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Évitement fiscal des entreprises : où est la RSE ?

« Se soustraire au fisc avec la bénédiction des autorités » (Le Devoir, 20 octobre 2016) est un article qui résonne dans le contexte de ce blogue tant il aborde la responsabilité sociétale des grandes entreprises en toile de fond.

 

Même s’ils voient chaque année des dizaines de milliards de dollars leur échapper en raison de l’évasion et de l’optimisation fiscales, les gouvernements tardent à s’attaquer aux grandes entreprises, principales responsables de ce fléau. Une situation qui devrait susciter l’indignation de la population, ce qui est loin d’être le cas à l’heure actuelle, déplorent l’ex-directeur de l’Unité anticollusion du Québec, Jacques Duchesneau, et d’éminents fiscalistes.

« On a laissé des empires clandestins se créer et un jour, ce sont eux qui vont nous prêter de l’argent à taux élevé, lance M. Duchesneau, qui siège actuellement au conseil d’administration de l’organisme Transparency International. Au Japon, ces empires ont pris la taille de Sony et Toyota fusionnées… multipliée par quatre. Ils ont une influence politique énorme. Ils ne paient pas d’impôts. Il y a de quoi s’inquiéter. »

 

Critiques intéressantes soulevées dans l’article :

 

Le jour où il sera politiquement « payant » pour les gouvernements d’agir quant à l’évasion, ceux-ci s’empresseront de le faire avec plus d’énergie, croient ces deux experts.

Autre problème : nos lois fiscales sont très peu adaptées à la réalité des entreprises modernes, qui oeuvrent dans une multitude de pays et selon des modèles qui évoluent très rapidement, estime François Auger, associé chez Blakes et expert de l’impôt des sociétés. « L’économie se transforme, elle est plus diffuse. Il y a des modèles d’affaires qui n’existaient pas autrefois. Demandez à l’Agence du revenu du Canada comment elle va taxer les bitcoins ou le crowdfunding [financement participatif], ou l’économie du partage. Les lois n’ont pas été faites pour gérer cette modernité-là », s’exclame-t-il.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance responsabilisation à l'échelle internationale Structures juridiques

La gouvernance dans un contexte multidimensionnel

Dans le bulletin À l’ordre du jour du conseil, Deloitte aborde la gouvernance dans un contexte d’entreprises multinationales : « La gouvernance dans un contexte multidimensionnel » (octobre 2016).

Depuis des décennies, les entreprises mettent sur pied des filiales pour élargir leurs activités, pénétrer de nouveaux marchés ou atténuer leurs risques. L’objectif derrière la création d’une filiale est souvent bien défini, mais peu d’attention est accordée à sa gouvernance, qu’on a tendance à laisser évoluer par elle-même.

Dans ce numéro, vous découvrirez l’importance des mesures suivantes :

  • confier à un haut dirigeant la responsabilité de gérer les filiales de l’entreprise, de superviser leurs pratiques de gouvernance et de veiller à ce que celles-ci s’harmonisent avec les exigences de la société mère afin que l’entreprise parvienne à mieux gérer son exposition au risque dans son écosystème élargi.
  • classer les filiales en fonction de leur importance pour la société mère et adapter les pratiques en matière de gouvernance à chacune des catégories de filiales afin de consacrer davantage de temps et de ressources aux filiales qui en ont le plus besoin.
  • tenir des réunions conjointes, faire appel à des administrateurs communs et adopter d’autres pratiques afin d’établir des relations responsables et transparentes entre le conseil de la société mère et ceux des filiales, favorisant ainsi l’établissement de relations de collaboration, la création de synergies et l’harmonisation des stratégies.
  • créer un équilibre entre les processus de surveillance des risques et de contrôle interne de la société mère et des filiales pour renforcer l’entreprise dans son ensemble grâce à une tolérance au risque et à des mesures d’atténuation appropriées.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Normes d'encadrement normes de droit responsabilisation à l'échelle internationale Structures juridiques

Grandes entreprises et droit : quel encadrement ?

La Revue internationale de droit économique (2016/2) vient de publier un numéro consacré à une belle thématique : Les grandes entreprises échappent-elles au droit ?. Droit pénal, délinquant, notation de crédit, conformité, codes de gouvernance, américanisation sont au programme de ce beau numéro :

  • Marjorie Eeckhoudt, Propos introductifs
  • Thierry Bonneau, Les conflits d’intérêts dans le règlement agence de notation du 16 septembre 2009
  • Markus Krall, Gouvernance et conflits d’intérêts dans les agences de notation financière
  • Antoine Garapon, Astrid Mignon Colombet, D’un droit défensif à un droit coopératif : la nécessaire réforme de notre justice pénale des affaires
  • Bjorn Fasterling, Criminal compliance – Les risques d’un droit pénal du risque
  • Brandon L. Garrett, Le délinquant d’entreprise comme bouc émissaire

 

À la suite de la dernière crise économique globale, les législateurs français et européen ont été contraints de repenser un droit qui n’était plus adapté aux grandes entreprises de la finance. Dans ce contexte de lutte contre la délinquance financière, la législation européenne des agences de notation illustre le retour à la réglementation et la fin de l’autorégulation. Elle s’inspire de la législation américaine et vise à dépasser les nombreux obstacles propres aux grandes entreprises liés à la taille, la complexité organisationnelle ou encore la multiplication des services proposés. Aux États-Unis, le législateur tente de juguler ces obstacles en imposant aux grandes entreprises un système de compliance visant à adopter des règles de conformité, puis à collaborer avec la justice pénale en cas d’infraction. Ainsi, sous la pression des décisions américaines, les grandes entreprises françaises et européennes sont contraintes d’adopter des codes de bonne conduite. Se dessine progressivement un droit global inspiré des États-Unis exportant les règles de gouvernance d’entreprise et dont on peut interroger l’efficacité.

 

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Ivan Tchotourian

Nouvelles diverses Structures juridiques Valeur actionnariale vs. sociétale

L’entreprise a-t-elle une âme ?

Bonjour à toutes et à tous, c’est avec cette question que Michael Dorff (« Can a Corporation Have a Soul? ») ouvre un beau débat dans The Atlantic ? Merci à Mme Louise Champoux-Paillé d’avoir diffusé l’information sur cet article sur LinkedIn…

 

In light of recent corporate scandals such as Wells Fargo’s, one can be excused for wondering whether corporations seek anything beyond profits for their shareholders by any means necessary. In these days of activist hedge funds pressing companies for ever more share buybacks, is there room for a company that cares about its workers, the environment, or the communities in which it does business? In other words, can a company have a soul?

Mark Fields, the CEO of Ford Motor Company, believes so. In an interview with Fortune, he called Ford “a company with a soul,” pointing to a long-held policy of donating money and employees’ volunteer hours to the communities in which the company operates and to the company’s high rankings for good corporate behavior by an organization called the Ethisphere Institute. Fields quoted the company’s founder, Henry Ford, as saying, “A business that earns nothing but money is a poor business.”

 

Et la conclusion :

 

In the absence of any radical new regulations, for American-style capitalism to work again for the middle class as well as for the wealthy, more CEOs like Fields are going to have to adopt ambitious plans for implementing Henry Ford’s advice, plans that stretch far beyond making some charitable donations and implementing sustainability initiatives. They are going to have to give their companies true souls.

 

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Ivan Tchotourian

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L’art de jouer avec le droit : où est la RSE ?

Très beau papier dans The Economist intitulé « The Dark Art ». Cet article revient sur la puissance des grandes entreprises qui leur permet de développer des stratégies favorisant leurs seuls intérêts au détriment de celui des États et des consommateurs (évasion fiscale, lobbying…)

 

Companies are by nature competitive. That is mostly to be welcomed, but sometimes their competitive instincts play out in less welcome ways as they engage in some of the darker arts of management. The two most obvious ones are to pay as little tax as is legally possible, and to lobby governments and a variety of other bodies to gain an advantage over rivals. To a greater or lesser extent all companies do this. The big difference is that the superstar companies, being good at everything they do, are also much better than the rest at practising these dark arts and taking them mainstream

 

Les moyens des grandes entreprises les conduisent à être bonnes dans beaucoup de domaines dont celui de jouer avec les règles juridiques ou de les orienter :

 

This raises three worries. The first is that they will keep getting better at them, applying the same creative excellence to rule-bending as they do to running their business in general. Second, superstars might use the combination of these and other skills to build up impregnable advantages, giving them growing monopoly power. Third, as their businesses become more mature, they may come to rely increasingly on those dark arts.

 

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Ivan Tchotourian

Gouvernance Normes d'encadrement Structures juridiques

Gouvernance des banques : une analyse de l’ECGI

Excellent Law Working Paper de l’ECGI (No. 316/2016) de John Armour, Dan Awrey, Paul L. Davies, Luca Enriques, Jeffrey N. Gordon, Colin Mayer et Jennifer Payne consacré à la gouvernance d’entreprise des banques : « Bank Governance ».

 

Voici le résumé :

 

According to a common narrative, in addition to inadequate capital and liquidity, the failure of banks in the financial crisis also reflected their poor governance. By governance we mean broadly the oversight that comes from banks’ own shareholders and other stakeholders of the way in which they are run.

The problem of bank governance stems from the way in which banks are financed and regulated, from the externalities bank failures produce, and from the nature of their assets. In the period leading up to the financial crisis, it was believed that regulation would cause banks to internalize the costs of their activities, meaning that what maximized bank shareholders’ returns would also be in the interests of society.

Consequently large banks used the same governance tools as non-financial companies to minimize shareholder-management agency costs, namely independent boards, shareholder rights, the shareholder primacy norm, the threat of takeovers, and equity-based executive compensation. Unfortunately, such tools had the adverse effect of encouraging bank managers to take excessive risks: as we describe in this chapter, banks that had the most ‘pro-shareholder’ boards and the closest alignment between executive returns and the stock price were those which took the most risks prior to, and suffered the greatest losses during, the crisis.

Consequently, a significant rethink about the way in which banks are governed is required. The structure and function of bank boards, the compensation of bank executives and the function of risk management within organizations needs careful crafting if governance reforms are to address not exacerbate bank failures.

 

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Ivan Tchotourian

objectifs de l'entreprise Structures juridiques Valeur actionnariale vs. sociétale

Des entreprises progressistes… vraiment ?

Un récent sondage réalisé pour Entreprise et Progrès et relayé par Les Échos.fr montre un certain décalage entre la perception des chefs d’entreprise et les citoyens : « Votre entreprise est-elle vraiment progressiste ? ».

 

« Faire de l’entreprise un bien commun » ? 18% des dirigeants d’entreprise annoncent aujourd’hui cet objectif comme prioritaire, selon le récent sondage réalisé par Opinion Way pour l’association Entreprise et Progrès et Generali * sur le thème « Les entreprises françaises sont-elles progressistes  ? ».

L’enquête qui se penche sur l’évolution de l’implication des chefs d’entreprise en matière de RSE met aussi en relief un décalage entre deux perceptions : quand 89% des dirigeants estiment devoir placer l’impact sociétal de leur activité au même plan que la performance économique, les Français interrogés jugent _ quasiment dans les mêmes proportions (81%) _ que l’entreprise… reste uniquement tournée vers la rentabilité.

 

Pour celles et ceux que le mouvement progressistes intéressent, plusieurs juristes de renom s’y intéressent :

  • Claude Champaud, dir, L’entreprise dans la société du 21e siècle, Bruxelles, Larcier, 2013; Claude Champaud, Manifeste pour la doctrine de l’entreprise : Sortir de la crise du financialisme, Bruxelles, Larcier, 2011.
  • Isabelle Corbisier, « L’entreprise : Quelles sont ses valeurs fondatrices et ses finalités ? » dans Nicolas Thirion, dir, Crise et droit économique, Bruxelles, Larcier, 2014, 175 et aussi Isabelle Corbisier, La société : contrat ou institution ? Droits étatsuniens, français, belge, néerlandais, allemand et luxembourgeois, Bruxelles, Larcier, 2011.
  • Simon Deakin, « The Juridical Nature of the Firm » dans Thomas Clarke et Douglas Branson, dir, The SAGE Handbook of Corporate Governance, Londres, SAGE, 2012, 113.
  • Kent Greenfield, « Saving the World With Corporate Law » (2008) 57 Emory LJ 947; Kent Greenfield, « New Principles for Corporate Law » (2005) 1 Hastings Bus LJ 87.
  • Andrew R Keay, The Corporate Objective: Corporations, Globalisation and the Law, Cheltenham, Edward Elgar, 2013.
  • Catherine Malecki, Responsabilité sociale des entreprises : Perspectives de la gouvernance d’entreprise durable, Paris, LGDJ, 2014.
  • David K Millon, « Why Is Corporate Management Obsessed with Quarterly Earnings and What Should be Done About It? » (2002) 70 Geo Wash L Rev. 890; David K Millon, « New Directions in Corporate Law: Communitarians, Contractarians, and Theorisis in Corporate Law » (1993) 50 Wash. & Lee L Rev 1373 ; David K Millon, « Redefining Corporate Law » (1991) 24 Ind L Rev 233; David K Millon, « Theories of the Corporation » (1990) 39 Duke LJ 201.
  • Lawrence E Mitchell, Corporate Irresponsibility: America’s Newest Export, New Haven, Yale University Press, 2001 ; Lawrence E Mitchell, dir, Progressive Corporate Law, Boulder, Westview Press, 1995.
  • Beate Sjåfjell et Benjamin Richardson, Company Law and Sustainability: Legal Barriers and Opportunities, New York, Cambridge University Press, 2015 et Beate Sjåfjell, Towards A Sustainable EU Company Law: A Normative Analysis of the Objectives of EU Law, with the Takeover Directive as a Test Case, European Company Law Series, Kluwer Law International, 2009.
  • Lynn A Stout, The Shareholder Value Myth, San Francisco, Berrett-Koehler, 2012 ; Lynn A Stout, « Why We Should Stop Teaching Dodge v. Ford » (2008) 3:1 Va L & Bus Rev 163 ; Lynn A Stout, « Takeovers in the Ivory Tower: How Academics Are Learning Martin Lipton May be Right » (2005) 60 Bus Lawyer 1435 ; Lynn A Stout, « Share price as a Poor Criterion for Good Corporate Law » (2005) UCLA School of Law Document de travail No 05-7, en ligne: <http://papers.ssrn.com/abstract=660622> ; Lynn A Stout, « Bad and Not-So-Bad Arguments for Shareholder Primacy » (2002) 75:5 S Cal L Rev 1189.
  • Alain Supiot, La gouvernance par les nombres, Paris, Éditions Fayard, 2015 ; Alain Supiot, dir, L’entreprise dans un monde sans frontières – Perspectives économiques et juridiques, Collection les sens du droit, Paris, Éditions Dalloz, 2015.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian