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engagement et activisme actionnarial mission et composition du conseil d'administration

Les investisseurs se préoccupent-ils de la féminisation des CA ?

Bonjour à toutes et à tous, en voilà une question ? Vous allez me répondre « oui » sans hésiter, mais rien n’est moins sûr au vu d’un récent article de The Street (Emily Stewart, « Institutional Investors Don’t Seem to Care About Women on Corporate Boards – But They Should »). On peut y lire :

Numerous studies suggest that the presence of women in corporate leadership positions correlates with improved firm performance, and yet, it appears to be something that really isn’t a concern for major investors: hedge funds, endowment, activists, global investment management firms and others.

(…) But most institutional investors just don’t want to talk about women in the boardroom. They don’t see it as part of their mandate.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Big Investors Question Corporate Board Tenures

Très intéressant article du The Wall Street Journal qui met en lumière le fait qu’une part non négligeable d’administrateurs américains occupent leur siège depuis plus de 10 ans (24 %). Cette situation ne serait pas gênante, si les investisseurs ne commençaient à se rebeller ! Lire la suite ici.

Large U.S. companies increasingly are governed by board members who have held their seats for a decade or more, even as some big investors question whether these directors serve shareholders’ best interests. At 24% of the biggest U.S. companies, a majority ofthe board has been in place for at least 10 yeaxs, .•a. Wall Street Journal~.lli!lysis found. It is a ~arked changed from 2005 when long-term directors made up a board majority at 11%of large companies. One factor driving the change is low turnover among directors.

(…) Some investors and proxy advisory firms aren’t waiting for companies to make changes. BlackRock Inc., State Street Global Advisors and o~?ig money managers have begun opposing the re-election of some directors with extended tenure.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

devoirs des administrateurs engagement et activisme actionnarial mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement rémunération

On ne saurait mieux dire !

Dans un article de La presse du 19 mars 2016, le journaliste Jean-Philippe Décarie livre un article intitulé : « Gouverner, c’est choisir ». L’auteur revient sur un panel auquel il a assisté à Montréal Yvan Allaire et deux autres spécialistes de la gouvernance des entreprises (Marie Giguère, première vice-présidente, affaires juridiques et secrétariat, de la Caisse de dépôt et placement, et Stéphane Rousseau, professeur et titulaire de la Chaire en gouvernance et droit des affaires à la faculté de droit de l’Université de Montréal).

Depuis les 15 dernières années, la gouvernance des sociétés publiques a été au coeur de bien des débats. Est-ce que les administrateurs ont l’indépendance nécessaire pour remplir de façon adéquate leur rôle de veiller aux intérêts à long terme de leur entreprise ou sont-ils là pour assurer la plus forte valorisation possible de leurs actionnaires ?

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Nos étudiants publient : L’affaire Bombardier

Le séminaire à la maîtrise de Gouvernance de l’entreprise (DRT-7022) dispensé à la Faculté de droit de l’Université Laval entend apporter aux étudiants une réflexion originale sur les liens entre la sphère économico-juridique, la gouvernance des entreprises et les enjeux sociétaux actuels. Le séminaire s’interroge sur le contenu des normes de gouvernance et leur pertinence dans un contexte de profonds questionnements des modèles économique et financier. Dans le cadre de ce séminaire, il est proposé aux étudiants depuis l’hiver 2014 d’avoir une expérience originale de publication de leurs travaux de recherche qui ont porté sur des sujets d’actualité de gouvernance d’entreprise. C’est dans cette optique que s’inscrit cette publication qui utilise un format original de diffusion : le billet de blogue. Cette publication numérique entend contribuer au partager des connaissances à une large échelle (provinciale, fédérale et internationale). Le présent billet expose le résultat des recherches de Mmes Maylis Hoff et Julia Nakache. Ce billet revient sur le cas de l’entreprise Bombardier et l’investissement du gouvernement québécois dans cette dernière. Je vous en souhaite bonne lecture et suis certain que vous prendrez autant de plaisir à le lire que j’ai pu en prendre à le corriger.

