reporting directive ou CSRD) sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises. L’ESMA indique la mise en place par l’EFRAG d’une plateforme dédiée aux questions techniques en vue de faciliter l’application des normes européennes d’information en matière de durabilité (« normes ESRS »).

À la prochaine…

engagement et activisme actionnarial Gouvernance Responsabilité sociale des entreprises

Say on climate : position de l’ANSA

L’Association nationale des sociétés par actions (ANSA) a publié sa position sur le retrait du projet de loi sur le say on climate. Elle est intéressante (ici) et je la reproduis ci-dessous :

Comme indiqué dans une précédente brève (v. Brève ANSA, Climat et durabilité : un amendement adopté dans le cadre des discussions sur le projet de loi Industrie Verte introduirait de nouvelles obligations pesant sur les émetteurs, n° 23-BR21), un amendement (n°483 et 571) introduisant un article 18 bis au projet de loi Industrie Verte avait été adopté le 21 juillet 2023, contre l’avis de la commission et du Gouvernement lors des débats à l’Assemblée nationale.

Pour mémoire, cet amendement visait à introduire des nouvelles obligations pour les sociétés « admises aux négociations sur un marché réglementé » : pour le conseil d’administration, l’obligation d’établir une stratégie climat et durabilité qu’il devait soumettre à l’approbation, à titre consultatif, de l’AGO des actionnaires tous les trois ans et lors de chaque modification importante de cette politique et celle d’établir un rapport annuel sur la mise en œuvre de la stratégie climat et durabilité, lequel faisait également l’objet d’un projet de résolution soumis à titre consultatif chaque année à l’approbation de AGO des actionnaires. Le conseil devait en outre prendre en considération le résultat du vote à titre consultatif.

Cet article 18 bis inclus dans le projet de loi qui devait être soumis à examen par la Commission mixte paritaire (CMP) lors de sa séance du 9 octobre 2023 a été supprimé. En amont de la CMP en effet, Monsieur le Député Guillaume Kasbarian (Renaissance) et Monsieur le Sénateur Laurent Somon (Les Républicains), rapporteurs du texte, se sont mis d’accord pour faire retirer l’amendement du texte final.

L’ANSA reconnait la sagesse du législateur qui n’a pas souhaité ajouter une charge supplémentaire aux entreprises cotées sur le marché national alors que la transition climatique est déjà une de leurs priorités, totalement intégrée à leur stratégie et qui figure en bonne place dans les sujets évoqués avec les actionnaires, avant la tenue de l’AG ou au cours de celle-ci. Et on peut compter sur l’information exigée par la directive CSRD pour donner le niveau d’information précis attendu par toutes les parties prenantes.

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Gouvernance Normes d'encadrement

CA, formation et dialogue

Intéressant entrevue sur Radio-Canada qui souligne l’importance du dilaogue et de la formation pour les CA : « Le dialogue et la formation continue, les clés de la saine gouvernance d’un organisme » (20 octobre 2023).

Résumé :

La gouvernance d’un organisme est une grande responsabilité pour un conseil d’administration (C. A.), rappelle Benoît Hubert, président et propriétaire de PGF Consultants. En cette saison des assemblées générales annuelles pour plusieurs organismes franco-manitobains, et alors que des questions de procédure ont été soulevées lors de la nomination d’une nouvelle direction générale à Envol 91 FM, M. Hubert souligne l’importance du dialogue et de la formation.

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Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit normes de marché

Canada : Integrating sustainability goals across the investment industry

Très beau rapport concernant le Canada pour améliorer le cadre juridique dans l’industrie de l’investissement en vue de favoriser la durabilité : « A Legal Framework for Impact – Integrating Sustainibility Goal accross the Investment Industry ». RSE et finance sont de plus en plus intrinsèquement liés…

  • Pour télécharger le rapport, cliquez ici

Résumé :

Ce rapport soutient que des changements politiques sont nécessaires pour que les investisseurs puissent contribuer pleinement à la durabilité environnementale et sociale à long terme du Canada. Les auteurs examinent les aspects pertinents du cadre juridique et réglementaire canadien et identifient les domaines dans lesquels davantage de clarté et d’orientations sont nécessaires. Ils recommandent ensuite des réformes qui permettraient aux investisseurs de prendre en compte les risques liés à la durabilité et de poursuivre des objectifs d’impact sur la durabilité, en particulier lorsque ceux-ci sont pertinents pour les rendements financiers. Leurs propositions comprennent des modifications des obligations légales – en raison de la complexité du cadre juridique canadien, ils ne formulent des recommandations que pour les fonds de pension. D’autres recommandations de ce document s’appliquent à tous les investisseurs institutionnels.

Merci à L’initiative canadienne de droit climatique de cette nouvelle !

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Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit Responsabilité sociale des entreprises

Entreprises, solidarité et durabilité : le temps du droit

Durabilité et solidarité devraient être traduits dans le droit des entreprises et des affaires, tel est le message de la professeure Sjåfjell sur SSRN : Sjåfjell, Beate, Solidarity, Sustainability and the Role of Business, 29 juillet 2023, University of Oslo Faculty of Law Research Paper No. 2023-04, Forthcoming in Research Handbook on International Solidarity Law (Edward Elgar 2024).

Résumé :

This chapter positions the debate on a UN declaration on the right to international solidarity within a research-based concept of sustainability and in light of the urgent need to regulate business for sustainability.

Solidarity is an inextricable element of sustainability as a goal and of a sustainable development – a development that brings us towards sustainability. With the current focus on financial and corporate risks of climate change and, more recently, of biodiversity loss, discussing the role of business through a solidarity lens brings the social aspects of sustainability more to the forefront.

I suggest that the principle of solidarity in international law, as reflected in the Revised draft declaration on human rights and international solidarity, should be broadened to fully encompass intersectionality and to include interspecies solidarity. I also propose that core elements of sustainability should be taken as legal concepts in the regulation of business, to realise the crucial potential of business to sustainability, including solidarity.

Drawing on a decade of collaborative research through international research projects, I indicate how reforms of law could facilitate sustainable business, and the importance of solidarity and its proper relevance for business – and the significance of business for international solidarity. I conclude the chapter with reflections on the potential and hope for change.

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Divulgation divulgation extra-financière Gouvernance Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises

Grrenwashing : le cas Barrick Gold

L’importance de l’information touchant les données non financières (notamment de nature environnementales) est soulignée dans cet article de Le Devoir : « Action collective contre Barrick Gold pour fausses représentations environnementales » (14 janvier 2023).

Extrait :

M. Nseir a entrepris les démarches pour intenter l’action collective, invoquant le fait que Barrick Gold avait faussement affirmé que le projet Pascua-Lama respectait les règles environnementales. Ces propos trompeurs avaient eu, selon lui, un effet positif sur le prix de l’action, jusqu’à ce que le marché encaisse le coup de la nouvelle du non-respect des conditions et que la valeur de l’action chute.

Il réclame ainsi des dommages — d’une somme non encore précisée — pour chacun des investisseurs qui, comme lui, ont perdu de l’argent.

La minière soutient avoir rempli ses obligations légales de divulgation et ajoute que, bien qu’il manquât certaines composantes au système de gestion des eaux, cela n’affectait pas son efficacité et respectait les normes environnementales.

La Cour d’appel a jugé que l’action de M. Nseir avait des chances de succès et qu’elle n’avait pas à être écartée à cette étape, car elle n’est ni frivole ni manifestement mal fondée.

À la prochaine…