mission et composition du conseil d’administration | Page 6

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement normes de droit normes de marché

De la contrainte pour plus de femmes dans les CA !

Mon dernier billet de blogue sur Contact est paru et il s’attaque à un sujet hautement d’actualité : la féminisation des CA (« La place des femmes dans les CA: l’intenable position canadienne », blogue Contact, 24 septembre 2018). Parmi les sujets qui animent le plus la gouvernance d’entreprise figure la place des femmes dans les CA et les postes de haute direction. Sur le plan juridique, ce sujet fait d’ailleurs l’objet de position opposée des États… loin du consensus supposé. Les États se répartissent comme suit :

  • Certains imposent des quotas et des sanctions en cas de non-respect : Norvège, France, Allemagne, Pays-Bas…
  • D’autres incluent la diversité dans des codes de gouvernance ou demandent aux entreprises de se soumettre au principe du comply or explain (« se conformer ou s’expliquer ») : dont le Canada, mais aussi la Suisse, la Finlande, le Danemark, l’Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande…
  • D’autres enfin choisissent de ne rien faire et de laisser le marché fonctionner : États-Unis, Chine, Russie, Japon, Grèce…

Il semble que le Canada manque d’ambition, même si la récente loi fédérale ouvre les CA à la diversité plus qu’à la seule féminisation. Le Canada regarde souvent du côté des États-Unis. Or, que voit-on ?

Aux États-Unis, jusque récemment, aucune disposition (contraignante ou non) n’incitait à la féminisation des CA. Sur le plan réglementaire, l’essentiel du droit américain tenait dans une position prise par la Securities and Exchange Commission (ci-après « SEC ») en février 2010. Mais, les parlementaires californiens ont adopté le 5 septembre 2018 une loi visant à contraindre les CA à intégrer des femmes en leur sein (SB-826 Corporations: boards of directors, Enrolled and presented to the Governor, Californie, 10 septembre 2018.). La loi SB-826 Corporations: boards of directors ajoute deux articles à la loi californienne sur les sociétés par actions : les articles 301.3 et 2115.5. En vertu de l’article 301.3, la loi impose aux sociétés cotées sur un marché américain dont le siège social est en Californie d’avoir un minimum d’une femme dans leurs CA d’ici le 31 décembre 2019. À compter du 31 décembre 2021, ce chiffre devra être au moins de deux pour les sociétés dont le CA comprend cinq membres et, au moins, de trois pour les sociétés dont le CA comprend six membres et plus. De plus, la loi prévoit qu’au plus tard le 1er juillet 2019, le secrétaire d’État de la Californie publiera un rapport sur son site Internet dressant un bilan des entreprises soumises à la loi et de celles qui disposent d’au moins une femme au sein de leur conseil. Au plus tard le 1er mars 2020, le secrétaire d’État de la Californie publiera un rapport annuel sur son site Internet indiquant minimalement le nombre de sociétés soumises à la loi et qui s’y sont conformées durant l’année; le nombre de sociétés qui ont déplacé leur siège social vers un autre État; le nombre de sociétés dont les titres étaient échangés sur un marché américain, mais qui ne le sont plus. Enfin, même si elles sont réduites par rapport à ce qui était initialement annoncé, la loi prévoit des sanctions financières en cas de non-respect.

 

Être audacieux
En 2014, le Canada a choisi d’entreprendre une démarche souple pour baliser la représentation des femmes dans les CA et dans les postes de haute direction. Malheureusement, le bilan chiffré de cette démarche dénote de trop faibles progrès. Ce qui n’est pas vraiment surprenant: attendre que le marché et les investisseurs disciplinent les entreprises est long et incertain.

Cette attente doit faire place au courage d’agir en resserrant la législation! Rappelons-nous que la loi a su être utile dans le domaine de la gouvernance d’entreprise lorsqu’il a fallu réagir aux soubresauts du marché boursier10. Plus encore, une étude récente comparant le Canada et la France conclut qu’une loi contraignante a des résultats plus rapides qu’une loi souple en matière de féminisation des conseils d’administration, sans différence majeure quant au capital humain des administratrices recrutées11.

Selon moi, la diversité, et tout ce qu’elle apporte de positif à une entreprise et à sa gouvernance12, mérite sans doute mieux que le timide comply or explain. Et puis, quel risque y a-t-il à être ambitieux et à faire changer les mentalités dans ce domaine, sachant que les pays qui ont entrepris des démarches en ce sens en récoltent déjà les bénéfices?