 Ivan Tchotourian

Les Sociétés d’État au Québec appartiennent en majorité à l’Etat et fournissent un service commercial jugé d’intérêt général. C’est par exemple le cas de la Caisse de dépôt et de placement, d’Hydro-Québec, de la Société des Alcools du Québec…[1] Plus récemment, la société gérant le programme CSeries de Bombardier a fait parler d’elle. En effet, suite à des problèmes financiers, le gouvernement Québécois a décidé de détenir 49,5 % de son capital. Le périodique Les affaires a publié un dossier à ce sujet[2].

De belles questions

Il nous apparaît alors intéressant de s’interroger sur la légitimité de la place de l’État dans une entreprise privée. Plus précisément, l’État a-t-il un rôle à jouer dans le marché des entreprises à capital ouvert à travers des investissements (tels que ceux faits dans la CSeries) ? L’actionnariat de l’État ne devrait-il pas être réglementé pour éviter, d’une part, un conflit entre ses pouvoirs d’investisseur et de législateur et, d’autre part, pour s’assurer que ses investissements servent uniquement l’intérêt général ? Enfin, lorsque l’Etat investi, est-il légitime qu’il jouisse de certains privilèges que n’ont pas les autres investisseurs ?

Un État dans la sphère économique : Docteur Jekyll et Mister Hyde ?

Bombardier est une entreprise multinationale canadienne spécialisée dans la construction de matériels de transport. Elle se place 3e dans le secteur de l’aéronautique, derrière Airbus et Boeing. Dès 2008, elle a montré son intérêt pour le lancement d’un nouveau programme CSeries afin d’élargir sa gamme de jets régionaux et de se démarquer de ses concurrents. Face à l’échec de ce programme, le gouvernement québécois a choisi non pas d’allouer de nouvelles subventions, mais d’en faire son partenaire commercial en y investissant directement 1 milliard de dollars. Nous sommes ici bien loin de l’image traditionnelle de l’État régulateur : décomplexé, ce dernier agit en effet comme un véritable actionnaire. « Le Québec n’a plus les moyens de distribuer subventions et crédits d’impôt sans rien attendre en retour. Il investira si une situation l’exige, mais seulement s’il est persuadé d’en sortir gagnant » martelait en 2014 le ministre provincial de l’économie Jacques Daoust[3]. La province du Québec ne se limite pas au seul secteur de l’aéronautique : il a récemment annoncé la mise en place d’une dotation de 15 millions de dollars afin de réaliser des investissements en collaboration avec des entreprises québécoises de l’industrie du jeu vidéo[4].

 Cette nouvelle facette d’État actionnaire ne s’arrête pas aux frontières. On le voit par exemple avec l’État français qui refuse la qualification « d’actionnaire passif » et a ainsi augmenté ses participations dans le capital de l’entreprise Renault de 15,01 % à 19,74 %[5]. La difficulté réside dans la conciliation à la fois de sa fonction « législative » avec celle « d’actionnaire ». On peut en effet douter de son indépendance dans sa prise de décisions. Même si au Canada ou en France, il n’y a pas de dispositions législatives qui sanctionnent directement l’absence d’indépendance des administrateurs, un certain nombre de recommandations réglementaires et de décisions jurisprudentielles confirme ce principe[6]. Selon une recommandation de la Commission européenne du 15 février 2005, « (…) un administrateur ne devrait être considéré comme indépendant que s’il n’est lié par aucune relation d’affaires, familiale ou autre qui crée un conflit d’intérêts de nature à altérer sa capacité de jugement »[7]. De même, au Québec, le règlement 52-110 sur le comité d’audit définit dans son article 1.4 2) l’indépendance comme relation importante, directe ou indirecte, avec l’émetteur dont le conseil d’administration pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle nuise à l’indépendance du jugement d’un membre du comité. Or, ce qui nous parait probable c’est que l’Etat législateur soit tenté d’adopter un certain nombre de mesures législatives ayant pour but de donner un avantage concurrentiel à l’entreprise dont il est actionnaire. Tel a été le cas de l’État français avec l’adoption de la loi Florange en 2014. Cette loi permet la généralisation du droit de vote double pour les actionnaires présents depuis plus de deux ans au capital d’une entreprise. Au final, l’État est le grand gagnant de cette mesure ! « Une étude Exane BNP Paribas dévoilée par les Échos évalue la part du capital que l’État pourrait revendre sans perdre son pouvoir de décision »[8]. Comment peut-on justifier cette action de l’État au regard des principes de gouvernance ? Les administrateurs doivent agir de manière indépendante et dans l’intérêt exclusif de la société. Comment peut-on justifier cette action de l’État au regard de l’esprit même de la loi qui doit poursuivre un objectif d’intérêt général ? On voit là apparaître une nouvelle facette de l’État. « On ne connaissait pas jusqu’ici l’État raider capable, comme un spéculateur, d’user de la loi pour perpétrer un coup de force et s’arroger des avantages indus violant ainsi, sinon la lettre, du moins l’esprit de la Loi »[9].

 Le Québec ne dispose pas encore d’un tel avantage ; les familles Bombardier et Beaudoin possèdent toujours 85 % des actions à dix droits de vote. Par conséquent, même si un jour, le gouvernement exerce ses bons de souscription, il ne contrôlera pas la majorité des droits de vote alors même qu’il détient la majorité du capital. Néanmoins, il jouit de certains privilèges que n’ont pas les autres investisseurs. Par exemple, dans le cas d’une faillite, ses créances sont habituellement prioritaires à celles des autres créanciers. Il ne faut toutefois pas oublier la facette politique de cette action. En effet, de nombreux emplois ont été sauvés : « Le secteur de l’aérospatiale au Québec, c’est 13,8 G$, 204 entreprises et 41750 travailleurs hautement spécialisés »[10]. L’expression sarcastique américaine de « Pork Barrel » pourrait parfaitement bien s’appliquer à cette situation.

Conclusion

Ottawa pourrait rompre ce nouvel équilibre en investissant, tout comme Québec, un milliard de dollars. Si jamais une telle contribution venait à se réaliser, alors, les gouvernements disposeraient d’une majorité au conseil d’administration. François Legault a fait part de ses craintes vis-à-vis de cette situation : « Moi, j’ai froid dans le dos de voir une situation comme celle-là »[11].

Il reste à souligner que cet investissement a été fait avec l’argent des contribuables. Il aurait peut-être été intéressant que ces derniers aient la possibilité d’exprimer leur consentement vis-à-vis de la manière dont leur argent a été placé (la mise en œuvre n’est pas simple, mais elle mérite d’être envisagée). Surtout que la gestion et la capacité de Bombardier à générer des bénéfices suscitent de nombreuses réserves. Ajoutons que malgré l’investissement du Québec dans Bombardier, l’entreprise continue de délocaliser ces emplois sans que le gouvernement s’en mêle[12]. Finalement, il y avait forcément un intérêt sous-jacent à un tel investissement… intérêt plus ou moins critiquable mais qui devrait être pleinement compris.

Mailys Hoff

Julia Nakache

Étudiants du cours de Gouvernance de l’entreprise – DRT-7022


[1] Pour une liste, vois la page 50 du document suivant : Gouvernement du Québec, « Moderniser la gouvernance des sociétés d’État : Énoncé de politique », avril 2006.

[2] « Bombardier : une perte de 4,9G$ et une participation de 1G$ de Québec », Les affaires, octobre 2015.

[3] K. Rettino-Parazelli, « Investir doit être payant pour l’Etat, selon Jacques Daoust », Le Devoir, 23 septembre 2014, en ligne : http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/419176/developpement-economique-pas-de-resultat-pas-d-investissement-selon-jacques-daoust.

[4]  E. Forsans, « Québec investit 15 millions de dollars dans l’industrie du jeu vidéo », afjv, 16 novembre 2015, en ligne : http://www.afjv.com/news/5688_quebec-investit-15-millions-dans-l-industrie-du-jeu-video.htm.

[5] Le monde, « L’État monte à près de 20 % dans le capital de Renault », 8 avril 2015, en ligne : http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/04/08/l-etat-monte-a-pres-de-20-dans-le-capital-de-renault_4611244_3234.html#ZoCFglZfJMzR1osA.99.

[6] Voir la décision américaine : re oracle Corp. Derivative Litigation, Del. Ch. 824 A.2d917 (2003).

[7] Recommandation de la Commission concernant le rôle des administrateurs non exécutifs et des membres du conseil de surveillance des sociétés cotées et les comités du conseil d’administration ou de surveillance, Commission des communautés européennes, 2005/162 /CE, 15 février 2005, en ligne : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2005:052:0051:0063:FR:PDF.

[8] J. Babin, « Ce qu’il faut savoir sur la loi Florange », Challenges, 14 avril 2015, en ligne : http://www.challenges.fr/economie/20150414.CHA4911/ce-qu-il-faut-savoir-sur-la-loi-florange.html.

[9] E. Cohen, « L’affaire Renault ou l’État raider », telos, 22 avril 2015, en ligne : http://www.telos-eu.com/fr/societe/entreprise/renault-ou-letat-raider-embourbe.html.

[10] M. Charest, « Bombardier : des fournisseurs québécois rassurés, pour l’instant », Les affaires, 7 novembre 2015.

[11] G. Bérubé, « Ottawa et Québec majoritaires ? », Le Devoir, 26 février 2016, en ligne : http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/464025/cseries-ottawa-et-quebec-majoritaires.

[12] R. Dutrisac, « Couillard aux pays des multinationales », Le Devoir, 20 février 2016, en ligne : http://www.ledevoir.com/politique/quebec/463518/quebec-couillard-au-pays-des-multinationales.

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Nos étudiants publient : Vote majoritaire – où en sommes-nous au Canada et aux États-Unis en 2015 ?

Le séminaire à la maîtrise de Gouvernance de l’entreprise (DRT-7022) dispensé à la Faculté de droit de l’Université Laval entend apporter aux étudiants une réflexion originale sur les liens entre la sphère économico-juridique, la gouvernance des entreprises et les enjeux sociétaux actuels. Le séminaire s’interroge sur le contenu des normes de gouvernance et leur pertinence dans un contexte de profonds questionnements des modèles économique et financier. Dans le cadre de ce séminaire, il est proposé aux étudiants depuis l’hiver 2014 d’avoir une expérience originale de publication de leurs travaux de recherche qui ont porté sur des sujets d’actualité de gouvernance d’entreprise. C’est dans cette optique que s’inscrit cette publication qui utilise un format original de diffusion : le billet de blogue. Cette publication numérique entend contribuer au partager des connaissances à une large échelle (provinciale, fédérale et internationale). Le présent billet expose le résultat des recherches de Mme Émilie Bossé et M. Dean Mbimbe-Sosso. Ce travail aborde le majoriity voting en s’intéressant à son actualité nord-américaine la plus criante. Je vous en souhaite bonne lecture et suis certain que vous prendrez autant de plaisir à le lire que j’ai pu en prendre à le corriger.

Ivan Tchotourian

En 2006, la Coalition Canadienne pour la bonne gouvernance (CCGG) a promulgué la toute première politique relative au vote majoritaire, restant jusqu’à ce jour suivie par bons nombres d’entreprises canadiennes[1]. En 2015, de nouvelles interrogations s’élèvent quant à son efficacité et à son expansion à l’égard de l’élection des administrateurs au sein des corporations.

Afin de faire valoir la démocratie actionnariale, le CCGG propose de redéfinir le concept d’un vote majoritaire en remplaçant le vote à la majorité simple par le vote majoritaire modifié. En effet :

« Traditionnellement, les sociétés par actions publiques canadiennes composent et soumettent une liste de candidats pour l’élection. Les actionnaires qui participent aux suffrages ont alors deux options : soit de voter « pour » la liste proposée telle que décrite dans le circulaire de sollicitation de procurations de la direction, soit de s’abstenir de voter. »[2]

Dès lors, peuvent survenir des situations dans lesquelles un administrateur, unanimement désavoué par les abstentionnistes, peut être intronisé suite à unique vote en sa faveur[3]. De ce fait, le mythe de la démocratie actionnariale, dont l’élan avait récemment été prolongé par l’essor de l’activisme actionnarial, semble n’être qu’un leurre.

Ainsi, le passage du vote à la majorité modifiée devrait permettre aux actionnaires de participer plus efficacement aux élections du conseil d’administration tout en respectant la législation corporative existante et en octroyant à ce conseil la marge de manœuvre nécessaire pour agir dans les meilleurs intérêts de la société par actions.[4]

Pour le meilleur ou pour le pire ?

Au Canada, on remarque actuellement que le système d’élection des administrateurs au sein des corporations canadiennes irrite passablement les actionnaires. Ainsi, Le Mouvement d’Éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC) a-t-il publié un article dénonçant les atteintes portées à la démocratie actionnariale dans le cadre du processus électif s’appuyant notamment sur l’exemple de l’entreprise Québécor[5]. Bien qu’un système de vote à la majorité ait été instauré pour la première fois dans cette entreprise, certaines lacunes semblent entraver la liberté d’exercice des actionnaires. Quand bien même les actionnaires expriment leur avis, celui-ci n’est en rien contraignant pour la direction qui peut même prendre le parfait contrepied, comme dans le cas de M. Michel Lavigne[6] qui avait rassemblé 61,87 % d’abstentionnistes.

Ce qui est ennuyeux est qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé. En effet, si depuis le 30 juin 2014, le Toronto Stock Exchange a conféré un caractère contraignant au procédé voulu par la CCGG ; il n’en demeure pas moins qu’en l’absence de contrainte légale, les dirigeants ne sont pas contraints de suivre l’opinion publique comme le déplore le directeur exécutif de la CCGG (Stephen Erlichman)[7].

Néanmoins, pour les entreprises, il n’est pas toujours évident de remplacer les administrateurs désavoués. Afin de faire face à cette difficulté, deux entreprises canadiennes sont allées puiser leur inspiration au sud de la frontière en important l’« enhanced quorum rules ».

 Pratique importée des Etats-Unis

Au travers de l’« enhanced quorum rules », l’effet du vote des actionnaires se trouve encadré jugulé à un degré légèrement plus élevé que dans l’ancien régime, dans la mesure où la non-élection d’un administrateur ne peut plus survenir que si au moins 50 à 65 % des actionnaires se sont exprimés au cours du scrutin. Néanmoins, si le vote produit un effet, il ne donne pas encore sa « pleine mesure ». Mais cette pratique renforce considérablement la portée du vote majoritaire, lui conférant presqu’un caractère contraignant[8]. L’enhanced quorum assujettit en effet la validité du vote à l’existence d’une corrélation entre les suffrages exprimés et ce qu’ils représentent par rapport à l’ensemble du corps électoral. Le résultat du vote reflète l’opinion de la majorité des votants, mais également, celui d’une importante partie du corps électoral.

Le vote majoritaire suscite incontestablement l’intérêt des Américains. En parallèle de la pratique mentionnée ci-dessus, la loi sur les sociétés par actions du Delaware a fait l’objet d’un amendement conférant une pleine puissance du vote « majoritaire » en bloquant la faculté pour les sociétés de modifier leurs statuts afin de renverser ce quorum[9].

Mais, les États-Unis sont porteurs de leur propre contradiction. En effet, la Security and Exchange Commission a vu sa tentative d’introduction de réforme législative renforçant le droit de vote des actionnaires (réforme prise en application du Dodd Frank Act de 2010) retoquée par l’U.S. Court of Appeals for the D.C. Circuit en 2011.

Une codification : la solution appropriée ?

Entre l’encadrement législatif et la régulation par le marché, il semble que le Canada n’ait pas encore choisi le chemin à emprunter, et ce, bien qu’un certain penchant pour la régulation puisse être observé comme le confessait Stephen Erlichman – non sans amertume – : « It just augers toward saying we need to have legislation » [cela confirme le fait qu’une loi est nécessaire, traduction libre].

 Émilie Bossé et Dean Mbimbe-Sosso

Étudiants du cours de Gouvernance de l’entreprise – DRT-7022


[1] CCGG. « Élections des administrateurs à la majorité », mars 2011, en ligne : http://www.ccgg.ca/site/ccgg/assets/pdf/majvotingpolicyf.pdf.

[2] A. Fratianni, « Le vote majoritaire modifié – un grand pas vers la démocratie corporative », Blogue juridique Edilex, 9 mars 2012, en ligne : http://www.edilex.com/blogue/le-vote-majoritaire-modifie-un-grand-pas-vers-la-democratie-corporative#axzz3tfqaFvqA.

[3] M. Strauss, « Boards of Directors, Meet Democracy », The Globe and Mail, 16 juillet 2015, en ligne : http://www.theglobeandmail.com/globe-debate/editorials/boards-of-directors-meet-democracy/article25539891/.

[4] A. Fratianni, « Le vote majoritaire modifié – un grand pas vers la démocratie corporative », Blogue juridique Edilex, 9 mars 2012, en ligne : http://www.edilex.com/blogue/le-vote-majoritaire-modifie-un-grand-pas-vers-la-democratie-corporative#axzz3tfqaFvqA.

[5] MÉDAC. « Démocratie actionnariale bafouée par Québecor », MÉDAC, mai 2015, en ligne : http://medac.qc.ca/salle-de-presse/communiques/818-democratie-actionnariale-bafouee-par-quebecor

[6] Ibid.

[7] J. McFarland. « Skirting Rules, Board Members Remain in Spite of Lost Support ». The Globe and Mail, 15 novembre 2015, en ligne : http://www.theglobeandmail.com/report-on-business/skirting-rules-board-members-remain-in-spite-of-lost-support/article27266834/.

[8] Ibid.

[9] J. W. Verret, « Pandora’s Ballot Box, or a Proxy With Moxie? Majority Voting, Corporate Ballot Access, and The Legend of Martin Lipton Re-Examined », Social Science Research Network, 13 mars 2007, en ligne : http://papers.ssrn.com/abstract=970013.

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Exemple de gouvernance chez United Airlines

Bel exemple de difficultés de gouvernance d’entreprise (relayé dans le quotidien Les affaires.com ici) dans la société américaine American Airlines ! L’élection des administrateurs au sein du CA se trouve âprement discutée…

La compagnie United Airlines est au centre d’un bras de fer entre son conseil d’administration et deux importants actionnaires qui dénoncent ses «piètres» performances financières malgré la chute des prix du kérosène.

Le conflit a éclaté au grand jour mardi, avec l’annonce par les fonds activistes américains Altimeter Capital Management et PAR Capital Management de présenter des résolutions portant sur la nomination au conseil d’administration de six personnes de leur choix dont Gordon Bethune, ancien directeur général de Continental.

PAR et Altimeter détiennent à eux deux 7,1% du capital de la compagnie aérienne et demandent des changements pour améliorer les résultats financiers de l’entreprise.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Vers un militantisme actionnarial constructif

Le MÉDAC relaie une information percutante relativement aux thématiques du blogue : existerait un militantisme actionnarial constructif ! (ici). Selon le MÉDAC, les investisseurs institutionnels auraient exigé, au cours des dernières années, de plus en plus de transparence, d’engagement et de responsabilité des conseils d’administration à l’égard des performances des entreprises.

Selon un rapport intitulé Global and Regional Trends in Corporate Governance for 2016, la volonté des investisseurs d’avoir accès à plus de divulgations et d’interactions sans langue de bois procéderait d’un désir de contribuer en collégialité à l’amélioration des performances, à l’augmentation de la responsabilité sociale des sociétés et à la progression des pratiques de bon gourvernement d’entreprise, et non simplement de l’idée de leur mettre du sable dans l’engrenage.

Ces constats de la firme Russell Reynolds Associates seraient basés sur des entrevues réalisées auprès de dirigeants et de spécialistes en gouvernement d’entreprise qui évoluent au sein de sociétés de gestion d’actifs, de caisses de retraite, d’associations d’actionnaires et de sociétés de conseil mandataires à travers le monde. Le rapport offre un portrait d’une page pour chacune des grandes régions financières suivantes : les États-Unis-d’Amérique, le Brésil, l’Europe, l’Inde et le Japon.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian