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normes de droit rémunération

Ratio de rémunération : le dispositif entrera en vigueur en juin 2018

Le ratio de rémunération entrera en vigueur pour les entreprises britanniques à compter de juin 2018 selon The Guardian : « Companies must reveal pay disparity between boss and workers ».

 

Companies that are publicly listed in the UK will be obliged to publish the pay ratio between their chief executive and their average British worker under government plans.

Businesses that are publicly listed in UK will be obliged to publish data as part of shakeup of corporate governance

The proposals, which will be announced on Tuesday and will come into force by next June, will also aim to give workers a voice at boardroom level. But the plans fall short of the corporate governance revolution promised last year by Theresa May.

 

Précision toutefois : contrairement à ce qui était initialement annoncé (il était question d’obliger les entreprises britanniques), le dispositif juridique sera de type « comply or explain ».

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

engagement et activisme actionnarial Gouvernance Normes d'encadrement Valeur actionnariale vs. sociétale

Nos étudiants publient : pourquoi un contrôle effectif de l’entreprise par l’actionnaire ? (par Éric Brault)

Le séminaire à la maîtrise de Gouvernance de l’entreprise (DRT-7022) dispensé à la Faculté de droit de l’Université Laval entend apporter aux étudiants une réflexion originale sur les liens entre la sphère économico-juridique, la gouvernance des entreprises et les enjeux sociétaux actuels. Le séminaire s’interroge sur le contenu des normes de gouvernance et leur pertinence dans un contexte de profonds questionnements des modèles économique et financier. Dans le cadre de ce séminaire, il est proposé aux étudiants depuis l’hiver 2014 d’avoir une expérience originale de publication de leurs travaux de recherche qui ont porté sur des sujets d’actualité de gouvernance d’entreprise. C’est dans cette optique que s’inscrit cette publication qui utilise un format original de diffusion : le billet de blogue. Cette publication numérique entend contribuer au partager des connaissances à une large échelle (provinciale, fédérale et internationale). Le présent billet est une fiche de lecture réalisée par M. Éric Brault. Ce dernier porte une réflexion sur la légitimité du contrôle des actionnaires et revient sur l’étude « The Essential Unity of Shareholders and the Myth of Investor Short-Termism » du professeur George W. Dent. Je vous en souhaite bonne lecture et suis certain que vous prendrez autant de plaisir à le lire que j’ai pu en prendre à le corriger.

Ivan Tchotourian

 

Le texte The Essential Unity of Shareholders and the Myth of Investor Short-Termism de George W Dent Jr. s’inscrit dans un débat éternel plaçant face-à-face actionnaires et administrateurs. L’auteur fait l’apologie du contrôle effectif de l’entreprise par les actionnaires[1].

 

Mise en perspective

L’argumentaire du professeur Dent découle d’abord d’une réflexion qu’il fait sur le système de gouvernance des entreprises américaines. Pour lui, le niveau de contrôle exercé par les conseils d’administration d’entreprises ouvertes américaines est trop important, en rapport au peu de contrôle effectif détenu par les actionnaires. Cette situation ouvre la porte à un conseil d’administration qui se permet de prendre des décisions qui ne cadrent pas avec les intérêts des actionnaires, engendrant ainsi une perte d’intérêt de la part des investisseurs envers les entreprises publiques américaines. La solution serait alors de permettre aux actionnaires (ceux ayant l’intérêt le plus marqué dans la réussite de l’entreprise) d’obtenir un plus grand contrôle de cette dernière. Cette solution est toutefois diamétralement opposée à ceux qui défendent le pouvoir détenu par les administrateurs et qui cherchent à limiter le pouvoir actionnarial et, conséquemment, l’influence des investisseurs institutionnels. L’article du professeur Dent s’inscrit comme réponse aux partisans d’un maintien du statu quo qui cherchent à limiter le contrôle détenu par les actionnaires.

 

Des actionnaires légitimés

L’auteur pose comme hypothèse de départ que les intérêts des actionnaires n’entrent pas en conflits, mais convergent plutôt vers un but unique : la maximisation de la valeur de l’action qu’ils détiennent. Afin de le démontrer, ce dernier isole d’abord les principales prémisses servant à la construction des arguments des disciples de la théorie voulant un contrôle actionnarial plus faible[2]. Il déconstruit ensuite chacune de ces prémisses afin de démontrer les failles dans l’argumentaire évoqué. Pour terminer, il dresse un portrait de la situation actuelle où la prise de décision effective est contrôlée par les administrateurs qui sont eux-mêmes souvent soumis à l’influence du P.-D.G. Le professeur Dent démontre que les différentes tentatives règlementaires voulant donner aux conseils d’administration une plus grande indépendance n’ont pas permis d’aligner correctement les intérêts des actionnaires et des administrateurs.

