Gouvernance

Divulgation Gouvernance parties prenantes

Salariés : comment mieux les protéger ?

Bonjour à toutes et à tous, les salarié font l’objet d’une attention dans le cadre de ce billet : « Si les travailleurs sont un atout – comment les entreprises les protègent-elles ? » (Shannon Rohan, EqualTimes, 7 octobre 2016).

 

Pourquoi les entreprises restent-elles donc toujours aussi silencieuses concernant l’immense majorité des travailleuses et travailleurs impliqués dans leurs activités ?

Une raison pour cela est que personne ne leur exige de fournir une information de meilleure qualité ? Si nous ne la leur demandons pas, elles ne nous la fourniront pas. Quand bien même la divulgation des émoluments des cadres s’est sensiblement améliorée suite au tollé suscité par la rémunération excessive des chefs d’entreprise, trop peu d’attention a été accordée aux politiques salariales des entreprises concernant le reste de leurs effectifs.

Cette négligence peut être interprétée comme une acceptation d’un raisonnement très répandu au sein des conseils d’administration qui voudrait que les meilleurs candidats aux postes exécutifs requièrent une rémunération compétitive (autrement dit exorbitante) et que cette compensation représente un investissement dans l’entreprise. Les travailleurs, en revanche, sont considérés comme une charge pour l’entreprise et partant un poids sur les bénéfices.

Cependant, un groupe croissant d’investisseurs institutionnels tentent de modifier ce discours en appelant mondialement les entreprises à garantir une transparence et une information accrues sur leurs pratiques et politiques en matière de travail.

Ici au Canada, je participe à un programme appelé Valuing Decent Work (accorder de l’importance au travail décent). Avec le soutien de l’Atkinson Foundation, nous mobilisons les voix des investisseurs au Canada pour amplifier l’appel en faveur de la diffusion par les entreprises d’une information de meilleure qualité concernant leurs approches en matière de travail décent.

Notre rapport conclut qu’une opportunité unique se présente aux investisseurs de tenir les entreprises responsables et d’améliorer la qualité de l’information disponible concernant les pratiques de travail décent des entreprises.

Les entreprises doivent à leurs investisseurs de démontrer comment elles protègent, cultivent et investissent dans cet atout crucial que sont leurs travailleurs.

 

À la prochaine…

Ivan

Gouvernance Normes d'encadrement normes de droit normes de marché place des salariés

Salariés et gouvernance d’entreprise : du nouveau en Angleterre

Bonjour à toutes et à tous, je vous renvoie à cet article intitulé : « Corporate governance: ’employee voice’ and workplace reporting » (17 août 2018). Cet article revient sur les récentes évolutions britanniques touchant le code de gouvernance du FRC et le droit des sociétés en matière de reporting.

 

Some of the most eye-catching changes apply to listed companies, but there are also new requirements for many unlisted companies.

The changes are introduced through different sources, including the latest UK Corporate Governance Code (‘the Code’) and amended corporate reporting law and regulations. Different elements also apply to different types of company. Action will be required by heads of HR departments, company secretaries, in-house counsel and boards themselves.

The revised rules will apply for financial years beginning on or after 1 January 2019, so the first affected reports will be those published in 2020. However, companies should not wait until drafting those reports to engage with the reforms. Instead, they should be implemented early in the first affected financial year, if not before.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Nouvelles diverses

Nos étudiants publient : « Le temps d’intégrer les salariés dans les CA » Retour sur un texte de Crete et Roger (billet de Mmes Okou, Wansi et Chemie Njiah)

