La raison d’être des entreprises couronne l’actionnaire actif

Bonjour à toutes et à tous, Arnaud Marion et Valérie Ohannessian offrent une analyse intéressante faisant le lien entre actionnariat actif et raison d’être de l’entreprise : « La raison d’être des entreprises couronne l’actionnaire actif » (Les Échos.fr, 4 septembre 2019). Un prétexte de plus de revenir sur la loi PACTE.

Extrait :

Or, si la loi PACTE du 22 mai dernier comme la deuxième directive européenne SRD (Shareholders rights directive) du 10 juin musclent ses droits, c’est pour mieux lui donner les moyens d’exercer son rôle fondamental. Pas seulement comme gardien du temple mais aussi comme édificateur de ses colonnes et de l’ouverture de ses portes à la Société. 

L’actionnaire est ainsi placé au coeur d’une nouvelle approche téléologique de l’entreprise. En introduisant dans le code civil la notion de raison d’être et sa possible inscription statutaire, le législateur français confie à l’actionnaire la responsabilité suprême de définir la finalité de l’entreprise et d’en surveiller la mise en oeuvre conforme et durable. Il en fait l’inspirateur créatif de son sens profond, le promoteur d’une gouvernance respectueuse de ses valeurs et missions, l’animateur attentif de ses parties prenantes et l’arbitre ultime de son modèle d’affaires. 

L’actionnaire devient celui qui donne du sens mais il comprend aussi qu’il a le pouvoir de sanctionner, de dire non, et donc d’influer sur les valeurs de l’entreprise. La directive SRD précise bien que la politique de rémunération des administrateurs (« say on pay ») devra « contribuer aux intérêts et à la pérennité à long terme de l’entreprise ». Le membres des conseils d’administration et de surveillance sont appelés à être les garants exigeants du contrat entre sa société et la Société faute d’ailleurs de courrir le risque de ne pas être renouvelés. 

L’actionnaire passif ne rend finalement pas service à l’entreprise. Les fonds dits activistes, au-delà des caricatures, ont fait figure de précurseurs dans la demande de prise en compte par les directions générales de leurs souhaits d’actionnaires, certains pour de simples raisons de profits à court terme, d’autres avec une vision de création de valeur par rapport à des concurrents comparables. 

Ni passif, ni nécessairement activiste, l’actionnaire d’aujourd’hui est encouragé à être actif dans la co-construction de l’entreprise comme communauté de destin. Certains y verront une nécessité morale et le triomphe du Bien commun. Mais la logique économique est toujours là, tirée par l’attente des consommateurs et la sanction des marchés, impatients de faire émerger un nouvel actif immatériel, créateur de valeur(s) pour tous… 

À la prochaine…

Ce contenu a été mis à jour le 28 novembre 2019 à 16 h 47 min.

Commentaires

1 commentaires pour “La raison d’être des entreprises couronne l’actionnaire actif”

Jean Sidoni

5 septembre 2019 à 12 h 45 min

Merci pout le partage de cet article, qui montre une volonté affichée de certains dirigeants de considérer le contrat de société sous le prisme d’un solidarisme contractuel qui semble tout juste découvert. Ce positionnement appelle deux observations.

D’abord, un euphémisme, le manque de compétence juridique des dirigeants, insusceptibles d’assimiler pleinement et maîtriser le Droit applicable à leur entreprise. En effet, annoncer une Directive européenne SRD au 10 juin, échéance de transposition (déjà effectuée en partie dans de nombreux Etats membres, dont la France avec la loi PACTE) démontre l’incapacité totale des professionnels de la gestion, quel que soit leur niveau ou leur parcours, à maîtriser le Droit applicable comme son articulation.

Ensuite, cette absence de maîtrise confirme certes la nécessité de renforcer les droits des actionnaires mais surtout, qu’ils s’en saisissent! L’articulation entre soft law et hard law en matière de gouvernance permet une évolution bien plus rapide, faisant fi de la lourdeur du processus législatif, donc plus efficace.

Enfin, cela appelle surtout à bien plus encore de pédagogie. Pour reprendre les mots de Boileau : « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire viennent aisément « 

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