 

Déconstruire

La première des prémisses déconstruites par le professeur Dent concerne l’ignorance de l’actionnaire. D’après les adhérents du statu quo, l’actionnaire n’a pas assez de connaissances concernant l’entreprise et ses projets afin de faire un choix éclairé et conséquemment, ses choix risquent de faire diminuer la valeur des actions. Le professeur Dent démontre aisément les failles de l’argument.  Il explique, entre autres, que les votes des actionnaires touchent principalement les « Règles du jeu »[3] et non les enjeux opérationnels. Il n’est donc pas nécessaire de comprendre en profondeur l’élément opérationnel de l’entreprise afin de prendre une décision favorable à la maximisation de sa valeur.

La seconde des prémisses déconstruite par le professeur Dent est celle de la présence de conflits d’intérêts chez les actionnaires et entre actionnaires qui peuvent mener à une priorisation de certains projets ou secteurs d’activités nuisibles à la santé financière de l’entreprise. Un conflit d’intérêts au niveau de l’actionnariat peut s’exprimer de multiples façons et l’auteur s’attarde sur cinq situations[4]. L’auteur pose ensuite deux constats afin de démontrer la non-importance des conflits d’intérêts évoqués. D’abord, le conflit ne concerne souvent que quelques actionnaires qui sont loin d’être en mesure d’obtenir la majorité nécessaire à la poursuite de leurs agendas respectifs et, ces différents agendas sont souvent contradictoires. Deuxièmement, une étude sur litiges dans les conseils d’administration démontre que ceux-ci ne sont pas causés par des conflits entre actionnaires plutôt par des luttes pour le pouvoir entre administrateurs[5].

La troisième prémisse déconstruite par le professeur Dent est celle des investisseurs détenant des actions à court terme et cherchant un rendement rapide au détriment des gains et de la stabilité à long terme. Cette préoccupation cadre avec une présence accrue des fonds d’investissement alternatifs[6] qui ont tendance à détenir des actions moins longtemps que les investisseurs traditionnels. Pourtant, l’auteur explique qu’il n’y a pas de preuves empiriques qui démontrent que les pressions provenant des actionnaires détenteurs d’actions à court terme produisent des effets nocifs à long terme.

 

Conclusion

Par son texte, le professeur Dent parvient à démontrer que les intérêts des actionnaires convergents vers l’unique but de maximiser la valeur des actions de l’entreprise. Il exprime toutefois certaines retenues sachant qu’aucun système n’est parfait. Le contrôle effectif par les actionnaires peut laisser place à la prise de décisions allant à l’encontre du but établi ci-dessus. Mais, l’objectif est de permettre l’amélioration du système actuel qui laisse le contrôle effectif de l’entreprise entre les mains du conseil d’administration et des dirigeants ce qui permet une dissociation entre les intérêts de ces derniers et ceux des actionnaires. Toutefois, l’auteur ne démontre pas comment s’effectuerait ce contrôle plus effectif de l’actionnaire. Il existe par exemple déjà dans certains pays certaines mesures comme le Say-on-Pay qui augmentent ce contrôle. Est-ce « la » solution ?

 

Éric Brault

Étudiant du cours de Gouvernance de l’entreprise – DRT-7022


[1] G. W. DENT Jr, « The Essential Unity of Shareholders and the Myth of Investor Short-Termism », Delaware Journal of Corporate Law, 2010, Vol. 35, p. 97.

[2] Dans le texte, l’auteur fait effectivement référence à une théorie : « Corporate managers as well as their operatives and camp followers constructed a theory that shareholder control would not serve the national interest in economic efficiency; indeed it would not serve the interests of shareholders themselves » (p. 99 de l’article du professeur Dent).

[3] Le professeur Dent utilise le terme « Rules-of-the-game » (p. 133 de l’article du professeur Dent).

[4] Ces cinq conflits d’intérêt sont : employé mais également actionnaire; actionnaire ayant un mandat politique externe; actionnaire ayant des intérêts financiers dans une autre entreprise partenaire (problématique de l’auto-négociation); actionnaire n’ayant plus d’intérêts dans l’entreprise lors du vote; et actionnaire ayant un intérêt financier dans un compétiteur.