Le séminaire à la maîtrise de Gouvernance de l’entreprise (DRT-7022) dispensé à la Faculté de droit de l’Université Laval entend apporter aux étudiants une réflexion originale sur les liens entre la sphère économico-juridique, la gouvernance des entreprises et les enjeux sociétaux actuels. Le séminaire s’interroge sur le contenu des normes de gouvernance et leur pertinence dans un contexte de profonds questionnements des modèles économique et financier. Dans le cadre de ce séminaire, il est proposé aux étudiants depuis l’hiver 2014 d’avoir une expérience originale de publication de leurs travaux de recherche qui ont porté sur des sujets d’actualité de gouvernance d’entreprise. C’est dans cette optique que s’inscrit cette publication qui utilise un format original de diffusion : le billet de blogue. Cette publication numérique entend contribuer au partager des connaissances à une large échelle (provinciale, fédérale et internationale). Le présent billet est une fiche de lecture réalisée par Mmes Achau Marie Priscille Okou, Dechua Joane Margaret Wansi et Ornella Chemie Njiah. Ces dernières analysent et mettent en perspective l’article de Christophe CRETE et Baudouin ROGER intitulé « Il faut renforcer la place des salariés au conseil d’administration » (Le Monde, 16 juin 2016). Je vous en souhaite bonne lecture et suis certain que vous prendrez autant de plaisir à le lire que j’ai pu en prendre à le corriger.

Ivan Tchotourian

 

Mise en œuvre en Europe depuis maintenant plus de soixante-dix ans, la codétermination ou cogestion représente un bon exemple de l’application de la théorie des parties prenantes. L’exemple de l’Allemagne, où ce modèle de gouvernance est le plus abouti, inspire d’autres pays dont la France. Serait-ce une solution idoine pour une gouvernance réussie ?

 

L’intégration des salariés au CA : la perspective d’une gouvernance réussie

L’idée d’une participation active des employés au sein du CA n’est absolument pas nouvelle. Considéré comme l’apanage de l’Europe, le modèle de gouvernance fondée sur la « cogestion » bénéficie de plus de soixante-dix ans d’expérience. Les efforts concrétisés à travers les apports de la Loi relative à la sécurisation de l’emploi et la Loi Rebsamen démontrent l’intention de la France d’affermir la place des salariés au conseil d’administration[1]. Dans une moindre mesure mais en visant le même objectif, le Royaume-Uni a aussi envisagé, qu’un représentant des employés puisse siéger au CA[2]. Plusieurs autres exemples pourraient être cités. Les Pays-Bas, le Danemark, la Finlande etc. Tous ces pays voient un intérêt à accorder davantage de place aux salariés. Un tel type système n’aurait pas perduré[3].

Au-delà d’avoir des sièges au CA, ce qui est visé est une intégration réelle du salarié dans la gouvernance. Celle-ci est de nature à « procurer aux entreprises des avantages directs et indirects » selon l’Organisation de coopération et de développement économiques, qui en a fait une recommandation[4]. Les grands débats au sein de l’entreprise sont l’expression d’une activité politique, il paraît alors logique que les salariés puissent prendre part à des décisions qui en fin de compte vont les affecter. On envisage une stratégie basée sur le savoir-faire et l’implication des employés, ce qui entraînera un engagement de leur part et une optimisation de la performance.

La diversité des profils au sein du conseil est alors perçue comme un facteur de productivité, d’innovation, d’efficacité du processus décisionnel et dans une dimension sociale, de maintien des emplois[5]. Le renforcement de la place des salariés n’est pas seulement une question de démocratie sociale mais aussi une question de performance de l’entreprise et de posture du monde des affaires.

 

La participation des salariés au CA : les inconvénients

La « cogestion » a largement fait ses preuves et contribué au succès industriel de l’Allemagne. Toutefois, ce système de gouvernance n’est pas exempt de critiques.

À cette époque où il est exigé plus de transparence au sein des organes de contrôle des entreprises cotées en bourses et plus d’indépendance de leur part[6], il est des exemples qui démontre qu’un renforcement du pouvoir des administrateurs salariés ne saurait être idéalisé. En effet, certaines organisations du monde des affaires demeurent encore prudentes quant à accorder plus de contrôle aux représentants des salariés dans les CA[7].

Ainsi, la controverse entourant le modèle de cogestion s’est affirmée à coups de scandales subis par de grosses firmes allemandes. Le cas particulier de Volkswagen révèle une affaire de fraude quasi étouffée pendant toute une décennie par les responsables des organes de contrôle[8], impliquant en ce sens aussi bien les hauts dirigeants que les représentants des salariés. Certains auteurs de la gouvernance d’entreprise parlent d’un système gangrené de corruption des dirigeants pour « s’attirer les bonnes grâces » des administrateurs salariés[9].

Par ailleurs, la voix délibérative dont jouissent les salariés conduit à une lourdeur du processus décisionnel qui gagnerait à plus de célérité[10]. En effet, elle complique et retarde inutilement la prise de décision.

Enfin, la question de la compétence et de l’expertise des représentants des salariés est posée[11].

 

Conclusion

Une transplantation pure et simple du modèle de gouvernance allemand paraît difficile. Même si l’idée d’un renforcement de la place des salariés dans le CA divise encore en France, cette dernière pourra toujours s’appuyer pour le défendre sur le modèle européen de l’actionnariat salarié. Dès lors, ne serait-il pas profitable pour les entreprises d’adopter ce modèle de gouvernance qui semble avoir une mise en application plus aisée ?

 

Achau Marie Priscille Okou, Dechua Joane Margaret Wansi et Ornella Chemie Njiah

Étudiantes du cours de Gouvernance de l’entreprise – DRT-7022


[1] Christophe Crete et Baudouin Roger, « Il faut renforcer la place des salariés au conseil d’administration », Le Monde, 16 juin 2016 ; Code de commerce, art. L. 225-27-1 ; Loi no 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi (1), J.O. 18 août 2015, p. 14346, art. 10 et 11 ; Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, J.O. 16 juin 2013, p. 9958.

[2] Bill 124, Profit-Sharing and Company Governance (Employees’ Participation), sess 2015-16 (1ere lecture –  26 janvier 2016).

[3] Christophe Crete et Baudouin Roger, « Il faut renforcer la place des salariés au conseil d’administration », Le Monde, 16 juin 2016.

[4] Principes de gouvernement d’entreprise de l’OCDE, 2004, à la p. 50.

[5] Christophe Crete et Baudouin Roger, « Il faut renforcer la place des salariés au conseil d’administration », Le Monde, 16 juin 2016.

[6] René Lasserre, « La cogestion allemande à l’épreuve de la globalisation », Regards sur l’économie Allemande, Bulletin économique CIRAC, 2005, au par. 19.

[7] « Les salariés réveillent les conseils d’administration », Challenges.

[8] Voir le lien suivant : http://centre-mcd.uqam.ca/upload/files/Publications/Veille/vsd110-duval.guillaume.ae.pdf.

[9] Voir le lien suivant : http://centre-mcd.uqam.ca/upload/files/Publications/Veille/vsd110-duval.guillaume.ae.pdf.

[10] René Lasserre, « La cogestion allemande à l’épreuve de la globalisation », Regards sur l’économie Allemande, Bulletin économique CIRAC, 2005, au par. 18 et 19.

[11] Macfarlanes LLP (Hayley Robinson), « Employees on the board: Theresa May’s next big idea? », Lexology.

 

 

Gouvernance Normes d'encadrement Valeur actionnariale vs. sociétale

Des profits au détriment du reste

Bel article du journal Le Monde qui revient sur le fameux partage des profits qui démontre que les profits des entreprises du CAC40 sont prioritairement versés aux actionnaires : « CAC 40 : un partage déséquilibré des bénéfices » (Le Monde, 14 mai 2018).

 

Mieux vaut être actionnaire que salarié, si l’on en croit les conclusions du rapport publié, lundi 14 mai, par l’organisation non gouvernementale Oxfam et le Bureau d’analyse sociétale pour une information citoyenne (Basic). Cette étude montre que, depuis 2009, les actionnaires des groupes du CAC 40 ont été généreusement servis en accaparant plus des deux tiers des bénéfices de ces entreprises. Vient ensuite la part consacrée aux investissements, qui n’a été en moyenne que de 27,5 %. Les salariés, eux, se sont vu attribuer seulement 5 % du total sous la forme d’intéressement et de participation

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance Nouvelles diverses parties prenantes Structures juridiques Valeur actionnariale vs. sociétale

Vient de paraître : La légitimité du pouvoir dans l’entreprise par Charles Tremblay-Potvin

Un des membres de l’équipe du blogue (M. Charles Tremblay-Potvin) vient de publier un ouvrage auprès des éditions Yvon Blais sous le titre suivant : « La légitimité du pouvoir dans l’entreprise : analyse critique de l’affaire Walmart de Jonquière ». Un ouvrage à mettre dans une bonne bibliothèque à celles et ceux s’intéressant un temps soit peu à l’entreprise et à la place du rapport salarial dans l’économie capitaliste.

 

De tous les contrats qu’un sujet de droit est habilité à conclure dans une société dite de « libre marché », seul le contrat de travail postule que l’une des parties est subordonnée à l’autre. C’est ainsi que le 27 novembre 2009, le plus puissant employeur privé de la planète se voyait reconnaître par la Cour suprême du Canada la légitimité de son pouvoir de fermer l’un de ses établissements, sans égard à la protection offerte par le Code en faveur des salariés exerçant leur liberté syndicale.

Dix ans plus tard, quel bilan peut-on dresser de cette lutte syndicale ? La culture de gouvernance de l’entreprise Walmart, pourrait-on dire, n’est au fond qu’une illustration de la profonde transformation qu’a subie l’économie mondiale au cours des dernières décennies. Les principes qui sont au coeur du mode de régulation de notre système politique et économique méritent plus que jamais d’être analysés, remis en question et critiqués. Tel est l’objectif de cet ouvrage.

La première partie du volume définit l’entreprise et isole sa dimension politique en étudiant la spécificité du rapport salarial. La deuxième partie étudie la longue guérilla judiciaire entre les salariés et les dirigeants de Walmart qui a atteint un point culminant avec la fermeture de l’établissement de Jonquière le 29 avril 2005.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

normes de droit rémunération

Ratio de rémunération : le dispositif entrera en vigueur en juin 2018

Le ratio de rémunération entrera en vigueur pour les entreprises britanniques à compter de juin 2018 selon The Guardian : « Companies must reveal pay disparity between boss and workers ».

 

Companies that are publicly listed in the UK will be obliged to publish the pay ratio between their chief executive and their average British worker under government plans.

Businesses that are publicly listed in UK will be obliged to publish data as part of shakeup of corporate governance

The proposals, which will be announced on Tuesday and will come into force by next June, will also aim to give workers a voice at boardroom level. But the plans fall short of the corporate governance revolution promised last year by Theresa May.

 

Précision toutefois : contrairement à ce qui était initialement annoncé (il était question d’obliger les entreprises britanniques), le dispositif juridique sera de type « comply or explain ».

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

normes de marché rémunération

Ratio de rémunération : la SEC l’a adopté

À partir de 2017, la majorité des entreprises inscrites en bourse aux États-Unis (pas les sociétés Canadiennes pour l’instant) devront dévoiler le ratio de la rémunération de leur P-DG par rapport à la rémunération médiane de leurs employés. Dans le cadre de son blogue, Mme Diane Bérard revient sur le sujet : « Salaire du pdg/salaire médian des employés: fini le secret » (Les affaires.com, 25 août 2016)

et met en lumière un certain nombre de critiques :

 

1- La SEC laisse à chaque entreprise le choix de sa méthode de calcul du salaire médian de ses employés.

2- Chaque entreprise peut se contenter d’un échantillon de travailleurs pour calculer le salaire médian. Elle n’a pas à inclure tout le personnel.

3- Chaque entreprise peut calculer ce ratio au moment de son choix au cours des trois derniers mois de son année financière. Elle peut donc choisir le moment où elle a le moins d’employés saisonniers, dont la rémunération est généralement moins élevée.

4- La médiane ne reflète pas toujours fidèlement la réalité salariale d’une entreprise.

5- Par ailleurs, un ratio plus faible ne signifie pas nécessairement une rémunération plus « juste ».

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian