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Gouvernance Nouvelles diverses

COVID-19 : actionnaires v. retraités

Dans La presse, Stéphanie Grammond livre une belle réflexion dans sa chronique intitulée « Les retraités avant les actionnaires » (26 avril 2020). Très intéressant et qui rappelle le chapitre du livre que j’ai rédigé avec mon collègue Charles Tremblay-Potvin à paraître « Sears Canada : les retraités sacrifiés à l’aune de la primauté actionnariale ? » dans Droit des aînés (éditions Yvon Blais).

Extrait :

À la mi-avril, Ottawa a annoncé un assouplissement temporaire pour donner du lest aux employeurs qui parrainent un régime de retraite à prestations déterminées. Or, ces mesures affaibliront la protection des rentes à un moment où les régimes traversent une tempête parfaite.

(…)

Vu à l’envers, il y a maintenant un « trou » de 11 % dans les caisses de retraite, un déficit qui doit être comblé par des cotisations spéciales des employeurs.

Mais comme les sociétés grattent les fonds de tiroir, Ottawa a décrété un moratoire sur ces cotisations pour 2020 et laisse entrevoir un allégement pour 2021 pour les entreprises de compétence fédérale (ex. : transports, banques, télécoms).

Au Québec, les sociétés ont déjà eu de l’oxygène ces dernières années. Leurs cotisations ne sont plus établies en fonction du ratio de solvabilité qui donne le portrait en cas de faillite. Elles le sont plutôt en fonction d’un ratio de « capitalisation améliorée » qui permet l’utilisation d’hypothèques plus accommodantes fondées sur la « continuité des affaires », un concept qui semble bien fragile en cette ère de pandémie.

(…)

Les gouvernements font le pari que ces assouplissements aideront les entreprises à survivre et à payer des rentes pleines et entières. Mais en cas de faillite, les retraités seront doublement perdants, car ils se retrouveront avec une rente amputée plus sévèrement.

D’où l’urgence de trouver des solutions pour mieux les protéger.

Malheureusement, il est trop tard pour lancer un fonds de garantie des prestations de retraite comme en Ontario. Quand un 18 roues est sur le point d’emboutir votre voiture, ce n’est plus le temps d’appeler l’assureur.

Par contre, on devrait changer les lois encadrant les faillites pour donner une « super-priorité » aux retraités. Actuellement, ils sont considérés comme des créanciers ordinaires, ce qui ne leur laisse que des miettes une fois que les autres se sont servis.

(…) Mais les entreprises qui ont un régime de retraite déficitaire ne devraient pas avoir le droit de racheter leurs actions, à plus forte raison si elles ont reçu l’aide du gouvernement. Pourquoi les cadeaux aux actionnaires passeraient-ils avant les promesses aux retraités ?

À la prochaine…

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COVID-19 : où sont la RSE et les parties prenantes ?

Dans FastCompany, le journaliste Christopher Zara publie un intéressant article reprenant une étude menée actuellement par The Conference Board sur la réduction des rémunérations : « Pandemic pay cuts: The growing list of companies reducing salaries during COVID-19 ». Le constat est éloquent pour l’application de la RSE et de la théorie des parties prenantes par les entreprises, je vous le laisse découvrir ci-dessous :

Extrait :

More than 30 million Americans have filed for unemployment benefits since the economy first began to unravel due to the coronavirus pandemic. That figure may not count untold millions of freelancers or self-employed individuals who are also out of work, nor does it factor in countless people who simply couldn’t get through to their state labor department to file a claim. And of those who are still working, many are making considerably less money due to reduced hours.

And then there are the company-imposed pay cuts. Over the past few weeks, the Conference Board has been tracking pay reduction announcements for publicly traded companies, using SEC filings by firms listed in the Russell 3000 Index.

Some the findings may surprise you: For instance, the salary reductions are not just hitting top executives and their fat bonuses. At last count, 61% of the affected companies applied pay reductions to the base salaries of senior managers who make less than top-tier executives, the Conference Board says. It adds that 11% of all companies in the index announced base pay cuts between March 1 and April 24.

The good news is, the announcements peaked in early April and have declined a bit in recent weeks. The bad news? The group anticipates a “second wave” of salary reductions could emerge in the weeks ahead as the ripple effects of COVID-19 continue to wreak havoc on bottom lines.

The Conference Board posted the insights in a new report that also includes a wealth of data visualizations and the full list of companies. It says the list will be updated weekly as long as the crisis continues. The data is being compiled in collaboration with consulting firm Semler Brossy and Esgauge Analytics. It shows that the industries hardest hit by the coronavirus are what you would expect, including retail and hospitality.

À la prochaine…

Gouvernance Nouvelles diverses Responsabilité sociale des entreprises

RSE : il faut éviter la régression post COVID-19

Belle tribune de mon ami Yann Queinnec dans Les Échos.fr (6 mai 2020) : « La RSE à l’épreuve du Covid-19 ». En un mot : vigilance… il faut éviter la régression des entreprises en matière de RSE !

Extrait :

(…) Attention. Un autre son de cloche se fait déjà entendre. La crise est aussi propice à une offensive remettant en cause les quelques acquis de ces dernières années en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

Le danger d’une régression est bien réel. Il traduit la trop faible prise au sérieux de la RSE au sein des états majors des plus grands Groupes. Comment faire en sorte au contraire que cette crise inédite devienne un accélérateur de la mutation vers une économie plus soutenable ?

Il s’agit de consolider les acquis et d’accélérer la mutation, massivement. C’est tout l’enjeu des prochaines semaines et prochains mois. La RSE doit trouver sa place au plus haut niveau des organigrammes et des agendas stratégiques de l’après. Il s’agit de capitaliser sur la solidarité redécouverte pour transformer la dynamique en impacts tangibles et satisfaire les attentes grandissantes de performances extra-financières exprimées par la société.

Pour ce faire, chaque entreprise doit s’approprier la culture de l’impact sociétal. Cette culture d’entreprise, portée par des valeurs de dialogue et de solidarité ne peut se limiter à trouver sa raison d’être sociétale, aussi séduisante et mobilisatrice soit-elle. Seule, une raison d’être n’est rien.

Les enjeux devant nous appellent à un alignement des agendas sur des objectifs d’impacts positifs partagés. Il s’agit donc de créer les conditions de la confiance avec des acteurs qui ont légitimement des doutes sur les intentions réelles, tant la RSE ne s’est bien souvent réduite qu’à un discours de façade.

Et cela commence naturellement par les équipes internes. Chaque collaborateur doit, non seulement être sensibilisé, mais convaincu de l’ambition d’impact positif de son entreprise et de son rôle pour l’atteindre.

Quant aux parties prenantes externes, l’entreprise va devoir apprendre à les intégrer toujours plus, dans ses processus de décision et dans ses actions. Jouer franc-jeu sur les enjeux et les contraintes sera le meilleur moyen de créer la confiance. Savoir faire émerger des objectifs partagés et mobiliser autour de soi, des ONG jusqu’aux compétiteurs, va devenir un savoir-faire à haute valeur ajoutée sociétale.

(…) Cette pandémie peut faire passer la RSE à l’âge adulte. La responsabilité sociétale et extra-financière devient le nouveau curseur éthique, guidant autant les modalités de recrutement et de rémunération, les budgets de R&D, l’adaptation de l’offre de produits et services, que les stratégies fiscales responsables.

À la prochaine…

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Droit de vote : son importance rappelée

Le 3 mai 2020, l’AMF France vient de rappeler le droit fondamental des actionnaires d’exprimer leur vote en assemblée générale. Un rappel pertinent me semble-t-il !

Extrait :

En amont de la tenue d’assemblées générales, dont certaines peuvent donner lieu à de vives contestations, l’AMF rappelle le droit fondamental des actionnaires d’exprimer leur vote en assemblée générale, dont le caractère d’ordre public a été rappelé par la jurisprudence et qui doit s’exercer dans le respect du principe d’égalité des actionnaires.

Si un dialogue actionnarial, et notamment des échanges entre les dirigeants sociaux (ou leurs mandataires) d’un émetteur et des actionnaires, peut naturellement intervenir en amont d’une assemblée générale, de telles démarches ne sauraient se traduire par des pressions de nature à compromettre la sincérité du vote ou à entraver la libre expression du vote des actionnaires, ou intervenir en violation du règlement (UE) n° 596/2014 du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

Il est rappelé qu’aux termes de l’article L. 242-9 du code de commerce, constituent un délit le fait d’empêcher un actionnaire de participer à une assemblée d’actionnaires ainsi que le fait de se faire accorder, garantir ou promettre des avantages pour voter dans un certain sens ou pour ne pas participer au vote, ainsi que le fait d’accorder, garantir ou promettre ces avantages. 

À la prochaine…

Nouvelles diverses

Aider les entreprises en difficulté : la fausse bonne idée des États ?

C’est à cette réflexion que nous convie M. Philippe LeBlanc dans un intéressant billet de blogue publié dans Les affaires : « Le gouvernement doit-il sauver les entreprises en Bourse? » (1er mai 2020).

Extrait :

Je suis d’avis que ce qui importe est de sauver les emplois, pas les actionnaires des entreprises. La Loi sur la faillite et l’insolvabilité a été créée dans le but de permettre aux entreprises de poursuivre leurs activités pendant qu’elles s’entendent avec leurs créanciers. Cette loi est un rouage essentiel du système capitaliste et il fonctionne généralement très bien.

Pourquoi faudrait-il que l’on indemnise les actionnaires de sociétés en difficulté, en particulier ceux des grandes entreprises cotées en Bourse?

De plus, l’idée d’aider les entreprises les plus en difficulté soulève un problème moral. Pourquoi aider une entreprise particulière plutôt qu’une autre? Qui décide qui obtiendra de l’aide et comment résister aux puissants lobbys des grandes entreprises?

Et indemniser les sociétés les plus en difficulté n’encouragera-t-il pas les entreprises à prendre des risques excessifs dans le futur? Pourquoi un dirigeant devrait-il gérer son entreprise prudemment s’il sait qu’il pourra compter sur l’aide du gouvernement en cas de pépin financier?

Je crois que certaines exceptions méritent un sauvetage par le gouvernement. Par exemple, la décision du gouvernement américain de venir à la rescousse des grandes banques américaines pendant la crise financière de 2008-2009 était, à mon avis, la bonne décision. Leur faillite aurait ébranlé la confiance des épargnants, le fondement même de tout le système financier. Qui sait ce qui serait survenu et à quel point l’économie se serait effondrée si le gouvernement américain n’avait pas aidé les grandes banques pendant la crise financière de 2008-2009?

Mais il y a une grande différence entre aider une entreprise à survivre afin de préserver des emplois directs et indirects et venir à la rescousse de ses actionnaires.

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Shareholder Primacy in the Time of Coronavirus

Bel article qui amène à réfléchir : Akshaya Kamalnath, « Shareholder Primacy in the Time of Coronavirus », Oxford Business Law Blog, 7 avril 2020.

Extrait :

It has become fashionable in these troubled times to write about how the coronavirus (or Covid-19) situation shows that the writer’s favourite policies are the best ones. Trite as it may be, I don’t want to miss the opportunity to explain and defend shareholder primacy as a theory / principle followed in corporate law.

Do companies have an ethical obligation to take care of employees during the coronavirus pandemic? If not, why are companies asking employees to work from home and even paying employees when they are not coming in to work? Even companies in the gig economy like Uber are stepping up and offering unexpected support to their drivers whom they have refused to consider as employees. For instance, Uber announced that it would offer 14 days of financial assistance to drivers affected by Covid-19. Similarly, to accommodate the demand from workplaces and educational institutions to switch to working online, tech companies like Google, Microsoft, and Zoom have begun offering some of their products’ features for free. Why are they going well beyond what current laws require them to do?

Have they begun to embrace stakeholderism (the idea that companies should service all stakeholders equally) and, if so, can we expect such continued benefits being offered to employees in need even after the pandemic has passed? I’d answer both parts of this question in the negative. In my view, these companies are guided by shareholder primacy (the idea that shareholder interests have primacy over that of other stakeholders).

The first and most obvious reason is that shareholders would want directors of the company they have invested in to step up to the occasion when a crisis as big as a pandemic is staring us in the face. While it is normally assumed that shareholder interests translate into profit-making or wealth maximization, intelligent directors would understand that a crisis calls for a different understanding of what shareholders want. The second possible reason for companies to act in the interests of stakeholders at this time is to enhance their reputation. A company making accommodations during a time of crisis might forego some profits in the short-term but will have reputational gains in the long term. The consideration of reputational incentives is not to suggest that companies acting altruistically should be seen as cynical. On the contrary, it is laudable that the directors of these companies have acted in the interests of the company by taking care of relevant stakeholders when it was most needed. The fact that company reputation was one of the variables in the calculus should be noted positively because that shows that shareholder primacy ensures companies act in the interests of other stakeholders when it is most essential. A third reason is that by offering benefits to employees (or independent contractors as in the case of Uber’s drivers) or customers as in the case of the tech companies, the companies have ensured that the relevant stakeholders (customers and employees / independent contractors) would want to work or continue to work with these companies.

If shareholder primacy leads to beneficial outcomes, why is it so reviled? Shareholder primacy is often confused with a myopic focus on short-term profits. To be sure, the company law of most countries requires directors to act in the best interests of the company and, in determining which interests within the company are to be prioritised, to give primacy to that of shareholders. The default assumption is that most shareholders would want to maximise the wealth that they have invested in the company. However, it is left to directors to consider other relevant interests where they are in the best interests of the company. As I have argued above, it was clearly in the interests of the company to prioritise various stakeholders’ interests and act accordingly, and in this instance they have acted accordingly. Not every situation has such an easy answer and so it is left to directors to choose the course of action best suited to the company, with the interests of shareholders being ultimately prioritised.

What happens after the pandemic has passed? While the coronavirus situation is a big crisis and companies have been stepping up, decisions prioritising the interests of one stakeholder over those of others are routine, even in calmer situations, or where a company alone is facing a crisis of some sort. Take for example, employees’ complaints about toxic work culture and harassment, which we now know was the case with Uber in the past. Often the response is to keep the issue under wraps or refuse to address the particular stakeholder’s needs. This unsavoury behaviour cannot however be attributed to either shareholder primacy or stakeholderism. We would expect that shareholders would want companies to clean their house as soon as they know there is trouble so that they are not at the receiving end of the law suit at a later date and, more importantly, because shareholders would want talented employees to be retained within the company. Unfortunately, the unsavoury behaviour is simply an expression of human nature in some cases and better incentives to prevent such behaviour need to be devised. Similarly, for concerns of other stakeholders, the environment for instance, environment protection and climate change laws would constrain directors’ actions rather than relying on principles of either shareholder primacy or stakeholderism to do the job.

All this is to say that there are problems with how companies are run and we need innovative solutions to create better incentives rather than falling back on paying lip service to stakeholderism as the Business Roundtable recently did in its 2019 statement.

À la prochaine…

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COVID-19 : questions juridiques pour le CA

Par la voie de Me Wahl, le cabinet Norton Rose Fulbright propose un intéressant billet sur les questions juridiques touchant les CA dans le contexte de la pandémie mondiale du Coronavirus : « COVID-19 : Questions juridiques touchant les conseils d’administration canadiens » (11 mars 2020).

Extrait :

Comment les conseils peuvent-ils s’acquitter de ces devoirs lorsqu’ils relèvent les défis que pose la COVID-19? Il n’y a pas de plan unique qui puisse régler les risques auxquels font face toutes les entreprises. Chaque société, en fonction de la nature de ses activités, subira des conséquences qui lui sont propres attribuables, directement ou indirectement, à la COVID-19. La responsabilité du conseil est de surveiller et suivre ces risques de même que la façon dont la société y répond. Un conseil prudent veillera à ce que : i) la haute direction informe adéquatement le conseil des principaux risques; ii) le conseil comprenne bien ces principaux risques; iii) des conseillers professionnels soient appelés à aider, au besoin et au moment opportun, à cerner, à gérer et à atténuer les risques; iv) un plan de contingence soit élaboré pour différents scénarios envisageables; et v) le conseil suive la mise en œuvre de ses décisions et conseils et fasse preuve de souplesse pour être en mesure de suivre et de répondre à l’évolution de la situation. Aucune liste ne saurait être exhaustive, mais parmi les points pertinents, notons les suivants :

  • La santé et sécurité au travail (p. ex. l’hygiène préventive, la gestion des employés ou visiteurs présentant des symptômes, les congés de maladie, la poursuite des activités, la protection des renseignements personnels, les restrictions de voyage et les exigences d’isolement);
  • L’interruption de la chaîne d’approvisionnement et les sources de remplacement éventuelles aux fins de l’approvisionnement;
  • L’incidence sur le chiffre d’affaires et les mesures à prendre face à une diminution du chiffre d’affaires;
  • L’incidence sur les liquidités et les mesures à prendre pour gérer les liquidités;
  • La protection d’assurance;
  • Les conditions contractuelles clés comme la force majeure et les clauses en cas de changement défavorable important, et la possibilité de négocier des modifications pour les nouveaux contrats à l’avenir;
  • L’incidence éventuelle sur la conformité financière pour les entreprises réglementées;
  • La pertinence de changer le lieu et la date de l’assemblée des actionnaires et comment le faire;
  • Si la tenue d’une assemblée d’actionnaires virtuelle (comme l’assemblée générale annuelle) est souhaitable et permise par la loi;  
  • Les obligations d’information et de dépôt prévues par les lois sur les valeurs mobilières, y compris le besoin de changer ou de retirer des prévisions;
  • La volatilité des marchés boursiers, qui pourrait favoriser une offre d’achat visant les actions de la société ou faire augmenter l’activisme actionnarial ou, à l’inverse, créer une occasion d’acquisition pour la société.

À la prochaine…