actualités canadiennes | Page 6

actualités canadiennes Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit

Capital-actions à classe multiple : commentaire de COGECO

Dans Le Devoir, M. Gérard Bérubé offre une belle analyse du capital-actions à classe multiple pour laquelle il se montre enthousiaste en s’appuyant sur le cas de COGECO : « Sauver nos fleurons » (21 novembre 2020).

Extrait :

Québec peut, certes, envoyer un message clair proclamant la non-disponibilité de nos fleurons clés aux intérêts hors Québec, comme il l’a fait avec Cogeco, mais l’expérience de Rona est venue démontrer la portée limitée du geste. Lors de son premier essai, en 2012, Lowe’s avait
reçu le message clair du gouvernement libéral qu’il n’était pas le bienvenu à la tête de Rona. En 2016, près de quatre ans et un autre essai plus tard, le géant américain a remis cela avec une offre 65 % plus élevée que les actionnaires de Rona ne pouvaient, cette fois, refuser.

Et il restera toujours la taille des sommes en jeu, pouvant rendre difficile d’ériger une position de blocage.

Pour reprendre la position de l’Institut sur la gouvernance (IGOPP), la meilleure protection sera toujours celle de l’actionnariat de contrôle et les structures d’actions à droit de vote multiples. Y greffer une stratégie gouvernementale face aux entreprises à impact systémique dans le respect de cette réalité voulant que le Québec abrite, grosso modo, trois fois plus de prédateurs que de proies viendra renforcer la résistance. Mais la présence de grands investisseurs institutionnels, tels les fonds fiscalisés et la Caisse de dépôt, capables à leur échelle d’accompagner leurs interventions de « clauses québécoises » ou d’orchestrer une position de blocage, est devenue incontournable.

Et François Dauphin, p.-d.g. de l’IGOPP, d’évoquer qu’une dynamique de renouvellement, voire d’élargissement, du portefeuille de « fleurons » au Québec ne peut qu’ajouter à la vitalité.

À la prochaine…

actualités canadiennes Gouvernance normes de droit

Droit de parole en assemblée : le MÉDAC mécontent

Sous le titre suivant « Droit de parole verbal des actionnaires aux assemblées annuelles des sociétés par actions », le MÉDAC a partagé son expérience des dernières assemblées annuelles et son désarroi…

Je reproduis la lettre ci-dessous :

Montréal, vendredi le 30 octobre 2020

Éric Girard, ministre des Finances
390, boulevard Charest Est, 8e étage
Québec (Québec)  G1K 3H4

Chrystia Freeland, ministre des Finances
90, rue Elgin
Ottawa (Ontario)  K1A 0G5

Madame Freeland, Monsieur Girard, ministres des Finances,

La pandémie frappe le monde entier et il n’est pas possible de savoir quand le régime d’exception actuel prendra fin. Aussi, dans les circonstances, les assemblées annuelles des sociétés par actions, dont toutes les plus grandes, ont lieu virtuellement.

La tenue de pareilles assemblées virtuelles constitue une solution logique aux problèmes engendrés par la rigueur des consignes sanitaires de l’État. Cependant, les principes qui devraient encadrer ces assemblées ne sont pas respectés. Nous en témoignons. Calquer la pratique étasunienne ne suffit certes pas.

L’assemblée annuelle d’une société constitue le socle de sa légitimité quant à la délégation du contrôle de ses affaires aux administrateurs, par les actionnaires. Il en est ainsi depuis plusieurs centaines d’années. L’assemblée annuelle réunit les actionnaires. C’est leur assemblée à eux. Ceux-ci devraient pouvoir y prendre la parole verbalement, sur chaque point à l’ordre du jour. C’était du moins la pratique auparavant.

Les assemblées virtuelles devraient avoir pour objectif de reproduire, le plus fidèlement possible, l’ensemble des caractéristiques essentielles des véritables assemblées en personne, notamment le droit de parole verbal des actionnaires, en priorité.

Or, lors des assemblées virtuelles de cette année, de manière très générale, le droit de parole verbal a été refusé aux actionnaires. Nous le déplorons vivement.

Les Lois et les règlements devraient rendre ce droit de parole verbal explicite, comme il l’est dans la coutume, tel que confirmé dans la jurisprudence et repris par la doctrine. Le déni actuel de ce droit dans la pratique constitue un précédent inacceptable. Il faut agir.

Il s’agit là d’un seul problème parmi tous les autres qui doivent être réglés au sujet des assemblées virtuelles. C’est cependant le problème le plus important, à la source de plusieurs autres. Nous ne sommes pas seuls à penser cela. Par conséquent, nous vous invitons tous les deux à intervenir formellement pour régler la situation.

Nous demeurons bien évidemment disponibles pour discuter du détail de nos positions sur cette question (comme sur plusieurs autres), déjà communiquées à l’Autorité des marchés financiers (AMF), par ailleurs.

Prière d’agréer, Madame la ministre, Monsieur le ministre, notre considération cordiale.

actualités canadiennes Divulgation divulgation extra-financière Normes d'encadrement Responsabilité sociale des entreprises

CFA Institute : document de consultation

CFA Institute a proposé des standards en matière de divulgation des critères ESG dans les produits financiers : « Consulter Paper on the Development of the CFA Institute – ESG Disclosure Standards For Investments Products » (août 2020).

  • Pour un article de presse : ici

Petit extrait :

  • Disclosure Requirements Many of the Standard’s requirements will be related to disclosures. Disclosure requirements are a key way to provide transparency and comparability for investors. A disclosure requirement is simply a means of ensuring that asset managers communicate certain information to investors. There are different ways that disclosures might be required, both in terms of scope and method. Therefore, it is necessary to establish principles to ensure the disclosure requirements meet the purpose of the Standard. We propose the following design principles:
  • Disclosure requirements should focus on relevant, useful information. Disclosures must provide information that will help investors better understand investment products, make comparisons, and choose among alternatives. • Disclosure requirements should focus primarily on ESG-related features. Because the goal of the Standard is to enable greater transparency and comparability of investment products with ESG-related features, the Standard’s disclosure requirements should focus on these features. Focusing the disclosure requirements on ESG-related features also avoids adding unnecessarily to an asset manager’s disclosure burden.
  • Disclosure requirements should allow asset managers the flexibility to make the required disclosure in the clearest possible manner given the nature of the product. Disclosure requirements can easily be reformulated as questions. There are two types of questions—open-ended and closed-ended. Open-ended questions ask who, what, why, where, when, or how. Closed-ended questions require answers in a specific form—either yes/no or selected from a predefined list. The open-ended disclosure requirement format provides the flexibility needed for the Standard to be relevant on a global scale and to pertain to all types of investment products with ESG-related features. The open-ended nature of the disclosure requirements, however, must be balanced to a certain degree with a standardization of responses for the sake of comparison by investors. The forthcoming Exposure Draft will include examples of openended and standardized disclosures.
  • The disclosure requirements should aim to elicit a moderate level of detail. An investment product’s disclosures should accurately and adequately represent the policies and procedures that govern the design and implementation of the investment product. The Standard’s disclosure requirements can be thought of as a step between a database search and a due diligence conversation. The disclosures will provide more detail than can be standardized and presented in a database but less detail than the information one can obtain through a full due diligence process.
  • The disclosure requirements should prioritize content over format. The disclosure requirements will focus on what information is disclosed rather than how it is disclosed. The Standard will provide a certain degree of flexibility in the format for information presentation. Providing latitude in the format is intended to reduce an asset manager’s disclosure burden and allow for harmonization with disclosures required by regulatory bodies and other standards. The Exposure Draft will offer examples of presentation formats. • Disclosure requirements should be categorized as “general” or “feature-specific”. The Standard will have both general and feature-specific disclosure requirements. General disclosure requirements will apply to all investment products that seek to comply with the Standard. Feature-specific disclosure requirements will apply only to investment products that have a specific ESG-related feature.
  • The Standard should include disclosure recommendations in addition to requirements. We anticipate that in addition to the Standard’s required disclosures, the Standard will have recommended disclosures as well. Required disclosures represent the minimum information that must be disclosed in order to comply with the Standard. Recommended disclosures provide additional information that investors may find helpful in their decision making. Recommended disclosures are encouraged but not mandatory.

À la prochaine…

actualités canadiennes Base documentaire Divulgation divulgation financière loi et réglementation normes de droit

COVID-19 : importance de l’information financière

Me Laure Levine du cabinet Stikeman Elliott publie un billet éclairant sur la manière dont les grandes entreprises doivent divulguer l’information financière : « L’importance de l’information financière au temps de la COVID-19 » (24 juillet 2020).

Extrait :

Les ACVM ont publié une déclaration de soutien à la déclaration sur l’importance de fournir de l’information relative à la COVID-19 (la « déclaration de l’OICV ») de l’Organisation internationale des commissions de valeurs (l’« OICV ») du 29 mai 2020, qui rappelle aux émetteurs l’importance de communiquer une information financière de grande qualité aux investisseurs. Les ACVM renvoient également les émetteurs assujettis canadiens à leur présentation du 6 mai 2020 – COVID-19 : Les obligations d’information continue des émetteurs et leurs enjeux (la « présentation des ACVM »), qui décrit un certain nombre d’importants enjeux en lien avec la communication de l’information financière des émetteurs, y compris le rapport de gestion et les déclarations de changement important.

Dans sa déclaration, l’OICV reconnaît l’incidence considérable de la COVID-19 sur l’information publiée dans les états financiers des sociétés ouvertes à travers le monde et observe que les émetteurs vont devoir porter des jugements et faire des estimations importants dont le niveau d’incertitude sera plus élevé que d’habitude. Elle rappelle aux émetteurs l’importance d’avoir de l’information exacte pour faire des estimations et porter des jugements éclairés, compte tenu des répercussions de la pandémie de COVID-19 et de l’aide ou du soutien gouvernemental dont les émetteurs peuvent se prévaloir. (…).

Les émetteurs devraient également essayer d’adapter l’information donnée à propos de la COVID-19 à leur propre situation. Comme nous l’avons observé dans le passé, les formules toutes faites ou le modèle de communication universel de l’information ne suffiront généralement pas à décrire les incidences réelles ou éventuelles de la COVID-19 sur les activités de l’émetteur. Surtout, malgré les nombreuses répercussions de la COVID-19, les exigences de fond et de forme liées aux obligations d’information continue canadiennes demeurent les mêmes. Par conséquent, les effets de la COVID-19 se feront sentir sur certaines obligations d’information existantes.

Rapport de gestion

Dans son rapport de gestion, l’émetteur doit s’efforcer d’expliquer ce qui suit :

  • Les répercussions réelles ou éventuelles de la COVID-19 sur ses résultats financiers, sa situation financière et ses flux de trésorerie. Il faut examiner les incidences de la COVID-19 sur les politiques de dividendes, le coût des immobilisations, ainsi que la capacité à recouvrer les comptes débiteurs et à s’acquitter des comptes fournisseurs et des autres obligations contractuelles, notamment les facilités de crédit et les passifs liés aux baux, entre autres.
  • La manière dont il a changé sa stratégie afin d’endiguer les effets de la COVID-19. Il devrait mettre à jour ou retirer l’information prospective communiquée antérieurement afin de rendre compte de son changement de stratégie. Il devrait se demander s’il existe un fondement valable à l’information prospective communiquée antérieurement et quelles ont été les incidences de la COVID-19 sur ses perspectives globales en lien avec ses activités et sa situation de trésorerie à court et à long terme.
  • Les mesures qu’il a prises afin d’atténuer les incidences de la pandémie sur son entreprise.

La présentation des ACVM rappelle aux émetteurs que le rapport de gestion est censé être un exposé de leurs résultats financiers du point de vue de la direction et met en évidence quatre principaux points d’intérêt dont ils doivent traiter dans leur rapport de gestion en lien avec la COVID-19 (…).

Information financière

Les ACVM reconnaissent que les émetteurs établissent leurs états financiers avec de l’information possiblement imparfaite, dans un contexte évolutif et incertain. Les émetteurs devraient formuler des jugements éclairés en fonction de la meilleure information disponible. À mesure que de nouvelles données émergent, il faut se demander s’il est nécessaire de mettre à jour les jugements et estimations ou l’information passée.

Les émetteurs doivent se rappeler des indications données dans l’Avis 52-306 du personnel des ACVM (révisé), Mesures financières non conformes aux PCGR, particulièrement au moment de décrire une perte ou une dépense comme étant non récurrente, rare ou inhabituelle lorsqu’une perte semblable est raisonnablement susceptible de se produire au cours d’une période de deux exercices. En outre, les ACVM considèrent qu’il serait trompeur de qualifier un ajustement comme étant relié à la COVID-19 si la direction n’explique pas de quelle façon ce montant y était expressément associé.

Déclarations de changement important

Finalement, la présentation des ACVM donne des indications sur les situations dans lesquelles la COVID-19 pourrait déclencher la production d’une déclaration de changement important. Même si une incidence égale sur l’ensemble d’un secteur d’activité ne constitue probablement pas un changement important, les incidences propres à l’émetteur pourraient nécessiter le dépôt d’une déclaration de changement important. Voici des exemples d’information potentiellement importante découlant de la COVID-19 énumérés dans la présentation des ACVM :

  • Perturbation importante du personnel ou des activités d’exploitation de l’émetteur.
  • Retards ou perturbations dans la chaîne d’approvisionnement.
  • Hausse du coût des produits ou des services.

À la prochaine…

actualités canadiennes Gouvernance normes de droit

Vers une réforme du droit financier en Ontario ? Capital Markets Modernisation Taskforce (CMMT)

Bonjour à toutes et à tous, voici une belle information pour celles et ceux intéressés par les problématiques de gouvernance et de droit des marchés. La province de l’Ontario a mis en place un groupe de travail pour envisager des réformes à l’encadrement réglementaire. 70 propositions ont été faites et la consultation sur celles-ci est ouverte jusqu’en septembre 2020 : « Capital Markets Modernisation Taskforce ».

Voici un résumé des principales pistes explorées… vraiment intéressant !

Extrait :

The CMMT was formed in February 2020 and reports directly to the Minister of Finance. It was tasked to develop “bold, innovative recommendations” to improve how capital markets function in Canada. 

Twelve of the drafted proposals specifically target shareholder voting and company transparency, with the taskforce identifying an “imbalance” among Canada’s proxy and shareholder voting systems. Several stakeholders raised concerns to the CMMT about the influence of proxy advisors, errors in their reports and potential conflicts of interests where voting recommendations and consulting services were provided to the same businesses.  

To remedy this, the CMMT proposes establishing a new regulatory framework that would provide companies with the right to ‘rebut’ reports from proxy advisors. In addition, the taskforce also hopes to restrict conflicts of interest by limiting the services proxy advisors can offer. 

Several of the other proposals are aimed at reforming and improving the proxy plumbing. For instance, currently in Canada, the majority of shareholder votes are cast via proxies using either the company’s or dissident’s proxy ballot. Unfortunately, this means such proxy cards can look different and often confuse investors. 

Therefore, the CMMT proposes the use of universal proxy ballots to improve standardisation and mandate voting disclosure for each side when a dispute arises.  

At the same time, the taskforce has also proposed introducing rules to prevent over-voting and the requirement for companies listed on the Toronto Stock Exchange to have an annual shareholder votes on executive compensation. In further efforts to improve corporate governance standards, the taskforce proposes further legislative guidance be made around the role of independent directors in a bid to avoid conflicts of interest from arising, arguing that current laws do not fully address the role such directors play. 

Elsewhere, the taskforce wants to reduce the ownership threshold for early warning reporting disclosure in Canadian companies from 10% to 5%. This would bring Canada in line with other major markets, with the CMMT also acknowledging that a shareholder can currently requisition a meeting with a holding of as little as 5%.  

In a bid to improve transparency, the CMMT is also proposing the adoption of quarterly filing requirements for institutional investors of Canadian companies and – in a very encouraging step – the introduction of enhanced disclosure of material ESG information. 

With stronger ESG reporting, Canada would be following in the footsteps of other jurisdictions and create a level playing field for its companies. In particular the taskforce identified the metrics used by the Sustainability Accounting Standards Board (SASB) and Taskforce on Climate-related Financial Disclosures (TCFD) as potential solutions.  

Other CMMT’s recommendations include giving regulators new and enhanced powers when dealing with listed entities. For instance, the taskforce has proposed empowering the Ontario Securities Commission (OSC) to issue no-action letters. This already happens in the US where a company can seek a no-action letter from the Securities and Exchange Commission when it has the basis to exclude a particular shareholder proposal. 

The CMMT has also proposed the introduction of broader remedies for the OSC when dealing with mergers and acquisitions. The taskforce proposes granting the OSC similar powers to those recently granted to the British Columbia Securities Commission, which can now rescind a transaction, require a person to dispose of securities in connection with a deal or even prohibit them from exercising voting rights.

À la prochaine…

actualités canadiennes Nouvelles diverses objectifs de l'entreprise Publications publications de l'équipe

Sociétés d’État à vocation commerciale du Québec et Covid-19

La crise sanitaire à laquelle le monde entier assiste depuis le début de l’année continue d’avoir des conséquences à grande échelle. Au-delà du secteur sanitaire, l’économie mondiale est bouleversée. Cette réalité contraint les États à penser au soutien de l’économie et au renflouement des pertes énormes des derniers mois. À cette fin, les sociétés publiques du Québec demeurent un allié important, car elles jouent un rôle essentiel dans l’exécution des objectifs stratégiques du gouvernement. La pandémie a (re) mis en valeur le rôle du secteur public dans la protection des vies[1].

Le gouvernement n’a pas ménagé ses efforts pour minimiser les dégâts de la pandémie. Il a décidé du maintien des activités des entreprises désignées comme essentielles, concernant aussi bien les entreprises privées  (pharmacies, entreprises de production alimentaire…) que celles de propriété étatique (Société des Alcools et de cannabis, Hydro-Québec, hôpitaux, services de police, etc..).  .

Au Québec, comment le gouvernement pourvoit et accompagne les entreprises ?  Dans la ville de Montréal par exemple, les entreprises privées ou d’économie sociale ont récemment bénéficié d’un soutien financier d’urgence  du gouvernement[2], d’un report des moratoires (taxes et dettes), et un plan de relance est globalement annoncé. Le soutien technique et le virage au numérique se fera avec le concours de certaines OBNL.

En ce qui concerne les sociétés d’État à vocation commerciales – qui sont particulières par leur double objectif commercial et d’intérêt public -, on s’interroge sur les mesures prises les incluant pour faire face au coronavirus. L’incontournable question de la bonne gouvernance se pose, mais sous un prisme totalement différent. L’État-actionnaire est attendu au niveau du soutien des entreprises du secteur privé et public, et au niveau de son efficacité à répondre aux besoins des citoyens en temps de crise. Il n’est pas ici question de convoquer ou de remettre en question les règles de gestion ou de fonctionnement des entreprises publiques, ni leur contrôle. Il s’agit plutôt de visualiser dans quelles mesures ces instruments de l’État se sont montrées contributrices à la gestion de la crise sanitaire ou au soutien de l’économie en souffrance. La société d’État a des objectifs commerciaux et d’intérêt public. C’est sous ces deux axes que nous tenterons de visualiser l’impact de la COVID-19 sur ces entreprises de propriété gouvernementale.