[5] Anup AGRAWAL et Mark A. CHEN, « Boardroom Brawls: An Empirical Analysis of Disputes Involving Directors », EFA 2008 Athens Meetings Paper, 1er juillet 2008, 1.

[6] Yvan ALLAIRE, « La démocratie et le droit de vote des actionnaires », dans Propos de gouvernance…et autres. Montréal, Presse Forstrat International, 2007, p. 95 et s.

 

engagement et activisme actionnarial Gouvernance normes de droit

Capital-actions à classe multiple au moment d’une IPO : le « Yes we can » de Bernard Sharfman

Dans l’Oxford Business Law Blog, Bernard Sharfman revient sur la création de multiples classes actions notamment au moment de la première entrée en bourse d’une entreprise pour en souligner… tous les points positifs : « How Dual Class Shares in IPOs Can Create Value » (25 août 2017).

 

Une conclusion qui ne laisse guère place aux doutes :

 

The shareholder empowerment movement (the ‘movement’), driven primarily by public pension funds and union-related funds with over $3 billion in assets, has renewed its effort to eliminate, restrict, or at least discourage companies from creating dual class share structures in initial public offerings (IPOs). The impetus was the issuance of non-voting stock in the recent Snap Inc. IPO. Such advocacy, if successful, would not be trivial, as many of our most valuable and dynamic companies, including Alphabet (Google) and Facebook, have gone public by offering shares with unequal voting rights.

The movement’s vigorous response to Snap Inc.’s hugely successful IPO was unsurprising. The Council of Institutional Investors (CII), the trade organization that has represented the movement since its founding in 1985, has promoted as a bedrock principle a ‘one share, one vote’ policy. Dual class share structures clearly violate this policy and are an obvious threat to the power of the movement. That is, a public company that provides control to insiders through a dual class share structure can more easily resist the demands of the movement.

In my paper, ‘A Private Ordering Defense of a Company’s Right to Use Dual Class Share Structures in IPOs’, I rely on Zohar Goshen and Richard Squire’s newly proposed ‘principal-cost theory’ to argue that dual class shares in IPOs is a value enhancing result of private ordering, making the movement’s renewed advocacy unwarranted.

 

Récemment, dans un article publié sur le blogue Contact de l’Université Laval (« Snapchat et le capital-actions à classe multiple », 8 mars 2017), j’ai soulevé les doutes sur ce genre de structuration du capital sans toutefois pleinement exclure la pertinence de créer plusieurs catégories d’actions.

 

Les questions sont donc nombreuses et justifient que les analystes soient réservés. L’effet Snap Inc. sera-t-il durable? Les actionnaires qui ont investi leur argent en acceptant les risques vont-ils être gagnants? Je ne parierais pas ma chemise là-dessus…

Il y a une certitude dans ce monde d’incertitude: le capital-actions à classe multiple a un bel avenir, encore plus lorsqu’il est utilisé de manière innovante et que des investisseurs acceptent le jeu. Tous les doutes sur la légitimité d’aménager la structure de capital d’une entreprise ne sont pas levés, même si le cas Snap Inc. démontre que les investisseurs (du moins certains) ne sont pas si attachés à la démocratie actionnariale et que le capital-actions à classe multiple peut servir des intérêts court-termistes.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Normes d'encadrement rémunération Valeur actionnariale vs. sociétale

The role of executive pay in promoting responsible business

Dans Lexology, RPC propose une synthèse intéressante qui rappelle une évidence : la rémunération des hauts-dirigeants a un rôle à jouer dans la pérennité à long-terme des entrepris. Un article synthétique à lire qui revient sur le projet de réforme britannique de gouvernance d’entreprise : « The role of executive pay in promoting responsible business » (24 mars 2017).

 

Executive pay is a thorny issue. Well-structured remuneration packages can help to ensure that companies are run responsibly for the benefit of shareholders, employees, customers, and wider society. However, when improperly designed, executive pay packages can encourage short-term and risky behaviour which dents public confidence in business.

(…)

The ultimate aim for businesses is to attract and retain top talent whilst ensuring that those individuals are motivated to achieve sustainable, long-term value creation for the company. Where there is a perception that ever more generous remuneration packages are necessary in order to achieve those objectives, we are unlikely to see any reversal in current pay trends, with or without reform.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

engagement et activisme actionnarial Gouvernance rémunération

Repenser la rémunération des hauts-dirigeants : le temps ?

Bel article de TM. hierry Aimar dans Le Monde.fr : « Patrons trop payés : « Les petits porteurs sont les plus susceptibles de faire acte d’opposition » » (6 juin 2017).

A partir de quels critères les actionnaires vont-ils juger de la légitimité d’une rémunération ? S’agit-il de vérifier, à l’aide de cabinets spécialisés, la transparence et la qualité des informations transmises à l’assemblée générale par les conseils d’administration ? De s’assurer que la distribution des revenus correspond bien aux critères définis dans les contrats ? Sur ce terrain, la loi Sapin 2 ne peut aller que dans le bon sens, celui d’une plus grande démocratie actionnariale. Mais elle pourrait être aussi l’occasion de proposer des critères nouveaux, susceptibles d’éclairer les actionnaires sur la légitimité des rémunérations. Non en termes de niveau, mais de structure. La question n’est évidemment pas de savoir si les dirigeants des grandes firmes doivent se contenter d’un simple salaire. Je vous laisse découvrir la suite…

 

Dans une tribune au « Monde », l’économiste Thierry Aimar estime que les assemblées générales d’actionnaires devraient profiter de la loi Sapin 2 pour proposer une refonte du mode de rémunération des dirigeants d’entreprises cotées.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit normes de marché Nouvelles diverses

Nos étudiants publient : des liens entre RSE et gouvernance d’entreprise par Cynthia Williams (billet de Karine Morin)

Le séminaire à la maîtrise de Gouvernance de l’entreprise (DRT-7022) dispensé à la Faculté de droit de l’Université Laval entend apporter aux étudiants une réflexion originale sur les liens entre la sphère économico-juridique, la gouvernance des entreprises et les enjeux sociétaux actuels. Le séminaire s’interroge sur le contenu des normes de gouvernance et leur pertinence dans un contexte de profonds questionnements des modèles économique et financier. Dans le cadre de ce séminaire, il est proposé aux étudiants depuis l’hiver 2014 d’avoir une expérience originale de publication de leurs travaux de recherche qui ont porté sur des sujets d’actualité de gouvernance d’entreprise. C’est dans cette optique que s’inscrit cette publication qui utilise un format original de diffusion : le billet de blogue. Cette publication numérique entend contribuer au partager des connaissances à une large échelle (provinciale, fédérale et internationale). Le présent billet est une fiche de lecture réalisée par Mme Karine Morin à l’automne 2016. Cette dernière analyse les liens entre RSE et gouvernance d’entreprise et revient sur l’étude « Corporate Social Responsibility and Corporate Governance » de la professeure Cynthia A. Williams. Je vous en souhaite bonne lecture et suis certain que vous prendrez autant de plaisir à le lire que j’ai pu en prendre à le corriger.

Ivan Tchotourian

 

Signalant d’emblée l’intérêt grandissant que suscite la responsabilité sociétale des entreprises (ci-après « RSE »), Cynthia A. Williams s’est penchée dans son texte « Corporate Social Responsibility and Corporate Governance »[1] sur son importance en matière de gouvernance d’entreprise.

 

Une position discrète des États-Unis

De premier abord, la professeure Williams relève la contemporanéité de certaines pratiques auxquelles les entreprises se soumettent volontairement. L’une d’entre elles (la divulgation extra-financière) est présentée comme le signe indéniable d’une mutation dans les pratiques de bonne gouvernance. Le foisonnement de cette divulgation a permis de développer une conceptualisation de standards transnationaux de ce que doit constituer une démarche de RSE, et ce, pour chaque type d’industries. En ce sens, la firme KPMG argue que, pour de nombreuses entreprises, cette RSE ne relève pas d’une obligation morale mais d’une gestion efficiente des opportunités et des risques[2]. Cette conclusion rejoint d’ailleurs la conception prônée par plusieurs auteurs[3]. Des instruments multilatéraux ont aussi été développés et renforces par les organisations internationales afin d’encourager les États à promouvoir l’adoption de comportements responsables de la part des entreprises établies sur leur territoire[4].

Certaines législations contraignent les administrateurs et les dirigeants d’entreprises à un minimum d’effort en matière de RSE en matière de droit du travail, de droit environnemental, de droit de la consommation, ou encore dans le cadre de la lutte contre les discrimination ou la corruption. L’obligation de divulgation a été la principale mesure avancée par les autorités étatiques qui ont tranché pour une action législative orientée vers une plus grande prise en compte de la RSE[5]. Sept marchés boursiers ont emboîté le pas en exigeant des entreprises désirant transiger sur leur marché une divulgation extra-financière[6]. Soulignant l’inaction des États-Unis à ce chapitre, la professeure Williams recense tout de même certaines interventions législatives qui tendent vers un encadrement plus marqué des entreprises.