 

À la prochaine…

finance sociale et investissement responsable Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement

CA et changement climatique : le temps d’être proactif

Le cabinet Osler publie un billet très intéressant sur la mission des CA qui revient sur ce qui semble être devenu le cœur de la mission des CA : faire de la RSE ! « Les changements climatiques : les raisons pour lesquelles les conseils d’administration doivent être proactifs » (12 mai 2017).

 

Les changements climatiques et leurs impacts potentiels sont de plus en plus pertinents aux quatre coins du globe. En effet, le rapport sur les risques mondiaux de 2016 du Forum économique mondial hisse l’« échec de l’atténuation des changements climatiques et de l’adaptation » au rang du risque le plus important auquel le monde devra faire face au cours des dix prochaines années.

Les membres des conseils d’administration des entreprises canadiennes doivent être conscients de cette réalité exigeante et doivent prendre en considération les conséquences, les risques et les occasions éventuels à long terme que présentent les changements climatiques pour les organisations qu’ils administrent.

Nous soulignons ci-dessous quelques-unes des raisons pour lesquelles les changements climatiques doivent figurer à l’ordre du jour des conseils d’administration de façon récurrente.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement

CA et RSE : se poser les bonnes questions !

La Caisse de dépôt et placement du Québec propose un billet très intéressant intitulé « Le conseil d’administration et la responsabilité sociale de l’entreprise : un rôle à assumer… et des questions à poser! » (1er mai 2018).

 

Extrait :

 

Agir dans l’intérêt de la société

Au Canada et au Québec, les administrateurs de sociétés doivent respecter des devoirs généraux de diligence et de loyauté. En vertu de ce dernier devoir, ils sont tenus d’agir dans le meilleur intérêt de la personne morale. La Cour suprême du Canada, dans l’affaire BCE, a précisé la responsabilité des administrateurs dans la recherche du « meilleur intérêt de la société »iii. Pour le tribunal, celui-ci « ne se limite pas à la valeur des actions ou au profit à court terme » et « dans le contexte de continuité de l’entreprise, cette obligation vise les intérêts à long terme de la société ». Dans certaines circonstances, il pourrait également s’avérer nécessaire de tenir compte de l’effet des décisions sur les parties prenantes (actionnaires, employés, créanciers, consommateurs, gouvernements communautés) dans la poursuite du meilleur intérêt de la société.

Le devoir des administrateurs

Les dimensions ESG doivent être prises en compte dans l’établissement de la planification stratégique, la gestion de risques, le suivi de la performance et la divulgation de l’information externe. Le conseil d’administration, qui supervise ces responsabilités, doit questionner la direction sur ces enjeux et leurs impacts

 

Mais un message fort se dégage : « Prendre en compte les enjeux ESG s’avère essentiel pour toute organisation qui veut poursuivre et développer ses activités de manière pérenne et responsable. Et c’est aux membres des conseils d’administration d’assurer le leadership de la mise en place non seulement des outils de gouvernance nécessaires, mais aussi d’une culture d’entreprise sensible à ces enjeux ». On ne saurait mieux dire !

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement Nouvelles diverses

CA : pourquoi tous démissionner ?

Bonjour à toutes et à tous, Yvon Allaire livre une belle réflexion sur la démission en bloc : « Démission en bloc des administrateurs: pourquoi et à quoi cela sert-il ? » (Les affaires.com, 6 avril 2018).

 

Qu’elles soient publiques ou privées, les organisations dont un actionnaire détient la majorité (ou l’entièreté) des votes soulèvent des enjeux de gouvernance qui leur sont propres. Pour ce type d’organisation, le seul et ultime moyen pour le conseil d’exercer une certaine influence en cas de conflit avec l’«actionnaire», consiste en la menace de démission en bloc et le cas échéant, d’une démission en bloc bien médiatisée, expliquée et motivée. Évidemment, c’est une arme que l’on doit manipuler avec précaution; son utilisation demande un certain courage, une certaine abnégation, certes des qualités dont l’absence est plus notable que la présence.

Toute personne qui accepte de siéger au conseil d’une société avec actionnaire de contrôle, qu’elle soit privée ou publique, doit bien assimiler ce fait et les limites que cela impose aux pouvoirs du conseil. Le candidat à un poste au sein d’un tel conseil doit être prêt à offrir sa démission, seul ou avec d’autres, lorsque l’«actionnaire de contrôle» veut prendre des décisions ou des orientations qu’il estimerait ne pas être conformes aux intérêts à long terme de la société.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement

Président d’un CA : quel rôle ?

Le quotidien français Les Échos.fr revient sur le rôle du président d’un conseil d’administration dans un article publié le 15 février 2018 : « À quoi sert le président du conseil d’administration ? ». Cet article expose le dernier travail de l’Institut français des administrateurs de sociétés.

 

Extrait :

Le président semble donc maître de l’ordre du jour des travaux du conseil d’administration et garant de son bon fonctionnement. Compte tenu des prérogatives générales du conseil d’administration concernant la stratégie de l’entreprise, mais aussi en matière de gouvernement d’entreprise, la maîtrise de l’agenda du conseil d’administration confère en pratique au président un rôle assez important, et celui-ci dispose de champs d’influence importants qui ont un impact sur l’efficacité du conseil et la performance de la société.
(…) L’Institut Français des Administrateurs s’est également saisi de la question. Dans un rapport présenté le 26 janvier dernier, l’IFA a présenté les résultats des travaux menés par un groupe de travail sur le rôle du président de conseil d’administration. Le rapport suggère également de décrire plus précisément le rôle du président du conseil au sein des codes de gouvernement d’entreprise, ainsi que dans les règlements intérieurs des conseils d’administration.
Il va plus loin, en recommandant un certain nombre de bonnes pratiques en cas de gouvernance dissociée, notamment que le président ne soit ni un rival, ni un « père dominateur », ni un allié compatissant du directeur général. Il suggère également d’établir une charte définissant les rôles respectifs du dirigeant effectif et du président non exécutif, y compris en période de crise. Il invite le président et le directeur général à se rencontrer régulièrement et au moins mensuellement, et à aborder de façon transparente tous les sujets importants, y compris ceux qui fâchent. Enfin, le rapport souligne que le président doit recevoir suffisamment de documents internes pour être bien informé de la marche et des projets de la société.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement

Cumul des fonctions entre président du CA et chef de la direction : l’exception française

Reuters publie un article portant sur le cumul des fonctions de président du CA et de chef de la direction qui démontre le particularisme de la situation française : « Corporate France swims against tide on chairman independence » (30 octobre 2017).

 

Corporate France is bucking the global trend of splitting the roles of chairman and CEO, with Thomson Reuters data showing a steady growth in the number of French companies that have merged the posts in the past 15 years.

Almost three quarters of listed French companies tracked by Thomson Reuters now have or have had one person holding both positions, compared to 60 percent in the United States and fewer than 20 percent in Britain, Germany and Japan, according to an analysis of more than 6,500 companies.

 

Surprenant quand on sait que le Clarkson Centre research canadian (pays dans lequel plus de 80 % des entreprises de l’indice TSX adopte le non-cumul) a établit que :

 

As indicated by recent Clarkson Centre research, there is considerable reason for highlighting the split Chair/CEO model in particular as a governance initiative. While it makes sense that companies with sound governance structures would demonstrate good governance overall, as shown by scoring mechanisms such as the Clarkson Centre’s “Board Shareholder Confidence Index”, the correlation between high scores and CEO/Chair splits in CCBE’s latest study is remarkably high.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

Gouvernance mission et composition du conseil d'administration Normes d'encadrement objectifs de l'entreprise Valeur actionnariale vs. sociétale

Dividendes : les risques d’une dette

Dans Les affaires, Patrick Thénière et Rémy Morel reviennent sur la logique du versement des dividendes aux actionnaires dans un billet critique intitulé : « Ne touchez pas à notre précieux dividende ! ».

 

Comme on le sait, une entreprise peut s’abstenir de verser un dividende à tout moment. Cependant, donnez quelque chose à quelqu’un sur une base régulière, et vous verrez qu’il deviendra difficile de vous arrêter sans créer l’émoi! (…)

Pour cette raison, nous pensons que les investisseurs recherchant les revenus avant tout prennent parfois des risques insoupçonnés. Nous vous invitons à lire la petite histoire fictive de Lucie et Martin que nous avions publiée il y a plus d’un an.

Idéalement, un dirigeant d’entreprise devrait pouvoir couper un dividende à tout moment, sous seul prétexte qu’il compte effectuer plutôt un rachat d’actions, ou réinvestir dans les activités de la société pour les améliorer. Dans les faits, cela se passe rarement de cette façon. C’est pourquoi nous pourrions presque considérer ce paiement annuel au même titre qu’une dette.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian