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Actions et contrats financiers : un travail prometteur

M. Romain Dambre propose un bel ouvrage aux éditions Bruylant intitulé : « Les contrats financiers sur actions : Droit français et européen des sociétés ». Un beau sujet que l’auteur aborde !

 

Les contrats financiers permettent aux parties de façonner le monde à l’image d’un profil de risque optimal : les parties y créent les conditions d’une réalité dérivée, un monde synthétique purgé de risques indésirables. Instruments de transfert de risque, les contrats financiers portent la marque d’une forte abstraction à l’égard du bien sous-jacent. Si les parties peuvent souhaiter fixer les conditions d’un transfert différé de la propriété, elles privilégient souvent la vertu protectrice ou le potentiel spéculatif de ces instruments en considérant les attributs économiques attachés à la propriété du bien sous-jacent plutôt que sa titularité sur le plan juridique.

Se dégage alors une règle d’autonomie du contrat financier à l’égard du bien comme du contrat sous-jacents, justifiée notamment par des considérations d’ordre systémique tenant à la protection des marchés financiers. Cette logique est toutefois mise à l’épreuve au contact du droit des sociétés.
Technique contractuelle de synthétisation de la propriété, le contrat financier opère un hiatus potentiel entre le statut juridique de l’actionnaire et son exposition à l’aléa social, menaçant de ce fait les équilibres traditionnels du droit des sociétés, notamment en termes d’attribution de la qualité d’actionnaire et d’exercice du droit de vote.

Si la règle d’autonomie, bien qu’ébranlée, reste le principe en droit des sociétés, les principes directeurs du droit boursier – Transparence, Égalité, Intégrité – conduisent à y faire exception face aux perturbations engendrées par ces techniques de dissociation de la forme juridique et de la substance économique, que l’on pense aux hypothèses de vote « vide » ou de prises de contrôle rampantes. Aussi la réglementation boursière soumet-elle les contrats financiers sur actions à un régime similaire à celui applicable aux titres financiers sous-jacents, notamment en matière de transparence des participations, d’offre publique et de répression des abus de marché.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Shareholder stewardship et shareholder duties : article éclairant

Bonjour à toutes et à tous, Iris Chiu et Dionysia Katelouzou ont publié un intéressant working paper sur SSRN intitulé : « From Shareholder Stewardship to Shareholder Duties: Is the Time Ripe? ».

 

In the context of the increasing institutionalisation of global equity, this chapter examines the development of the soft law of shareholder stewardship originating in the UK Stewardship Code and provides insights into its prospective evolution into hard law standards of behaviour for institutional shareholders. We argue that the time is ripe for the development of shareholder duties on the part of institutional investors. We contend that the proposed Shareholder Rights Directive is already taking a step towards that direction by introducing a semi-hard law of a fiduciary duty to demonstrate engagement at a pan-European level. We argue that such a duty is relevant to different European jurisdictions; even if ownership structures are still rather different across the EU there is a shifting balance between traditional blockholders, such as families, and institutional investors.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

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Say on pay et rémunération : les actionnaires s’éveillent de plus en plus

Bonjour à toutes et à tous, The Globe and mail propose un article de Janet McFarland intitulé :  “Shareholders get more savvy when it comes to say-on-pay votes”. Intéressant dans cette période d’assemblée annuelle…

 

Early voting results from annual meetings this year make it clear that shareholders are growing far more sophisticated in their analysis of compensation programs, and are more willing to vote “no” over concerns about fundamental pay design issues, even when there is no overwhelming controversy about a single major payment. (…)

Shareholders have said for years that they want compensation programs that clearly link pay to superior longterm performance, so it’s a logical next step for investors to move beyond simply reacting to one-off scandals to more intensively examine the features of pay design. Such scrutiny has the potential to greatly accelerate reform across Corporate Canada as companies watch the voting trends.

 

À la prochaine…

Ivan Tchotourian

engagement et activisme actionnarial Gouvernance Normes d'encadrement Nouvelles diverses objectifs de l'entreprise Valeur actionnariale vs. sociétale

Nos étudiants publient : L’activisme actionnarial offensif expliqué

Le séminaire à la maîtrise de Gouvernance de l’entreprise (DRT-7022) dispensé à la Faculté de droit de l’Université Laval entend apporter aux étudiants une réflexion originale sur les liens entre la sphère économico-juridique, la gouvernance des entreprises et les enjeux sociétaux actuels. Le séminaire s’interroge sur le contenu des normes de gouvernance et leur pertinence dans un contexte de profonds questionnements des modèles économique et financier. Dans le cadre de ce séminaire, il est proposé aux étudiants depuis l’hiver 2014 d’avoir une expérience originale de publication de leurs travaux de recherche qui ont porté sur des sujets d’actualité de gouvernance d’entreprise. C’est dans cette optique que s’inscrit cette publication qui utilise un format original de diffusion : le billet de blogue. Cette publication numérique entend contribuer au partager des connaissances à une large échelle (provinciale, fédérale et internationale). Le présent billet est une fiche de lecture réalisée par Mmes Manon Berney et Chu-Ya Chia. Ces dernières analysent la notion l’activisme actionnarial offensif et reviennent en parallèle sur l’article « Shareholder Activism as a Corrective Mechanism in Corporate Governance » de Paul Rose et Bernard Sharfman. Je vous en souhaite bonne lecture et suis certain que vous prendrez autant de plaisir à le lire que j’ai pu en prendre à le corriger

 Ivan Tchotourian

La question fondamentale qui se pose en matière d’activisme actionnarial est d’en déterminer l’opportunité : est-ce une bonne chose ? Les auteurs de l’article « Shareholder Activism as a Corrective Mechanism in Corporate Governance »[1] commencent par asseoir la présence de l’activisme actionnarial au sein des entreprises et l’insère dans le débat actuel qui tend à opposer le capitalisme managérial et le capitalisme axé sur la plus-value actionnariale. À ce jour, c’est le second modèle qui semble prendre une place prépondérante. L’article répond à la question portant sur l’opportunité et la légitimité de l’activisme actionnarial dit « offensif » qui apparaît comme le nouveau mantra de la gouvernance d’entreprise contemporaine. Les auteurs démontrent comment ce type d’activisme peut servir à promouvoir la valeur actionnariale tout en étant bénéfique pour l’entreprise. Quelle analyse peut-on en faire ?

Intersection entre activisme actionnarial et gouvernance de l’entreprise

La configuration traditionnelle en droit des sociétés par actions place le pouvoir et l’autorité de manière centralisée : tout est entre les mains des administrateurs ! Ce choix est justifié par le fait que les administrateurs sont plus aptes à prendre des décisions vu leur compétence, leur connaissance de l’entreprise et leur absence de passivité (contrairement aux actionnaires). Une telle concentration du pouvoir laisse les actionnaires relativement impuissants et c’est ce déséquilibre qui est identifié comme le moteur de la montée de l’activisme actionnarial. Les auteurs soulignent que l’idée de l’activisme actionnarial ne tend pas vers un contrôle du conseil d’administration, mais plutôt un partage provisoire de compétences… en admettant la prémisse que, dans certaines situations, les actionnaires sont aptes à imposer des décisions qui s’inscrivent directement dans une optique de maximisation de la valeur actionnariale et de l’efficience des activités de l’entreprise.

Différencier les actionnaires

Les types d’actionnaires diffèrent au sein d’une entreprise et les auteurs en identifient un en particulier qui est susceptible de participer et implanter de politiques de gouvernance. Il s’agit des information traders. Sur la base de leurs recherches et des recommandations externes, ils analysent et échangent des données du marché pour faire des choix d’investissement optimal. Ce sont en général des investisseurs professionnels, très qualifiés et ayant une expertise de haut niveau (tels les hedge funds actifs).

L’avantage qu’ils représentent réside dans leur volonté d’investir des ressources non seulement dans l’identification d’opérations stratégiques pour accroître la valeur actionnariale, mais également dans l’effort à mener pour réaliser ce changement au niveau de l’entreprise. Ce phénomène n’est rien d’autre que l’activisme actionnarial offensif.

Activisme actionnarial offensif : pas si mauvais !

L’activisme actionnarial offensif constitue un mécanisme correctif. Il permet aux entreprises d’éviter les erreurs commises par le conseil d’administration dû à l’insuffisance de l’information de ce dernier dans certaines situations. L’actionnariat offensif implique un partage de pouvoir entre le conseil et les actionnaires activistes. Si, en théorie, ce partage du pouvoir peut provoquer une course aux procurations qui risque de conduire à une décision sous-optimale prise par l’ensemble des actionnaires dont la majorité n’est pas suffisamment informée, il est constaté dans les faits que ce risque est minime. Les études empiriques montrent que l’activisme actionnarial offensif augmente significativement la valeur actionnariale, et ce, particulièrement quand il mène à une vente de l’entreprise, une cession des actifs non stratégiques ou un changement de stratégie commerciale. Il est également établit que cet effet positif de l’activisme offensif persiste en général pendant au moins un an après l’intervention, prouvant que l’activisme actionnarial offensif est véritablement bénéfique aux entreprises.

Investisseurs long-terme vs. court-terme : la contradiction levée

Finalement, les auteurs démontrent que la critique du court-termisme des hedge funds actifs est en grande partie infondée. Quel que soit l’objectif souhaité de l’investissement, tous les investisseurs tiennent à leur liberté de pouvoir vendre leurs actifs quand ils le désirent. La valorisation des actions de l’entreprise se fait également de façon similaire, peu importe la période de détention envisagée. Plus important encore, si l’activisme actionnarial offensif des hedge funds était perçu par le marché comme court-termisme et nocif à l’entreprise sur le long terme, l’effet positif de ces hedge funds sur les prix d’actions n’aurait pas duré aussi longtemps que ce qui est observé dans les faits.

Conclusion : un questionnement fondamental oublié

Sans remettre en cause le rôle crucial du conseil d’administration, les auteurs démontre que l’activisme actionnarial offensif constitue un mécanisme correctif à la gouvernance qui augmente la valeur actionnariale. Une question cruciale demeure : la promotion de la valeur actionnariale par l’activisme des hedge funds ne se fait-elle pas au détriment de l’intérêt des autres parties prenantes, particulièrement quand cette augmentation de la valeur actionnariale est le résultat d’une vente de l’entreprise ou une cession des activités dites non stratégiques ?

 Manon Berney

Chu-Ya Chia

Étudiants du cours de Gouvernance de l’entreprise – DRT-7022


[1] ROSE Paul et SHARFMAN Bernard S., Shareholder Activism as a Corrective Mechanism in Corporate Governance, 2014 BYU L. Rev. 1015 (2015).

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Sociétés contrôlées, multiple catégories d’actions et performance

L’Investor Responsibility Research Center Institute vient de publier un rapport en mars 2016 intitulé « Controlled Companies in the Standard & Poor’s 1500 – A Follow-up Review of Performance & Risk » d’Edward Kamonjoh. Dans ce rapport, l’IRRC Institute y dénonce les actions à classe multiple dans les entreprises : celles-ci sous-performeraient du fait de la présence de telles actions.

Pour un commentaire, voir sur MarketWatch : « Companies with unequal voting rights underperform shareholder friendly ones, study finds ».

The Council of Institutional Investors, whose members collectively hold more than $3 trillion in assets, calling for an end to multi-class shareholder structures for new public companies. In a statement, the organization said that companies “going public should have a “one share, one vote” structure, simple majority vote requirements, independent board leadership and annual elections for board directors.” CII said that it “adopted these expectations in an effort to protect shareholder interests.”

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Ivan Tchotourian

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Rémunération des dirigeants : le CA doit prendre ses responsabilités

Belle réflexion offerte par le Financial Times sur le rôle que le conseil d’administration devrait assumer en matière de rémunération des dirigeants : « Boards are responsible for limiting excess pay » (Financial Times, 17 avril 2016).

Boards of directors are not appointed to rubber-stamp formulas devised by consultants, no matter what the result. If there appears to be something awry, they should be able to exercise their judgment and not be limited by employment contracts that deny them authority. BP’s remuneration committee failed this simple test and so found itself exposed to scorn.

Nothing absolves a board of its responsibility to limit the quantum of pay. Chief executives perform tough, demanding, responsible jobs and their decisions heavily affect the value of companies. But it is not obvious why some need to be paid double-digit millions to do their best when single-digit millions or less were accepted as sufficient financial rewards not so long ago.

Boards sometimes need to compete for talent, signing contracts that raise expectations and constrain their freedom to cap pay. As the tenure of CEOs has reduced, bosses want to get rich faster. Some argue that they could earn more in private equity, away from the unforgiving public spotlight.

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Ivan Tchotourian

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Actionnaires : faut-il renforcer leur pouvoir ?

Le choix de renforcer le pouvoir des actionnaires est-il « le » bon choix ? Au travers de l’exemple de la banque d’investissement Morgan, Jill Fisch aborde cette thématique dans une de ces dernières études intitulé : « The Mess at Morgan: Risk, Incentives and Shareholder Empowerment » (ECGI Law Working Paper No. 311/2016, mars 2016).

The financial crisis of 2008 focused increasing attention on corporate America and, in particular, the risk-taking behavior of large financial institutions. A growing appreciation of the “public” nature of the corporation resulted in a substantial number of high profile enforcement actions. In addition, demands for greater accountability led policymakers to attempt to harness the corporation’s internal decision-making structure, in the name of improved corporate governance, to further the interest of non-shareholder stakeholders. Dodd-Frank’s advisory vote on executive compensation is an example.

This essay argues that the effort to employ shareholders as agents of public values and, thereby, to inculcate corporate decisions with an increased public responsibility is misguided. The incorporation of publicness into corporate governance mistakenly assumes that shareholders’ interests are aligned with those of non-shareholder stakeholders. Because this alignment is imperfect, corporate governance is a poor tool for addressing the role of the corporation as a public actor.

À la prochaine…

Ivan Tchotourian