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Un ambitieux projet de loi : inscrire le bien commun dans la Constitution

En France, a été déposée une Proposition de loi constitutionnelle portant inscription du bien commun dans la Constitution , n° 2909 (11 mai 2020).

Extrait :

Le Parlement est à la hauteur des défis du temps, lorsqu’il légifère pour lutter contre la fraude fiscale, l’esclavage moderne, les écocides ou l’accaparement des terres. Pourtant, plusieurs lois, poursuivant ces fins, ont en commun d’avoir été censurées par le Conseil Constitutionnel. 

Ce fut le cas par exemple de la loi imposant aux sociétés holding un reporting public pour lutter contre l’évasion fiscale ou encore de celle visant à garantir la protection et le partage du sol face à la spéculation foncière.

Ces censures, parmi d’autres, ont été décidées au nom du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre, déduits par le Conseil Constitutionnel de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Au 18e siècle, ces principes ouvraient aux nouveaux citoyens la possibilité de s’affranchir de toute forme de despotisme.

Étonnante déformation de ces droits nés pour émanciper le sujet, devenus, par l’interprétation qui leur est donnée, des moyens offerts aux plus puissants de s’opposer au bien commun et à l’exercice de leurs libertés par les plus humbles ! 

Rien ne justifie de se complaire dans l’impuissance publique.

En ce début du 21e siècle, l’urgence est de donner leur pleine mesure à la justice et à la liberté. Face à la démesure, il appartient à l’État de droit de prévenir cette distribution inégale des droits et devoirs, qui met aux prises des populations humaines, soucieuses de leur développement et des puissances privées habiles à réclamer et à profiter des limites, que le Parlement se voit sommé de fixer à ses propres initiatives.

Comment justifier aujourd’hui notre incapacité à légiférer pleinement pour sanctionner le travail des enfants dans les manufactures du bout du monde, assurer une souveraineté alimentaire, protéger la biodiversité, lutter contre le changement climatique ou encore abolir le privilège des puissants à se soustraire à l’impôt ?

Le temps est venu de poser démocratiquement des limites à la puissance privée, afin qu’elle se déploie dans le respect de l’intérêt général. Des limites qui donnent un sens humain à l’extraordinaire potentiel d’innovation de l’esprit d’entreprise.

Une réforme sage et mesurée de notre Constitution est devenue une urgence. Dans l’esprit de ce que d’autres pays européens connaissent déjà, cette réforme pourrait prendre la forme d’une modification constitutionnelle[…].  »

Le mardi 29 mai 2018, Mme Mireille Delmas‑Marty, M. Antoine Lyon‑Caen, Mme Cynthia Fleury et 47 autres intellectuels ont publié dans Le Monde la tribune ci‑dessus rédigée avec le député Dominique Potier.

Lors de l’examen, non achevé, en juillet 2018 par l’Assemblée nationale du projet de loi constitutionnelle n° 911 pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace, le groupe Socialistes et Apparentés, avec l’appui de députés issus quatre autres groupes parlementaires, a présenté des amendements visant à inscrire le bien commun dans notre Constitution.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article 1er

Avant la dernière phrase du premier alinéa de l’article 1er de la Constitution, il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« Elle garantit la préservation des biens communs mondiaux définis par la loi. »

Article 2

Après le dix‑septième alinéa de l’article 34 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La loi détermine les mesures propres à assurer que l’exercice du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre respecte le bien commun. Elle détermine les conditions dans lesquelles les exigences constitutionnelles ou d’intérêt général justifient des limitations à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété. »

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Économie v. environnement

« L’économie déloge l’environnement des principales craintes des entreprises » selon un article de Le Devoir (20 mai 2020). Une belle réflexion…

Extrait :

Ce recul apparent des défis environnementaux montre peut-être que ceux-ci se sont désormais tellement imposés aux gouvernements et aux entreprises qu’on ne craint plus qu’ils passent à la trappe, surtout pas en l’espace de 18 mois seulement, ont observé mardi les auteurs du rapport d’une soixantaine de pages. Mais une autre interprétation pourrait être que la crise sanitaire et économique est bel et bien en train de nous faire oublier « le risque existentiel » que constituent, à l’instar de la pandémie de COVID-19, les bouleversements climatiques.

La directrice générale du FEM, Saadia Zahidi, a mis en garde ceux qui penseraient pouvoir faire plus en remplaçant une « reprise verte » par une « reprise brune ». « Nous avons maintenant une occasion unique d’utiliser cette crise pour faire les choses différemment et reconstruire de meilleures économies plus durables, résilientes et inclusives. »

Un tel souci est d’autant plus important que la situation actuelle ne menace pas seulement de faire dérailler les efforts qui étaient en cours en matière environnementale, poursuit-on. Elle risque de laisser des cicatrices économiques et psychologiques profondes, notamment aux travailleurs les plus vulnérables, frappés par le chômage, et aux quelque 1,6 milliard d’étudiants de tout âge qui ont été privés d’école et ne doivent pas devenir une « nouvelle génération perdue ». Et si certains peuvent se réjouir que la crise vienne accélérer l’adoption du télétravail ou de la robotisation, il ne faudra pas oublier ceux que ces nouvelles technologies mettront de côté.

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Réponses des multinationales du CAC 40 à la crise

The Conversation publie un article sur la COVID-19 sur la réponse des multinationales à la crise : Sabine Urban et Ulrike Mayrhofer, « La grande disparité des réponses des multinationales du CAC 40 à la crise« , 4 mai 2020.

Extrait :

L’analyse des données collectées met en relief la diversité des réponses qui sont apportées par les multinationales du CAC 40. Nous avons identifié quatre groupes de multinationales :

  • Les multinationales « citoyennes » faisant preuve de générosité (15 entreprises) ;
  • Les multinationales tournées vers la continuité de l’activité (10 entreprises) ;
  • Les multinationales orientées vers l’innovation (5 entreprises)
  • Les multinationales n’ayant pas annoncé de mesures spécifiques face au Covid-19 (10 entreprises).

Plusieurs enseignements peuvent être tirés des réactions observées. Notre travail révèle que la plupart des multinationales s’adaptent à la nouvelle situation et font preuve de flexibilité et de responsabilité.

De manière surprenante, certaines multinationales n’ont pas annoncé de mesures spécifiques par rapport à la pandémie et il serait pertinent de s’interroger sur les raisons de ce choix.

Il ressort de notre analyse que la crise sanitaire mondiale provoquée par le Covid-19 entraîne de nombreux changements pour les multinationales du CAC 40, notamment au niveau des stratégies empruntées, des modes d’organisation et des relations avec les parties prenantes et la société.

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COVID-19 et réformes en matière de droit des sociétés par actions : tendances et questions

Bonjour à toutes et à tous, je signale cette intéressante étude : Zetzsche, Dirk Andreas and Anker-Sørensen, Linn and Consiglio, Roberta and Yeboah-Smith, Miko, « The COVID-19-Crisis and Company Law – Towards Virtual Shareholder Meetings », 15 avril 2020, University of Luxembourg Faculty of Law, Economics & Finance, WPS 2020-007.

Extrait :

Regulators and Parliaments around the world have responded to the COVID-19 epidemic by amending company law. This crisis legislation allows us to examine how, and to what effect, the corporate governance framework can be amended in times of crisis. In fact, almost all leading industrialized nations have already enacted crisis legislation in the field of company law. 

In our recent working paper, ‘The COVID-19-Crisis and Company Law – Towards Virtual Shareholder Meetings’,  we have sought to (1) document the respective crisis legislation; (2) assist countries looking for solutions to respond rapidly and efficiently to the crisis; (3) exchange experiences of crisis measures; and (4) spur academic discussion on the extent to which the crisis legislation can function as a blueprint for general corporate governance reform.

Countries considered in full or in part include Australia, Austria, Belgium, Canada, China, France, Germany, Hong Kong, Italy, Luxembourg, the Netherlands, Norway, Portugal, Singapore, South Korea, Spain, Switzerland, Thailand, the United Kingdom, and the United States. Readers are encouraged to highlight any inaccuracies in our presentation of the respective laws, and to bring further crisis-related legislation not considered in this working draft to the attention of the authors. Moreover, readers are invited to indicate where there is room for improvement therein, and/or to signal the need for policy reform.

Drawing on the analysis of these more than twenty countries, we note five fields in which legislators have been particularly active. First, the extension of filing periods for annual and quarterly reports to reflect the practical difficulties regarding the collection of numbers and the auditing of financial statements. Second, company law requires shareholders to take decisions in meetings—and these meetings were for the most part in-person gatherings. However, since the gathering of individuals in one location is now at odds with the measures being implemented to contain the virus, legislators have generally allowed for virtual-only meetings, online-only proxy voting and voting-by-mail, and granted relief to various formalities aimed at protecting shareholders (including fixed meeting and notice periods). Third, provisions requiring physical attendance of board members, including provisions on signing corporate documents, have been temporarily lifted for board matters. Fourth, parliaments have enacted changes to allow for more flexible and speedy capital measures, including the disbursement of dividends and the recapitalization of firms, having accepted that the crisis impairs a company’s equity. Fifth and finally, some countries have implemented temporary changes to insolvency law to delay companies’ petitioning for insolvency as a result of the liquidity shock prompted by the imposition of overnight lockdowns.

The legislation passed in response to the COVID-19 crisis provides for an interesting case study through which to examine what can be done to modernize the corporate governance framework with a view to furthering digitalization. Given the difficulties or indeed the impossibility of conducting in-person meetings currently, the overall trajectory of company law reforms has been to allow for digitalization of corporate governance, and ensuring the permissibility of virtual shareholder meetings (VSM), in particular. 

In this respect, it is safe to assume that the rules on VSM will have model character. While the details of the modus operandi of VSM will require careful adjustment, to ensure that shareholders will be afforded the same rights and opportunities to participate as they would at an in-person meeting (including Q&A), the experimental phase during the crisis will feed into the policy discussion, with some more successful and some less successful examples providing food for thought. Yet, it is safe to say that the COVID-19 pandemic has unveiled the need for virtual-only shareholder meetings, and that some types of VSM will stay for good long after the current crisis has subsided. 

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COVID-19 : actionnaires v. retraités

Dans La presse, Stéphanie Grammond livre une belle réflexion dans sa chronique intitulée « Les retraités avant les actionnaires » (26 avril 2020). Très intéressant et qui rappelle le chapitre du livre que j’ai rédigé avec mon collègue Charles Tremblay-Potvin à paraître « Sears Canada : les retraités sacrifiés à l’aune de la primauté actionnariale ? » dans Droit des aînés (éditions Yvon Blais).

Extrait :

À la mi-avril, Ottawa a annoncé un assouplissement temporaire pour donner du lest aux employeurs qui parrainent un régime de retraite à prestations déterminées. Or, ces mesures affaibliront la protection des rentes à un moment où les régimes traversent une tempête parfaite.

(…)

Vu à l’envers, il y a maintenant un « trou » de 11 % dans les caisses de retraite, un déficit qui doit être comblé par des cotisations spéciales des employeurs.

Mais comme les sociétés grattent les fonds de tiroir, Ottawa a décrété un moratoire sur ces cotisations pour 2020 et laisse entrevoir un allégement pour 2021 pour les entreprises de compétence fédérale (ex. : transports, banques, télécoms).

Au Québec, les sociétés ont déjà eu de l’oxygène ces dernières années. Leurs cotisations ne sont plus établies en fonction du ratio de solvabilité qui donne le portrait en cas de faillite. Elles le sont plutôt en fonction d’un ratio de « capitalisation améliorée » qui permet l’utilisation d’hypothèques plus accommodantes fondées sur la « continuité des affaires », un concept qui semble bien fragile en cette ère de pandémie.

(…)

Les gouvernements font le pari que ces assouplissements aideront les entreprises à survivre et à payer des rentes pleines et entières. Mais en cas de faillite, les retraités seront doublement perdants, car ils se retrouveront avec une rente amputée plus sévèrement.

D’où l’urgence de trouver des solutions pour mieux les protéger.

Malheureusement, il est trop tard pour lancer un fonds de garantie des prestations de retraite comme en Ontario. Quand un 18 roues est sur le point d’emboutir votre voiture, ce n’est plus le temps d’appeler l’assureur.

Par contre, on devrait changer les lois encadrant les faillites pour donner une « super-priorité » aux retraités. Actuellement, ils sont considérés comme des créanciers ordinaires, ce qui ne leur laisse que des miettes une fois que les autres se sont servis.

(…) Mais les entreprises qui ont un régime de retraite déficitaire ne devraient pas avoir le droit de racheter leurs actions, à plus forte raison si elles ont reçu l’aide du gouvernement. Pourquoi les cadeaux aux actionnaires passeraient-ils avant les promesses aux retraités ?

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COVID-19 : où sont la RSE et les parties prenantes ?

Dans FastCompany, le journaliste Christopher Zara publie un intéressant article reprenant une étude menée actuellement par The Conference Board sur la réduction des rémunérations : « Pandemic pay cuts: The growing list of companies reducing salaries during COVID-19 ». Le constat est éloquent pour l’application de la RSE et de la théorie des parties prenantes par les entreprises, je vous le laisse découvrir ci-dessous :

Extrait :

More than 30 million Americans have filed for unemployment benefits since the economy first began to unravel due to the coronavirus pandemic. That figure may not count untold millions of freelancers or self-employed individuals who are also out of work, nor does it factor in countless people who simply couldn’t get through to their state labor department to file a claim. And of those who are still working, many are making considerably less money due to reduced hours.

And then there are the company-imposed pay cuts. Over the past few weeks, the Conference Board has been tracking pay reduction announcements for publicly traded companies, using SEC filings by firms listed in the Russell 3000 Index.

Some the findings may surprise you: For instance, the salary reductions are not just hitting top executives and their fat bonuses. At last count, 61% of the affected companies applied pay reductions to the base salaries of senior managers who make less than top-tier executives, the Conference Board says. It adds that 11% of all companies in the index announced base pay cuts between March 1 and April 24.

The good news is, the announcements peaked in early April and have declined a bit in recent weeks. The bad news? The group anticipates a “second wave” of salary reductions could emerge in the weeks ahead as the ripple effects of COVID-19 continue to wreak havoc on bottom lines.

The Conference Board posted the insights in a new report that also includes a wealth of data visualizations and the full list of companies. It says the list will be updated weekly as long as the crisis continues. The data is being compiled in collaboration with consulting firm Semler Brossy and Esgauge Analytics. It shows that the industries hardest hit by the coronavirus are what you would expect, including retail and hospitality.

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RSE : il faut éviter la régression post COVID-19

Belle tribune de mon ami Yann Queinnec dans Les Échos.fr (6 mai 2020) : « La RSE à l’épreuve du Covid-19 ». En un mot : vigilance… il faut éviter la régression des entreprises en matière de RSE !

Extrait :

(…) Attention. Un autre son de cloche se fait déjà entendre. La crise est aussi propice à une offensive remettant en cause les quelques acquis de ces dernières années en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

Le danger d’une régression est bien réel. Il traduit la trop faible prise au sérieux de la RSE au sein des états majors des plus grands Groupes. Comment faire en sorte au contraire que cette crise inédite devienne un accélérateur de la mutation vers une économie plus soutenable ?

Il s’agit de consolider les acquis et d’accélérer la mutation, massivement. C’est tout l’enjeu des prochaines semaines et prochains mois. La RSE doit trouver sa place au plus haut niveau des organigrammes et des agendas stratégiques de l’après. Il s’agit de capitaliser sur la solidarité redécouverte pour transformer la dynamique en impacts tangibles et satisfaire les attentes grandissantes de performances extra-financières exprimées par la société.

Pour ce faire, chaque entreprise doit s’approprier la culture de l’impact sociétal. Cette culture d’entreprise, portée par des valeurs de dialogue et de solidarité ne peut se limiter à trouver sa raison d’être sociétale, aussi séduisante et mobilisatrice soit-elle. Seule, une raison d’être n’est rien.

Les enjeux devant nous appellent à un alignement des agendas sur des objectifs d’impacts positifs partagés. Il s’agit donc de créer les conditions de la confiance avec des acteurs qui ont légitimement des doutes sur les intentions réelles, tant la RSE ne s’est bien souvent réduite qu’à un discours de façade.

Et cela commence naturellement par les équipes internes. Chaque collaborateur doit, non seulement être sensibilisé, mais convaincu de l’ambition d’impact positif de son entreprise et de son rôle pour l’atteindre.

Quant aux parties prenantes externes, l’entreprise va devoir apprendre à les intégrer toujours plus, dans ses processus de décision et dans ses actions. Jouer franc-jeu sur les enjeux et les contraintes sera le meilleur moyen de créer la confiance. Savoir faire émerger des objectifs partagés et mobiliser autour de soi, des ONG jusqu’aux compétiteurs, va devenir un savoir-faire à haute valeur ajoutée sociétale.

(…) Cette pandémie peut faire passer la RSE à l’âge adulte. La responsabilité sociétale et extra-financière devient le nouveau curseur éthique, guidant autant les modalités de recrutement et de rémunération, les budgets de R&D, l’adaptation de l’offre de produits et services, que les stratégies fiscales responsables.

À la prochaine…