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Nouvelles diverses

Viendrez-vous me lire ? Catherine Malecki recensée

La revue Les Cahiers de droit (Volume 57, numéro 1, mars 2016, p. 212-219) viennent de faire paraître ma dernière recension : Catherine Malecki, « Responsabilité sociale des entreprises. Perspectives de la gouvernance d’entreprise durable », Paris, L.G.D.J., 2014, 484 p., ISBN 978-2-275-04344-9.

Bonne lecture de cette recension en espérant que celle-ci vous donnera envie de lire ce bel ouvrage.

Je vous mets le début :

« Enfin », c’est le premier mot qui nous est venu en tête à la réception et (surtout) à la lecture de l’ouvrage intitulé Responsabilité sociale des entreprises. Perspectives de la gouvernance d’entreprise durable. Enfin, la professeure Catherine Malecki prend le temps de nous livrer ses réflexions personnelles sur les liens entre gouvernance d’entreprise et responsabilité sociétale, et ce, dans un format plus abouti et plus dense que celui des revues juridiques dans lesquelles nous pouvons habituellement la lire (Bulletin Joly, Recueil Dalloz, Semaine juridique). C’est incontestablement un bien bel ouvrage – qui n’est pas sans critiques, critiques que nous développerons ci-après – que nous offre cette auteure prolifique sur un sujet qui l’anime depuis de nombreuses années et pour lequel elle dispose d’une expertise trop rare dans le monde francophone. De prime abord, il nous faut saluer la professeure Catherine Malecki qui vient, par la publication de ce livre, combler un vide littéraire : celui d’un ouvrage traitant de la gouvernance des entreprises (qui plus est, sous l’angle du droit et de la responsabilité sociétale) en langue française et empruntant ses fondements culturels et ses références au monde francophone et européen. Dans un domaine marqué par la prédominance de la pensée et de l’influence anglo-américaines, consacrer 468 pages aux interactions entre droit, gouvernance d’entreprise et responsabilité sociétale au travers de la reddition non financière et du façonnage des comportements des acteurs de la gouvernance, avec un détour par la finance durable et l’investissement socialement responsable, il fallait oser. À notre plus grande satisfaction, la professeure Catherine Malecki a osé, et c’est déjà là tout un mérite de sa part !

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Entrevue avec Benoît Pigé : 5 ans après la publication de son ouvrage

Pour la première fois sur le blogue, nous vous proposons un entretien avec une personnalité de la gouvernance d’entreprise. Cette initiative sera reconduite plusieurs fois dans l’année et entend faire partager des travaux trop rarement diffusés et des visions originales touchant la gouvernance d’entreprise et la responsabilité sociétale.

Aujourd’hui, je vous propose de nous entretenir avec le professeur Benoît Pigé de l’Université  de franche Comté, membre du Laboratoire d’économie et de gestion (LEG). Avec lui, je reviens sur 5 ans après la publication de son ouvrage « Éthique et gouvernance des organisations » (Économica, 2010).

  1. Votre livre a-t-il été bien reçu auprès du public et des spécialistes ?

En fait, ce livre a rencontré très peu d’écho. En étant sévère, je dirai que ce livre n’a rencontré aucun écho qui me soit revenu, et ce blogue est la première réelle manifestation d’intérêt pour les idées développées dans ce livre. 

  1. Les choses ont-elles changé depuis la parution du livre ?

Non, ce livre est structuré en deux parties. La première qui montre la rigueur du raisonnement financier et, en même temps, ses limites dues aux hypothèses que l’on tend souvent à oublier sur la supposée complétude et efficience des marchés. La seconde partie propose de repartir de l’être humain pour fonder un modèle de gouvernance. Le point déterminant, et original, de la thèse qui est défendue dans ce livre est qu’une approche orientée vers les parties prenantes ne peut se faire qu’en intégrant l’exposition au risque des parties prenantes. Alors qu’on considère fictivement que seuls les actionnaires supportent le risque résiduel de l’entreprise, la réalité ne cesse de démontrer que toutes les parties prenantes supportent de façon diverse le risque de l’entreprise. S’intéresser aux parties prenantes suppose de mettre en place une gouvernance qui permette de confronter les attentes et les expositions au risque des diverses parties prenantes pour trouver des solutions qui sont nécessairement des conciliations entre des attentes et des points de vue divers. Mais cette conciliation ne peut pas s’exercer in abstracto, dans le vide, elle se déroule nécessairement dans un environnement normatif (institutionnel) qui est spécifique à chaque communauté, à chaque pays, à chaque territoire. 

  1. La direction des entreprises se montre-t-elle aujourd’hui plus ouverte aux parties prenantes ?

Il est certain que le concept de parties prenantes s’est imposé aux entreprises. Il suffit de lire les rapports de développement durable ou de responsabilité sociale des entreprises pour s’en rendre compte. Mais cette utilisation du concept de parties prenantes est très instrumentale. Elle permet aux entreprises multinationales de montrer qu’elles sont ouvertes sur le monde tout en ayant un outil pour appréhender analytiquement leurs partenaires. Cela ne signifie malheureusement pas que, dans leurs objectifs, elles aient réellement fait passer ces partenaires (ces parties prenantes) du statut de ressources nécessaires à celui de finalités de l’entreprise. 

  1. La gouvernance des entreprises s’est-elle modifiée ou demeure-t-elle ancrée dans une perspective américaine ?

Il me semble que la situation est en train d’évoluer, à la suite notamment des grands drames naturels survenus à Fukushima, dans le golfe du Mexique ou dans les usines de sous-traitants au Bangladesh; à la suite également de l’essor de la dimension écologiste dans les habitudes de consommation des ménages occidentaux. Comme toute situation en voie de modification, il me semble qu’on assiste à une plus grande radicalité dans les comportements, avec certaines entreprises plus que jamais orientées vers la recherche du profit à tout prix, et d’autres entreprises qui essaient de rechercher des voies originales de développement, le tout n’étant évidemment ni linéaire (il peut y avoir simultanément des avancées et des reculades sur cette recherche d’une plus grande intégration de l’économique du social et de l’environnemental) ni manichéen.

  1. Que faudrait-il faire pour aller de l’avant ?

Une solution, sur laquelle je travaille et qui a donné lieu à un programme de recherche déjà bien structuré, porte sur le rôle central du territoire. Parce que le territoire est le lieu où l’être humain s’inscrit dans le réel, s’incarne dans le monde, le territoire est le lieu où les liens, les relations entre l’entreprise et ses parties prenantes, peut s’analyser. 

  1. Comment voyez-vous le futur de l’éthique dans les entreprises ?

Inéluctable, mais en changeant de paradigme. Le paradigme actuel conçoit l’éthique dans une logique purement individuelle: l’être humain est une ressource qu’il faut respecter au même titre que les animaux et notre environnement naturel. Mais, dans cette réflexion, on oublie que l’être humain et aussi un être en société. Il n’est pas possible de séparer l’être humain en tant qu’individu, être biologique et être social (je ne fais que citer Edgard Morin dans son éloge de la complexité).

Pour en savoir plus sur Benoît : cliquez ici.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

autres publications Nouvelles diverses

Gouvernance : nouveaux mythes, nouvelles réalités

Un beau titre non ? Si vous voulez en savoir plus, je vous renvoie à l’article de ma collègue Isabelle Cadet : CADET I. (2014), « Gouvernance : nouveaux mythes, nouvelles réalités », Vie & sciences de l’entreprise, vol. 2, n° 198, p. 17 (ici).

Le résumé est le suivant : Le terme de « gouvernance » serait né en France au XIIème siècle avec un sens technique : la direction des bailliages. Il provient, étymologiquement, de l’anglais, governance, au sens de gouvernement, venant lui-même du latin “gubernare”, diriger un navire. Ce mot resurgit dans la langue anglaise dans le dernier quart du XXème siècle pour désigner « ce processus d’organisation et d’administration des…

Je vous livre aussi la conclusion de cette réflexion (mais chut…) : La gouvernance en réseau, et l’expression est presque un pléonasme, pose des dilemmes éthiques (Dionne-Proulx et Larochelle, 2010). Car ces formes modernes de gouvernement sans hiérarchie aucune apparaissent comme une nouvelle stratégie de contrôle social (Dufour, 2009) au profit des parties prenantes les plus puissantes très éloignée de l’intérêt général. Dans ce champ de forces qui se dessine, on peut considérer que le réseau prend le pas sur les modes hiérarchiques traditionnels, tant au niveau de la gouvernance internationale qu’au niveau du gouvernement d’entreprise. A terme, il n’est pas exclu que des hiérarchies se reforment, tel un empire sans territoire de rattachement, à l’issue de ce nouveau Moyen-âge (Minc, 1993).

À la prochaine…

Ivan Tchotourian