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Rappel sur les devoirs du CA

Bonjour à toutes et à tous, un rappel bienvenu du cabinet Stein Monast à propos du rôle et des obligations du CA : « Rappel du rôle et des obligations des administrateurs ».

Aux termes de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (Canada) (« LCSA ») et de la Loi sur les sociétés par actions (Québec) (« LSA »), en plus d’agir avec intégrité et bonne foi, et avec le soin, la diligence et la compétence d’une personne prudente en pareilles circonstances, l’administrateur et le dirigeant d’une société ont l’obligation d’agir « avec pour seul objectif le bien de la société, personne distincte, sans tenir compte des intérêts d’aucune autre personne, groupe ou entité. » [nous soulignons]3.

En effet, « l’administrateur ne doit défendre ni l’intérêt du groupe d’actionnaires qui l’a spécialement désigné, ni celui de la majorité des actionnaires à qui il doit son élection, ni celui de la catégorie distincte d’actionnaires qui l’a élu, le cas échéant, ni même celui de la totalité des actionnaires. Les administrateurs ne sont en effet pas mandataires des actionnaires : la loi dit expressément qu’ils sont mandataires de la société »4, principe que vient codifier le Code civil du Québec à l’article 321 qui se lit comme suit :

« 321 L’administrateur est considéré comme mandataire de la personne morale. Il doit, dans l’exercice de ses fonctions, respecter les obligations que la loi, l’acte constitutif et les règlements lui imposent et agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés. » [nous soulignons].

À la prochaine…

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Recours dérivé : la bonne foi et l’intérêt de la société précisés

Dans l’arrêt St-Germain c. St-Germain (2016 QCCA 303), la Cour d’appel s’est penchée sur les conditions pour intenter une action dérivée en vertu de l’article 239 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Dans cette affaire ayant trait à une dilution suite à une nouvelle émission d’actions, les juges reviennent en détail sur les deux conditions essentielles pour intenter une action dérivée que sont la bonne foi et l’intérêt de la société.

Morceaux choisis :

[49]       La juge a plutôt ciblé et retenu des événements reliés aux querelles familiales. Ceux-ci sont peu pertinents pour évaluer la bonne foi de Doris dans sa proposition d’intenter un recours en oppression par voie d’action dérivée dans le contexte du présent dossier. Ce qui doit être recherché est la bonne foi eu égard à l’action dérivée projetée et non pas la bonne foi historique concernant les affaires du passé n’ayant que peu de liens avec les questions ciblées par le projet d’action dérivée.

[52]        La dilution d’actions élaborée par Normand en 2006 a été admise et son but d’exclure l’appelante de toute participation dans l’équité des compagnies à cause de leurs disputes familiales a été suffisamment établi à ce stade. 176 inc. a intérêt à corriger cette situation à titre d’actionnaire de 2316 Québec inc. L’intérêt de Doris à titre d’actionnaire de 176 inc. coïncide avec les intérêts de cette dernière. L’action proposée cherchait à remédier à cette situation. Cela devait inviter la juge à conclure que l’appelante agissait de bonne foi en proposant l’action dérivée, vu le refus des administrateurs de 176 inc. d’intenter les procédures appropriées.

[55]        (…) Une émission d’actions qui a pour effet de diluer la valeur des actions déjà émises n’est pas en soi nécessairement oppressive. Elle ne sera pas oppressive si elle est faite pour le bénéfice de la société (par exemple en considération d’un nouvel investissement). Par contre, elle sera oppressive si elle est faite dans un but inapproprié (comme punir un autre actionnaire qui est un membre de la famille). En ce sens, dans le présent cas, l’émission est prima facie oppressive.

[56]        (…) Il est axiomatique et fondamental que les actionnaires aient droit à leurs parts proportionnelles des éléments d’actif de la société. En conséquence, il est raisonnable que les actionnaires s’attendent à ce que la valeur de leurs actions ne soit pas diminuée par les machinations de l’actionnaire majoritaire ou des administrateurs qui contrôlent les droits de vote. Ceci est particulièrement le cas pour des actions émises à la suite d’un gel successoral conçu pour que la valeur future d’une compagnie s’accroisse au bénéfice des nouveaux actionnaires (les héritiers présomptifs de l’actionnaire) (…). Un empiètement par l’actionnaire majoritaire sur les droits fondamentaux d’un actionnaire minoritaire est injuste et donne ouverture à une action en oppression (…). Normand ne peut pas justifier son comportement en disant que c’est lui qui a donné les actions à Doris. Une fois que Doris est actionnaire (indépendamment du mode d’acquisition des actions (achat, don, etc.)), elle bénéficie de tous les droits et recours d’une actionnaire.

Je vous invite à lire commentaire très bien rédigé de Me Bin Zeng sur le blogue du CRL : « Action dérivée en droit corporatif : les critères de bonne foi et d’intérêt de la société ».
À la prochaine…
Ivan Tchotourian