Plus ou moins de ventes…

Une chose est sure, les revenus habituellement générés par les sociétés d’État seront loin des prévisions annuelles. De l’avis de Julien Arsenault, les sociétés d’État seront beaucoup moins « généreuses » pour les coffres du Québec en ces temps de crise. Les cas d’Hydro-Québec, de la SAQ (Société des Alcools du Québec) et de Loto Québec sont parlants. La société de distribution de l’énergie affiche un taux de consommation en baisse de 4,45%[3] depuis le 13 mars dernier. Certains syndicats ont demandé la suspension des factures d’Hydro-Québec.[4].

Les dividendes habituellement versées (4,6 milliards en 2017 selon le rapport de l’Institut sur la Gouvernance d’Organisations Privées et Publiques et 4.8 milliards pour l’année financière en cours) est, selon Marie-Soleil Tremblay, « non-négligeable ». Joint au téléphone par le journaliste, la professeure à l’Ecole nationale d’administration publique recommande aux entreprises publiques d’effectuer des mises à jour sur leurs prévisions afin de mieux estimer l’impact de leurs budgets révisés sur les finances publiques.

Mais la crise a des effets contraires. Certaines sociétés comme la SAQ et Loto Québec ne sont pas autant concernées par la baisse des ventes. Dans son article, Julien Arsenault mentionne que la SAQ serait à même de reverser davantage que le 1.2 milliard prévu.

Quoiqu’il en soit, le secteur économique perd de son équilibre. Les dirigeants des sociétés d’État ont opté pour la prudence dans leur sorties, car il pour l’instant difficile d’évaluer les pertes réelles d’une crise qui sévit encore. Chaque entreprise ira de sa propre stratégie pour se prémunir contre des résultats trop négatifs.

Mais un soutien infaillible pour la continuité de l’État

Pour les sociétés d’État, tout n’est pourtant pas qu’une question de chiffres, leur essence réside aussi dans leur contribution à fournir au public des solutions, comme c’est le cas en cas de crise sanito-financière. A ce titre, la Caisse de dépôt et de placement du Québec a répondu présente, en annonçant pour sa part un soutien d’une valeur de 4 milliards, apporté aux entreprises affectées sous certaines conditions[5]. En sus, Québec a mis en place un plan de relance. Ce projet, appuyé par la Banque Nationale, consiste en la création d’un fonds de capital-actions pour stimuler le redémarrage économique après la crise[6].

Plus tôt en avril 2020, le gouvernement avait dévoilé par l’intermédiaire de son premier Ministre François Legault, puis des ministres des finances et de l’économie, que la société d’Etat Investissement Québec était prête à soutenir les entreprises.

Quoique tous les secteurs ne puissent en l’état actuel de la crise être soutenus par le gouvernement du Québec, il faut observer que malgré les critiques (notamment les montants alloués et les conditions d’admissibilité), les sociétés d’État semblent faire bonne figure dans la gestion de la crise. Par les incitations à consommer local, par le soutien logistique pour les entreprises développant le service à distance, et par les prêts à taux d’intérêt réduits, l’État plie mais ne rompt pas la continuité de la vie économique au Québec.

Globalement, le ministre Girard a indiqué que le gouvernement du Québec aura accordé 11 milliards en aide aux individus et aux entreprises, ce qui équivaut à 2,5% de son PIB. Néanmoins, du côté des politiques, certains observateurs ont soulevé la facilité excessive du gouvernement à se servir de la finance publique pour gérer une crise mal maitrisée.


[1] Vitor Gaspar, Paulo Medas, John Ralyea, Les entreprises publiques à l’ère de la COVID-19, Fonds Monétaire International, 7 Mai 2020.

[2] « COVID-19 : Mesures en soutien aux entreprises montréalaises », via www.montréal.ca, consulté le 13 Juillet 2020. Les petites et moyennes entreprises du Québec seront admissibles à recevoir un soutien financier d’un montant inférieur à 50.000 $, cette aide est accordée sous forme de prêt au taux d’intérêt de 3%.

[3] Julien Arsenault, « Des sociétés d’Etat moins généreuses pour les coffres du Québec », dans La Presse Canadienne, 12 Juillet 2020, www.ledroit.com.

[4] Caroline Plante, « Québec annonce un plan d’urgence de 2,5 milliards », dans La Presse Canadienne, 19 Mars 2020.

[5] Les conditions évoquées sont liées à la rentabilité des entreprises avant la crise, le montant du soutien requis supérieur ou égal à 5millions, et la justification d’un potentiel de croissance intéressant.

[6] François Desjardins, « Québec mettra 100 millions dans un fonds pour les PME », dans Le Devoir, du 12 juillet 2020, www.ledevoir.com.

actualités canadiennes Base documentaire doctrine Gouvernance mission et composition du conseil d'administration normes de droit Responsabilité sociale des entreprises

Sociétés fermées et diversité au Canada : que dit le droit ?

Sympathique petit billet de Me Lapierre du cabinet TJD sur une question simple : « Est-ce qu’une société fermée a l’obligation d’avoir un certain nombre d’administrateurs et de dirigeants issus de la diversité? ».

Extrait :

Non. Les sociétés par actions à capital fermé régies par la Loi sur les sociétés par actions et par la Loi canadienne sur les sociétés par actions n’ont pas de règles particulières à suivre en matière de diversification des membres composant le conseil d’administration et la haute direction.

Un important mouvement de diversification des administrateurs et dirigeants d’entreprises de divers secteurs a cependant vu le jour au cours des dernières années. Plusieurs sociétés canadiennes, qu’elles soient ou non des émetteurs assujettis, ont adopté, dans le cadre de ce mouvement, des politiques internes afin de promouvoir la diversité au sein de leur entreprise.

Le 1er janvier 2020, la Loi canadienne sur les sociétés par actions a par ailleurs été modifiée afin d’imposer aux sociétés fédérales ayant fait un appel public à l’épargne et aux émetteurs émergents de divulguer à leurs actionnaires des renseignements sur la diversité au sein de leur conseil d’administration et de la haute direction. La représentation relative de quatre groupes désignés soit les femmes, les autochtones (Premières nations, Inuit et Métis), les personnes handicapées et les personnes qui font partie des minorités visibles est désormais obligatoire pour ces sociétés. Les sociétés doivent soit divulguer des renseignements sur leurs politiques et objectifs relativement à la représentation des groupes désignés ou expliquer les raisons pour lesquelles elles n’ont pas adopté de tels politiques et objectifs.1 Cela aura vraisemblablement pour effet de promouvoir dans les prochaines années la participation des membres issus de ses groupes dans des postes importants au sein de ces entreprises.

Nous ne retrouvons cependant pas à l’heure actuelle cette exigence pour les sociétés à capital fermé et pour les sociétés régies par la loi provinciale. Il y a lieu d’indiquer que nombreuses sont les études et les recherches dans le milieu des affaires démontrant une corrélation entre la diversité au sein d’un conseil d’administration, la performance financière et la création de valeur pour les entreprises ayant fait le choix de diversifier le profil des candidats dans des postes décisionnels. Il serait par ailleurs pertinent pour certaines d’entre-elles de se questionner quant à la pertinence d’adopter une politique en ce sens, afin de bénéficier, qui sait, des avantages rattachés à cette diversification.

À la prochaine…