 

Des critiques à relativiser

Malgré le consensus mondial qui semble se dessiner sur le rôle que doivent exercer les entreprises quant aux impératifs sociétaux, la professeure Williams n’omet pas de signaler les critiques qui sont formulées à la RSE. Premièrement, la question de la rentabilité des investissements liés à la RSE demeure une question à laquelle il est encore difficile de répondre. L’auteure soutient que ses résultats contradictoires sont principalement liés à trois facteurs : des objets de recherche divergents; des variables intermédiaires qui, jusqu’à tout récemment, n’étaient pas suffisamment décomposées; et des données dont la qualité n’est pas satisfaisante. La professeure Williams conclut sur ce point que les études sont maintenant beaucoup plus fiables et mieux ciblées. L’idée d’une rentabilisation des investissements en matière de RSE commence à être établie[7]. La professeure Williams démontre à l’aide de plusieurs études empiriques que les deux variables intermédiaires à considérer sont l’innovation et la confiance[8]. Deuxièmement, si la mise sur pied d’un comité du CA dont le mandat serait spécifiquement lié aux questions touchant à la RSE est une avenue possible, la professeur Williams précise que les données empiriques recueillies jusqu’à présent ne permettent pas d’arriver à une unanimité sur sa pertinence[9]. Évoquant le fait que certains actionnaires institutionnels accordent de plus en plus d’attention à l’orientation organisationnelle que prend le CA à l’égard de la RSE, la professeure Williams décèle un lien entre composition de l’actionnariat et orientations stratégiques des entreprises au niveau social[10]. Elle souligne enfin le lien existant entre l’origine des traditions juridiques de différents pays avec leurs stratégies juridiques en matière de RSE[11].

 

Une solution ?

La dernière partie du texte de Cynthia Williams ramène le débat au fameux dilemme entre la maximisation de la valeur actionnariale et la prise en compte des intérêts des parties prenantes. Énumérant les différents arguments avancés par de nombreux auteurs sur chacune de ces positions, elle dénoue l’impasse tout en réconciliant ces deux approches : le système le plus efficient devrait encourager les administrateurs et les dirigeants à agir de façon éthique dans une perspective long-termiste qui sera profitable tant aux actionnaires actuels que futurs, tout en prônant une gestion positive du personnel, de la recherche et du développement, des relations avec les fournisseurs et du capital naturel. N’est-ce donc pas ainsi que devrait se décrire le management de demain ?

 

Karine Morin

Étudiante du cours de Gouvernance de l’entreprise – DRT-7022

Titulaire du baccalauréat en droit, Faculté de droit, Université Laval


[1] Cynthia A. Williams, « Corporate Social Responsibility and Corporate Governance », Osgoode Legal Studies Researdch Paper No. 32/2015.

[2] KPMG, The KPMG Survey of CR reporting, 2013, à la p. 11.

[3] Abagail McWilliams et Donald S. Siegel, Creating and Capturing Value: Strategic Corporate Social Responsibility, Resource-Based Theory, and Sustainable Competitive Advantage, 37 J. OF MANGMT. 1480 (2011); Michael E. Porter et Mark R. Kramer, Strategy and Society: The Link between Competitive Advantage and Corporate Social Responsibility, HARV. BUS. REV. 78 (DEC. 2006).

[4] OCDE, Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, 2011; ISO, ISO 26000 :2010 Ligne directrices relatives à la responsabilité sociétale, 2010; ONU, Global Compact; ONU, Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme, 2011.

[5] Initiative for Responsible Investment, Corporate Social Responsibility Disclosure Efforts by National Governments and Stock Exchanges (March, 12, 2015).

[6] Initiative for Responsible Investment, Corporate Social Responsibility Disclosure Efforts by National Governments and Stock Exchanges (March, 12, 2015).

[7] Marc Orlitzky, Frank L. Schmidt et Sara L. Rynes, Corporate Social and Financial Performance: A Meta-Analysis, 24 ORG. STUD. 403 (2003); Hao Liang et Luc Renneboog, Law and Finance: The Foundations of Corporate Social Responsibility, Tilburg University Center for Economic Research, European Corporate Governance Institute (ECGI) Finance Working Paper No. 394/2013 (Jan. 2014); Robert G. Eccles, Ioannis Ioannou et George Serafeim, The Impact of Corporate Sustainability on Organizational Processes and Performance, 60:11 MNGMT. SCIENCE 2835 (2014).

[8] Gordon L. Clark, Andreas Feiner et Michael Viehs, From the Stockholder to the Stakeholder: How Sustainability Can Drive Financial Outperformance (2015); Caroline Flammer et Pratima Bansal, Does Long-Term Orientation Create Value? Evidence from a Regression Discontinuity (2014); Caroline Flammer et Aleksandra Kacperczk, The Impact of Stakeholder Orientation on Innovation: Evidence from a Natural Experiment (2014); Jordi Surroca, Josep A. Tribó et Sandra Waddock, Corporate Responsibility and Financial Performance: The Role of Intangible Resources, 31 STRAT.MNGMT. J. 463 (2010); Timothy M. Devinney, Is the Socially Responsible Corporation a Myth? The Good, the Bad and the Ugly of Corporate Social Responsibility, ACAD.MNGMT. PERSP. 44 (MAY 2009); American Bar Association, Other Constituency Statutes: Potential for Confusion, 45:4 BUS. LAW. 2253 (1990).

[9] Christine A. Mallin, Giovanna Michelon et Davide Raggi, Monitoring Intensity and Stakeholders’ Orientation: How Does Governance Affect Social and Environmental Disclosure?, 114(1) J. OF BUS. ETHICS 29 (2013); Judith A. Walls, Pascual Berrone et Philip H. Phan, Corporate Governance and Environmental Performance: Is there Really a Link?, 33 STRAT.MNGMT. J. 885 (2012); Jordi Surroca et Josep A. Tribó, Managerial Entrenchment and Corporate Social Performance, 35 (5-6) J. OF BUS. FIN. & ACCTNG. 748 (2008).

[10] William W. Bratton et Michael L. Wachter, Shareholders and Social Welfare, 36 SEATTLE L. REV. 489 (2013); Robert M. Daines, Ian D. Gow et David F. Larcker, Rating the Ratings: How Good are Corporate Governance Ratings, 98 J. FINAN. ECON. 439 (2010); Donald O. Neubaum et Shaker A. Zahra, Institutional Ownership and Corporate Social Performance: the Moderating Effects of Investment Horizon, Activism, and Coordination, 32:1 J. MNGMT. 108 (2006); Richard A. Johnson et Daniel W. Greening, The Effects of Corporate Governance and Institutional Investor Types on Corporate Social Performance, 42:5 ACAD.MNGMT. J. 564 (1999).

[11] Hao Liang et Luc Renneboog, Law and Finance: The Foundations of Corporate Social Responsibility, Tilburg University Center for Economic Research, European Corporate Governance Institute (ECGI) Finance Working Paper No. 394/2013 (Jan. 2014); Céline Gainet, Exploring the Impact of legal Systems and Financial Structures on CSR, 95 J. BUS. ETHICS 195, 197 (2010); Rafael la Porta, Florencio Lopez-de-Silanes et Andrei Shleifer, The Economic Consequences of Legal Origins, 46 J. ECON. LIT. 285 (2008).

engagement et activisme actionnarial Gouvernance Structures juridiques

Actions à droit de vote multiple : est-ce payant ?

M. Gérard Bérubé revient sur la thématique des actions à droit de vote multiple dans une chronique publiée récemment et intitulée : « La présence de multivotes ne paie pas » (Le Devoir, 24 juin 2017).

 

La présence d’actions à vote multiple n’ajoute rien à la performance boursière à long terme de l’entreprise, ni ne la plombe. Leur contribution est davantage qualitative.

Le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires a relevé une étude réalisée par le Council of Institutionnal Investors avec l’aide d’un professeur de l’Université de Miami. Cette organisation américaine vouée à la bonne gouvernance des entreprises a analysé les données de 1762 entreprises américaines inscrites en Bourse composant l’Indice Russell 3000 pour déterminer s’il y avait corrélation entre la présence d’actions à vote multiple et la performance à long terme de l’entreprise sous forme de rendement sur le capital investi

(…) Sur le plan qualitatif toutefois, ces actions sont effectivement reconnues pour apporter une vision à plus long terme, pour éloigner les prises de contrôle hostiles et autres tentatives d’investisseurs prédateurs ; pour décourager les assauts spéculatifs d’actionnaires activistes n’ayant pour objectif que la valorisation à court terme de l’actionnaire, sans autre préoccupation pour les autres parties prenantes ; et pour pérenniser la contribution du fondateur ou d’un membre de sa famille dont la compétence serait, faut-il le présumer, reconnue pour assurer la relève.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian