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Agences de conseil en vote : un projet de loi américain qui ressurgit

Bonjour à toutes et à tous, sacré nouvelle dans le domaine des agences de conseil ! Selon The Hill, « Congress should end corporate governance conflicts for investors » (8 janvier 2018).

 

In late December, the U.S. House of Representatives passed the Corporate Governance Reform and Transparency Act on a bipartisan basis. This bill is good news for investors in our capital markets, managers, employees, and other stakeholders of public corporations.

 

The Corporate Governance Reform and Transparency Act is squarely focused on addressing this conflict. The bill requires governance and proxy advisors to disclose to the U.S. Securities and Exchange Commission any conflict of interest they have when advising institutional investors on how to vote on various proxy items. It also provides for a standard process and timeframe for companies to review and provide feedback to the governance and proxy advisors on important company decisions including proxy items, before the advisors send their recommendations to investors.

 

Pour rappel, en juin 2016, un projet de loi intitulé « Corporate Governance Reform and Transparency Act » a été introduit à l’initiative du Comité sur les services financiers de la chambre des représentants devant le 114e congrès (H.R. 5311, Corporate Governance Reform and Transparency Act, 114e congrès, 2e session, Union Calendar no. 621, Report no. 114-798). Bien que ce projet de loi ait disparu de l’agenda législatif avec la fin du 114e congrès, son étude témoigne d’une volonté politique d’adopter une ligne plus dure envers les agences de conseil en vote. Afin d’« (…) améliorer la qualité des agences de conseil en vote pour la protection des investisseurs et de l’économie américaine, dans l’intérêt public, en encourageant la responsabilité, la transparence, la réactivité et la concurrence dans l’industrie du conseil en vote », ce projet propose la modification du Securities Exchange Act of 1934 pour imposer aux agences plusieurs obligations, dont celle d’être enregistrée auprès de la SEC.

Dans ses grandes orientations, cette réforme établissait une procédure exigeant des agences de conseil en vote qu’elles soumettent de nombreux documents et informations (notamment sur leur structure organisationnelle, sur les procédures en place relativement à la gestion des conflits d’intérêts et sur les procédures et la méthodologie utilisée pour en arriver à des recommandations de vote) afin d’obtenir une certification obligatoire pour poursuivre leurs activités. L’information fournie à cette occasion, ainsi que toute information subséquente contenue dans des mises à jour, était rendue publique sous réserve d’exceptions. Le projet de loi visait aussi à imposer aux agences de conseil en vote la mise en place de procédures raisonnables permettant aux entreprises de recevoir une version préliminaire des recommandations et de disposer d’un délai pour fournir leurs commentaires. Enfin, les agences se voyaient contraintes de mettre en place un ombudsman afin de recevoir les plaintes des entreprises, plaintes qui doivent être traitées dans un délai raisonnable et avant que ne se tienne le vote.

 

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Agences de conseil en vote : retour sur l’Instruction 25-201

Bonjour à toutes et à tous, je viens de publier mon dernier billet de blogue sur Contact : « Ces agences qui aident les actionnaires à voter » (22 décembre 2017). Ce billet a pour but d’expliquer ce que sont les agences en conseil de vote, de présenter les controverses dont elles sont l’objet et de décrire quelques démarches qui visent leur réglementation.

 

Quelle est ma conclusion ?

 

Au final, que penser de la position canadienne en termes d’encadrement des agences de conseil en vote? Le choix canadien de joindre les élans des États-Unis et de l’Europe en ce sens est d’abord à saluer. Le Canada ne pouvait faire cavalier seul et ne pas se pencher sur la réglementation des agences de conseil en vote, ce sujet ayant déjà fait réagir les régulateurs des plus grandes économies de la planète. En outre, cette industrie comporte d’autres enjeux. Notamment du fait que, par leurs interventions, les agences ont des effets bénéfiques7. Elles apportent un service aux investisseurs institutionnels, notamment en éclairant l’exercice de leur droit de vote, ce qui les incite à faire entendre leur voix lors des assemblées. Également, elles facilitent l’exercice du droit de vote des investisseurs, notamment par procuration, lorsque ceux-ci manquent de connaissances sur les méthodes de création de plateformes de votes ou sur la langue dans laquelle sont rédigées les résolutions de sociétés.

Bref, les agences de conseil en vote revivifient la démocratie actionnariale. Leur portée ne devait donc pas être contrecarrée à tout prix, mais bien encadrée. C’est ce qu’a fait le Canada et c’est une bonne chose. Toutefois, la position canadienne connaît de faiblesses qui mériteraient de rouvrir la discussion:

1. Le rôle restreint des acteurs des agences de conseil en vote au sein de leur industrie: En Europe, par exemple, il existe un code de bonnes pratiques qui a le mérite de conduire les agences de conseil en vote à réfléchir sur leurs modèles d’affaires pour revoir leurs pratiques.

2. L’absence d’intensité du message réglementaire s’adressant à tous les intervenants de la chaîne de détention de titres: À s’en tenir à la seule notion d’engagement, le régulateur canadien évoque peu celle des devoirs fiduciaires comparativement à la France.

3. L’absence de référence au principe «se conformer ou s’expliquer» applicable à la gouvernance d’entreprise: Cette exigence offre de la souplesse, tout en permettant aux acteurs du marché de conserver un droit de regard sur l’activité des agences de conseil en vote et de pouvoir les sanctionner.

En conclusion, en matière d’encadrement des agences de conseil en vote, le Canada a clairement avancé dans la bonne direction, mais il n’est sans doute pas arrivé au bout du chemin.

 

Je signale à mes lectrices et à mes lecteurs que ce billet est une synthèse d’un article à paraître à la Revue générale de droit d’Ottawa (volume 48 numéro 1, juin 2018) écrit avec Mme Anne Shirley LeBel et M. Francis Paradis.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Proposition actionnariale : la SEC apporte des éclaircissements

La Division of Corporation Finance de la Securities and Exchange Commission (SEC) a publié le 1er novembre 2017 un Staff Legal Bulletin No. 14 intitulé « Shareholder proposals ».

 

Extrait :

 

This staff legal bulletin provides information for companies and shareholders regarding Rule 14a-8 under the Securities Exchange Act of 1934.

This bulletin is part of a continuing effort by the Division to provide guidance on important issues arising under Exchange Act Rule 14a-8. Specifically, this bulletin contains information about the Division’s views on:

  • the scope and application of Rule 14a-8(i)(7);
  • the scope and application of Rule 14a-8(i)(5);
  • proposals submitted on behalf of shareholders; and
  • the use of graphs and images consistent with Rule 14a-8(d).

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Les actionnaires auraient-ils des devoirs ?

Intéressant article offert par les professeurs Hanne Birkmose et Florian Möslein « Mapping Shareholders’ Duties » sur l’Oxford Business Law Blog (6 janvier 2017). Cet article revient sur la riche thématique des devoirs des actionnaires !

 

Recent developments in European company law and capital market law have heralded a break with the traditional perception in company law that shareholders have no duties when they invest in companies. Instead, they are increasingly subjected to various duties. As part of a research project on ‘Shareholders’ duties’, we map these shareholders’ duties in order to provide an overview of current and prospective duties. This mapping shows a great variety as well as variance of shareholders’ duties.

(…)

The mapping of shareholders’ duties shows that shareholders’ duties are not a rare and exotic phenomenon in European company and capital market law. On a closer look, there are indeed many examples, and they form fully integrated parts of the legal system instead of being rate exceptions.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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BlackRock s’oppose au capital-actions à classe multiple et demande l’intervention du régulateur

Le fameux fonds BlackRock fait entendre sa voix pour le régulateur intervienne afin de mettre fin au capital-actions à classe multiple : « BlackRock opposes banning companies from indexes over voting rights » (Reuters, 23 octobre 2017). Voilà encore le sujet des actions privilégiées et subalternes sur le devant de la scène !

 

BlackRock Inc, the world’s largest asset manager, is lambasting the architects of market indexes like the S&P 500 .SPX for ostracizing companies that deny equal voting rights to shareholders, saying that doing so could limit the opportunities of investors in index funds.

BlackRock has said it supports all shareholders getting an equal vote. Yet, in a report published on the company’s website on Monday, the manager of nearly $6 trillion in assets said it is up to regulators to set corporate-governance policies, not index providers.

BlackRock said that, without regulatory changes, corporations should seek shareholders’ approval of capital structures that deprive some of voting rights, and that they should let shareholders exercise equal voting rights on specific topics, such as executive pay, that pose a conflict of interest.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Vote des actionnaires : l’AMF modifie les choses

Bonjour à toutes et à tous, l’AMF France vient de faire savoir par un communiqué de presse que sa doctrine en matière de vote des actionnaires en assemblées générales allait être modifié et qu’un groupe de travail allait être mis en place.

A l’issue d’une consultation des acteurs de la place, le Collège de l’AMF retient certaines propositions du rapport « Pour un vote transparent et effectif en assemblée générale à l’ère du numérique » de la commission consultative « Epargnants ». Dans ce cadre, l’AMF fait évoluer sa doctrine concernant les assemblées générales des sociétés cotées. Un groupe de travail est également mis en place afin d’approfondir la réflexion sur d’autres propositions de ce rapport.

Un rapport visant à améliorer le fonctionnement des assemblées générales

Publié en mars 2017, ce rapport comprend 31 propositions pour améliorer la réglementation et les pratiques de vote en assemblée générale des sociétés cotées. Il est le fruit de travaux et d’auditions d’un groupe de travail composé de membres issus de la commission consultative « Epargnants » de l’AMF. Comprenant des représentants d’associations d’épargnants et d’actionnaires individuels, des représentants d’associations de consommateurs ainsi que des experts sur les questions de défense ou d’information des épargnants (avocats, universitaires, journalistes…), cette commission consultative a pour fonction d’éclairer les décisions du Collège susceptibles d’avoir un impact sur la protection des intérêts des épargnants, en exprimant spécifiquement les vues des actionnaires individuels ou des investisseurs en produits d’épargne collective.

Les propositions retenues par le Collège de l’AMF

  • Des propositions pour accroître la transparence du vote en assemblée générale : le Collège a décidé, lors de sa séance du 18 juillet 2017, de reprendre à son compte plusieurs propositions de ce rapport et de les intégrer, sous forme de recommandations, à la doctrine de l’AMF. Ces propositions sont ajoutées, sous réserve d’ajustements mineurs, à la Recommandation DOC-2012-05 concernant les assemblées générales d’actionnaires de sociétés cotées.
  • Deux propositions dont la mise en œuvre implique des modifications législatives et réglementaires. Ces deux propositions visent à favoriser la possibilité pour les actionnaires de proposer des points et des projets de résolutions en assemblée générale. Il s’agit, d’une part, de la proposition n° 17.1 du rapport qui préconise de diviser par deux les seuils de détention requis pour inscrire des points et des projets de résolutions en assemblée générale. La mise en œuvre de cette proposition impliquerait un amendement de l’article R. 225-71 du code de commerce. Il s’agit, d’autre part, de la proposition n° 17.3 qui préconise d’aligner les seuils de détention requis de la part des associations d’actionnaires qui souhaitent déposer des projets de résolutions sur ceux, moins élevés, applicables aux actionnaires individuels. La mise en œuvre de cette proposition impliquerait un amendement de l’article L. 225-120 Il du code de commerce.

En revanche, le Collège a considéré que l’absence d’un consensus suffisant parmi les acteurs de la place ne lui permettait pas de reprendre à son compte plusieurs autres propositions du rapport ou de les approfondir utilement. Ces propositions contiennent notamment des recommandations relatives au vote à distance et aux plateformes de vote électronique.

La mise en place d’un groupe de travail pour approfondir la réflexion sur les autres propositions du rapport

Enfin, le Collège a décidé que certaines propositions justifiaient la poursuite des travaux, notamment dans la perspective de la transposition de la directive (UE) 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires. Ces propositions concernent notamment le vote par correspondance, le vote par procuration ainsi que les votes rejetés.

A cet effet, le Collège a décidé la mise en place d’un groupe de travail restreint composé, à parité, de membres des commissions consultatives « Epargnants » et « Emetteurs » de l’AMF, ainsi que des représentants de la gestion d’actifs et des professionnels du titre. Co-présidé par les présidents de ces deux commissions, ce groupe de travail sera chargé d’approfondir les réflexions sur ces propositions et de soumettre au Collège des recommandations.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Hedge funds et gouvernance d’entreprise : activisme des CA et réaction au découplage

Bonjour à toutes et à tous, je vous signale que je viens de publier mon dernier billet sur le blogue Contact de l’Université Laval : « Le retour des hedge funds » (18 octobre 2017).


Voici quelques extraits :

Depuis quelque temps, certains hedge funds développent une nouvelle activité: l’investissement dans les entreprises par l’entremise d’achat de titres. Utilisant leur statut d’actionnaire, ils sont accusés d’activisme. On leur reproche de pousser certaines sociétés à générer des rendements financiers rapides sans égard aux conséquences négatives à long terme de cette stratégie pour les entreprises, leurs parties prenantes et l’économie.

Pour y faire face, 2 orientations doivent être prises :

  1. Un CA responsabilisé, placé au centre du jeu et qui dialogue : la présence d’administrateurs compétents, qui respectent des normes générales de conduite (loyauté, prudence et diligence), qui possèdent une compréhension des enjeux de l’entreprise et qui sont activement engagés envers elle et ses actionnaires est nécessaire.
  2. Un droit de vote des actionnaires mieux compris et bien encadré : l’investissement dans les titres de sociétés réalisé par les hedge funds a entraîné l’émergence de phénomènes nouveaux comme la propriété occulte (hidden ownership) et le vote vide (empty voting). Si les hésitations sont encore nombreuses quant au choix législatif à privilégier pour faire face au découplage, quelques pistes d’action se dégagent : accroître la transparence associée à un contrôle plus grand de l’attribution et de l’exercice du vote des actionnaires; interdire le droit de vote découlant du découplage; renforcer les devoirs de loyauté des actionnaires en regard de l’entreprise; ou donner aux tribunaux plus de flexibilité pour dénoncer les situations d’abus et de violation du droit.

 


À la prochaine…

Ivan Tchotourian